«Appendix ad librum De reliquiis SS. Bernardi et Malachiae» — Auctores varii

1713 APPENDICE. No 1. Rectification du catalogue des abbés de Clairvaux, donné par le Gallia Christiana.

1713D Une lettre autographe de Dom Et. Brice rectifie l’erreur commise dans le catalogue des abbés de Clairvaux, donné par le Gallia Christiana, tome IV. On y a fait figurer à tort un Jean II, qui aurait été le XXIIIe abbé. Il faut done, à partir du XXIVe inclusivement, retrancher, en se servant de ce catalogue, 1714D une unité de chacun des nombres qui expriment l’ordre de succession des abbés de Clairvaux.

La lettre de Dom Et. Brice est collée sur le recto de la feuille contenant les colonnes 808 et 809, dans l’exemplaire du Gallia Christiana appartenant à la Bibliothèque publique de Troyes, et provenant 1715A de Clairvaux, selon toute apparence. J’ignore à qui elle était adressée: la feuille de garde n’existe plus. Je l’ai copiée très-exactement.

«Il est juste, Monsieur, que ceux qui vous ont induit en erreur vous désabusent en se corrigeant eux-mêmes. Nous avons mis un Jean II, abbé de Clairvaux, sur la foy du Livre des Fiefs de l’Eglise de Langres. Ce livre est réel et subsiste dans la Bibliothèque du roy, no 9582 b. dans le Chartulaire de l’Église de Langres» (Dom Et. Brice a mal copié l’ancien no du ms. qui était 9852 B; le no actuel est 5188); et «c’est parce que j’ai vu moi-même et lu la Charte, que j’i ai remarqué la faute; elle ne consiste ni dans le nom de l’Abbé, ni dans le fait, mais dans la datte. Celui de nous qui a fait l’extrait a lu, sinon a mis, 1281 au lieu de 1287 qui i est; ce qui s’accorde parfaitement avec Jean III, qui, par ce moyen, ne sera plus que le second, qui fut élu en 1286. Ainsi il faut omettre, comme les autres ont 1715B fait, le 23e Abbé Jean II, et par ce moyen Jean III deviendra le Ile du nom et le 25e Abbé de Clairvaux qui fit l’accord avec Gui, évesque de Langres, que je trouve dans le même Chartulaire appelé Man. en 1280. Je ne sais pas si vous feriés si mal de lire ce Chartulaire pour votre histoire de Clairvaux, mais il faut trouver un quelqu’un qui sache lire, ce qui n’est pas si commun. J’ai 1716A l’honneur d’être avec toute la considération possible, Monsieur,

«Votre très-humble et très-obéissant serviteur, Fr. ET. BRICE. Le 9 décembre 1737, de l’Abbaïe de S.-Germain des Prés à Paris.»

Peut-être la lettre de Dom Et. Brice était-elle adressée à Dom Claude Guyton, qui a laissé deux volumes de notes extraites des archives de l’abbaye de Clairvaux, dont j’ai parlé plus haut? On voit qu’il y rapporte le texte d’un titre de l’année 1280, mentionnant Thibaut abbé de Clairvaux, avec l’intention bien évidente de prouver qu’il n’y a pas eu en 1280 un abbé de Clairvaux du nom de Jean. (Vr ms. Matthieu, XV, p. 81.)

J’ai trouvé dans les Archives de l’Aube une copie sur papier, collationnée en 1476, d’une convention entre Thibault, abbé de Clairvaux, et un abbé anglais, datée du jour de la Nativité de la S.-V. l’an 1282. Le même dépôt conserve l’original d’une convention 1716B entre le prieur de Cunfin (dép. de l’abbaye de S.-Claude) et Thibault, abbé de Clairvaux, datée du mardi avant Pâques de l’an 1280. — Parchemin, le sceau manque. On a collé au dos un fragment de papier sur lequel on lit: Charte remarquable pour prouver que ce n’était point un Jean II qui était abbé de Clairvaux en 1280.

No 2. Dernier acte de la vie conventuelle dans l’abbaye de Clairvaux. — Etat des revenus de Clairvaux en 1790.1715

1715B En 1790, l’abbaye de Clairvaux se composait de vingt-six religieux profès, y compris l’abbé Louis-Marie Rocourt, âgé de quarante-sept ans, de dix frères convers et de dix affiliés pensionnaires de la maison. Trois moines étaient absents. Le 24 mai de cette année, les officiers municipaux de la commune de Clairvaux signifièrent à l’abbé, au prieur et 1715C aux religieux qu’ils étaient prêts à recevoir la declaration de ceux d’entre eux qui voudraient s’expliquer sur leur intention de quitter la maison ou d’y demeurer. Voici leur réponse citée d’apreès le procès-verbal: «Monsieur le révérend abbé nous a dit qu’en sa qualité d’abbé de Clairvaux, il n’avait d’autre désir que de rester, vivre et mourir dans son abbaye, et a signé F. L.-M. ROCOURT, abbé de Clairvaux.» Dix-neuf religieux déclarèrent qu’ils étaient dans l’intention de profiter de la liberté qui leur était accordée par l’Assemblée nationale, et signèrent. Deux autres annoncèrent qu’ils ne sortiraient qu’après s’être munis d’une autorisation du pape. «M. La Ramée (Louis), maître des novices, âgé de cinquante-six ans, profès de Buzet, a déclaré vouloir rester dans l’ordre et la maison de Clairvaux par préférence, s’il est possible, et a signé Fr. LA RAMÉE.» Tous les frères convers manifestèrent l’intention d’user de la liberté accordée par l’Assemblée 1715D nationale.

Extrait du procès-verbal de l’inventaire fait à l’abbaye de Clairvaux par MM. les officiers municipaux dudit lieu, le 24 mai 1790, en présence de l’abbé, du prieur et des religieux. (Archives de l’Aube.)

1716B On voit par ce même procès-verbal que les revenus de l’abbaye montent annuellement en argent à la somme de 133,826 livres, 11 sous, 10 deniers:

En froment, à 481 septiers, 16 boisseaux (le septier composé de 18 boisseaux, le boisseau pesant 25 livres);

En avoine, à 434 septiers, 16 boisseaux;

1716C En conseigle, à 16 septiers;

En orge, à 47 septiers;

En navette, à 17 septiers, 13 boisseaux;

En pois et féves, à 4 septiers, 9 boisseaux;

En 89 milliers de paille;

233 chapons; 6 canards; 6 lapereaux; 2 paires de poulets; 24 fromages; 7 cochons; 22 jours de charrue; les charrois de 42 cordes de bois, de 225 milliers de paisseaux, et 45 livres de beurre;

Dans la coupe de la futaie de 325 arpents;

Dans celle du taillis et de la futaie de 146 arpents, 32 perches;

Dans 55 arpents 73 perches, qui sont destinés pour le chauffage de l’abbaye de Clairvaux, et dans 4,393 arpents 99 perches qui sont en réserve, et ne s’exploitent que dans les besoins urgents, en vertu d’arrêt du Conseil.

Il est dû à ladite abbaye la somme de 205,734 livres, 18 sous, 4 deniers; ladite abbaye doit, à son 1716D tour, non compris les vestiaires des religieux, les honoraires et gages des officiers de justice, arpenteurs, commis, domestiques, impositions, portions congrues et autres objets qui n’ont pu être fixés ni déterminés, la somme de 105,233 livres, six sous.

No 3. Certificat de M. Rocourt constatant l’authenticité du chef de saint Bernard.1715

1715D «Je soussigné, ancien abbé de Clairvaux, demeurant actuellement à Bar-sur-Aube, certifie à tous ceux qu’il appartiendra que le chef de saint Bernard, premier abbé de Clairvaux, qui avait été exposé depuis des siècles à la vénération des fidèles dans l’église de ladite abbaye, et dont j’ai donné à M. le baron Charles Caffarelli, préfet du département 1716D de l’Aube, officier de la Légion-d’Honneur, pour en disposer comme il jugera convenable, le reste précieux qui, en mil sept cent quatre-vingt-dix, est demeuré en ma possession, et sur lequel j’ai appliqué dans l’intérieur du crâne le même cachet en cire rouge dont l’empreinte est plus bas, a été tiré par moi, en présence de plusieurs personnes, 1717A dont je regrette de ne pouvoir plus joindre le témoignage au mien, du reliquaire qui le renfermait, lorsque les administrateurs du district de Bar-sur-Aube, au nom et conformément aux ordres du gouvernement, se sont emparés de toutes les matières d’or et d’argent qui se trouvaient dans le Trésor dudit Clairvaux. En foi de quoi j’ai délivré le présent certificat pour servir et valoir partout où besoin sera. Fait à Bar-sur-Aube, le premier octobre mil huit cent treize, signé L.-M. ROCOURT, ancien abbé de Clairvaux.»

A côté, à droite, est un cachet en cire rouge portant sur un écusson ovale les lettres L. M. R. entrelacées. Plus bas est écrit:

«Stephanus Antonius de Boulogne, etc. Viso praesenti instrumento sub signo et sigillo D. Rocourt, nuper abbatis Claravallensis, permittimus intro scriptas sanctas et insignes S. Bernardi, abbatis reliquias, primum D. Carolo Caffarelli, Praefecto Provinciae Albulensis concessas et ab eodem 1718A D. Praefecto Ecclesiae nostrae cathedrali, die 24a decembris, anno 1813, dono datas, atque in arca lignea deargentata vitroque clausa reconditas, publicae fidelium venerationi exponi. — Datum Trecis, sub signo nostro, sigilli nostri appositione, die quarta mensis septembris, anno Domini millesimo octingentesimo decimo sexto.

Loc. Sigilli.« † STEPHANUS ANTONIUS, Episcopus Trecensis.»

Ces deux pièces, écrites sur papier, existent au secrétariat de l’évêché de Troyes.

Le certificat de M. Rocourt, constatant l’authenticité du chef de saint Malachie, et l’autorisation de l’exposer donnée par M. de Boulogne, se trouvent dans la châsse de saint Malachie, mais comme ces documents sont entièrement semblables à ceux que nous venons de citer et portent les mêmes dates, il est inutile de les reproduire.

No 4. Recherches sur les reliques enlevées à Clairvaux en 1790 et 1791.1717

1717B Feu M. Girardon, chanoine de la cathedrale de Troyes, me communiqua en 1845 quelques renseignements sur les reliques enlevées à Clairvaux, avant que l’abbaye fût vendue. Monsieur Girardon, originaire de Bar-sur-Aube, frère d’un administrateur du district de ce nom, s’était trouvé bien à même de connaître ce qui se passait à Clairvaux 1718B vers 1790; mais son grand âge ne lui permettait plus de rappeler à sa mémoire des souvenirs précis.

Il paraît que M. Rocourt, avec les chefs de saint Bernard et de saint Malachie, emporta celui de saint Vincent, diacre et martyr d’Espagne, celui de saint Barnabé, ainsi que celui de sainte 1719A Anne. M. Hérardin, curé de Longchamps, occupé à rédiger le catalogue de la bibliothèque de Clairvaux (Lettre des administrateurs du directoire de Bar-sur-Aube à MM. du directoire du département, 27 août 1791, Archives de l’Aube), enrichit M. Girardon, son ami, d’un grand nombre de précieuses reliques. M. Girardon en disposa, quand les jours redevinrent meilleurs, en faveur de communautés religieuses. Mais n’ayant tenu registre d’aucun de ces différents dons, il est fort difficile d’en retrouver la trace. J’ai vu entre ses mains une petite portion de la vraie croix, provenant du trésor de l’abbaye, dont il distribuait des fragments, avec son attestation en forme. Cet honorable chanoine avait encore une ou deux vertèbres de saint Bernard, accompagnées du certificat suivant:

«Je soussigné, L. Hérardin, prêtre desservant de Longchamps-lès-Clairvaux, diocèse de Troyes, certifie, à tous ceux qui ces présentes verront, 1719B qu’en 1792 (c’est une erreur, 1793 est la date donnée par les pièces officielles), résidant alors à Clairvaux, lors de l’ouverture du tombeau de saint Bernard, premier abbé de Clairvaux, qui fut faite par le procureur-syndic et les membres du district, j’ai extrait moi-même du tombeau deux vertèbres du saint abbé, et que je les ai divisées pour être distribuées aux églises qui désireraient posséder une portion de ce précieux trésor, que j’ai renfermé dans un papier fiscelé d’une tresse rouge et scellé de deux cachets, pareils à celui apposé au bas des présentes, lequel paquet j’ai remis à mon ami, M. l’abbé Girardon, chanoine de Besançon. En foi de quoi j’ai délivre ce présent certificat, signé de ma main et scellé de mon cachet; à Bar-sur-Aube, le 8 octobre 1823. Signé: Hérardin, desservant de Longchamps-lés-Clairvaux, cachet portant les lettres L et H entrelacées.»

Au bas était écrit: «Je certifie que M. L. Hérardin, 1719C curé de Longchamps, est digne de foi, et qu’on doit ajouter foi à sa signature; à Bar-sur-Aube, le 10 octobre 1823. Signé: L. M. Rocourt, abbé de Clairvaux.» A côté est une empreinte de cire rouge représentant un écu portant de . . . au chevron chargé de trois trèfles de . . . abaissé sous une fasce de . . . chargé de trois trèfles de . . . parti de Clairvaux; surmonté d’une couronne de comte, timbré à dextre et à sénestre d’une mître.

Je crois qu’une portion de la mâchoire inférieure de saint Bernard, dont l’authenticité était attestée par le même M. Hérardin, a été donnée, par M. Girardon, à l’archevêché de Besançon.

Il y avait, en 1845, au secrétariat de l’évêché de Troyes, un petit paquet en papier gris portant le cachet rompu de Mgr de Barral, ancien évêque de 1720A Troyes, avec cette inscription: «Petite coste et os du col de saint Bernard, et morceaux de soye et linges dont il élait enveloppé dans sa châsse. Ossements et reliques de saint Bernard, tirées de sa châsse à Clairvaux, en 1791 ou 1792 (inexactitude que je viens de relever).» Ces reliques avaient été données par le pieux M. d’Arvisenet, ancien grand vicaire du diocèse. Un petit fragment de soie bleue, portant un lion brodé en soie jaune, était joint aux os.

L’église de Ramerupt (arrondissement d’Arcis-sur-Aube) possède deux insignes fragments des chefs de saint Bernard et de saint Malachie, qui lui ont été donnés par M. Millot, ancien greffier en chef du tribunal de Troyes. M. Millot les tenait de M. l’abbé Dolat, curé de Sainte-Madeleine de Troyes qui les possédait de troisième main. Voici la copie de l’authentique dont ils sont accompagnés:

«Nos frater Ludovicus-Maria Rocourt, sacrae 1720B Facultatis Parisiensis doctor theologus, ordinis Cisterciensis Pater primarius, Abbas Claraevallis in dioecesi Lingonensi, omnibus praesentes litteras inspecturis et singulis quorum interest, salutem in Domino. Notum et certum facimus quod die secunda mensis Aprilis anni millesimi septingentesimi nonagesimi, precibus domini Joannis Jemelet in favorem alterius personae religionis catholicae, apostolicae et romanae cultricis, famaeque et nominis integritate commendabilis, benigne annuentes, et propter singularem nostram erga ipsum dilectionem Christianamque fraternitatem, praesente ipso supradicto domino, presentibusque dominis Francisco Brelet et Petro Francisco Meriot, ac insuper Ludovico Lavocat secretario commisso ad hoc specialiter invitatis subsignatis, parvas ex capite S. Bernardi primi Claraevallis Abbatis, et ex capite Divi Malachiae archiepiscopi vulgo Darmagh in Hibernia, verae caritatis foedere sanctissimo Bernardo adstricti dum 1720C viveret, et in nostra ecclesia sepulti, particulas excerpsimus, quas supradicto domino Jemelet dedimus, serico purpuram rubente, desuper papyro seorsim obvoluto ac sigillo nostro nostrique archicoenobii obsigillato impositas. In cujus rei fidem sub signo nostro manuali praesentes emisimus et archicoenobii muniri jussimus, die, mense et anno quibus supra. Locus sigilli. J. JEMELET. P. F. MERIOT F. BRELET. F. L. M. ROCOURT, abbas Claraevallis. L. LAVOCAT secus commus.

L’authentique est sur une feuille pliée de papier vergé d’une teinte bleuâtre.

Les fragments des chefs ont été sciés. La relique de saint Bernard a 66 millimètres dans le sens de la longueur; 18 millimètres dans sa plus grande largeur, et 5 dans la partie où elle est le plus étroite; 1721A son épaisseur, prise aux deux extrémités, est de 7 et de 8 millimètres. Sa teinte est plus foncée que celle de la relique de saint Malachie dont voici les dimensions, disposées dans l’ordre ci dessus: 48 millimètres — 15 millimètres — 14 millimètres — 5 et 6 millimètres. Chaque fragment est encore muni de son morceau de soie rouge, et porte le même cachet que l’authentique et de plus le sceau de Mgr l’évêque de Troyes, qui a reconnu ces reliques le 15 juillet 1850.

Chaque fragment est renfermé dans un papier de la même couleur que l’authentique, et marqué du même cachet, qu’il n’est pas nécessaire de briser pour ouvrir les petits paquets. Leur suscription est: De capite S. Bernardi et De capite divi Malachiae, de la même main que l’authentique.

Je termine en transcrivant une note que M. Du Lac voulait bien m’envoyer le 19 février 1846; elle a été rédigée par une personne qui a longtemps habité 1721B la Trappe de Bellefontaine.

«En 1791, D. Rocourt donna au R. P. D. Augustin de Lestranges deux parcelles très-considérables du crâne de saint Bernard et de celui de saint Malachie: j’en ai lu l’authentique. J’ai vu aussi les particules données par D. Augustin à l’abbaye de Bellefontaine; elles avaient chacune environ un centimètre carré de l’épaisseur de 4 à 5 millimètres; et on sait (l’histoire de la Val-Sainte en Suisse l’atteste) que l’abbé D. Augustin en donna des portions à peu près égales à bon nombre de ses monastères, et qu’il en réserva par devers lui à la Val-Sainte une relique assez grande pour en distribuer des fragments aux couvents à naïtre. Cette histoire de la Trappe de la Val-Sainte, près Fribourg en 1722A Suisse, est imprimée en tête des deux vol. in-4o intitulés: Règlements de la Maison-Dieu N.-D. de la Trappe de la Val-Sainte, Fribourg, 1792 ou 1793.

«Les reliques données à l’abbaye de Bellefontaine près Cholet (Maine-et-Loire), furent dérobées dans l’église où elles étaient exposées un jour de fête en 1826, je crois; mais il me semble que l’authentique de D. Rocourt y est encore conservé.

«Quant à la crosse d’ivoire , D. Rocourt l’avait emportée avec lui. Il en fit present à D. Augustin, je ne sais plus en quelle année, mais bien postérieurement à l’ancienne révolution; c’était, autant que je puis me le rappeler, dans les premières années de la Restauration. Ce qui est certain, c’est qu’on la possède maintenant à Bellefontaine, avec l’authentique écrit tout entier et signé de la main de D. Rocourt: je l’ai lu bien des fois. Cette crosse, du reste, n’a plus son pied ou bâton; on n’a que la partie recourbée depuis la petite 1722B boule qui probablement était attenante au pied, L’extrémité représente une espèce de tête de serpent, je crois. La couleur de l’ivoire est un peu jaunâtre; elle est presque partout couverte de taches rousses plus ou moins grandes. On l’a, bien à tort, surchargée de brillants quinne permettent pas de la voir dans toutes ses parties. La pomme ou petite boule est entriouverte par une large crevasse déjà ancienne.

«D. Rocourt donna en 1822 ou 1824 a un Pere trappiste une partie de la natte sur laquelle dormait saint Bernard: ce sont tout simplement des joncs tressés. On en conserve sept à huit à Bellefontaine, de la longueur de 10 à 12 centimètres; mais il n’y a point d’authentique»

No 5. Lettre de l’envoyé génois à son retour de Clairvaux (Ms. XV de M. l’abbé Matthieu, p. 55).1721

1721C Mon révérend Père et vénérable Seigneur (c’était D. Claude Largentier, abbé de Clairvaux), enrichi d’un si précieux don, duquel je suis favorisé par la bonté de Votre Réverence et charité de vos Pères, il ne se pouvoit faire qu’il ne me réussît un heureux voyage avec tout succès favorable. J’arrivai donc en notre pays le troisième août, et d’un premier pas fus au palais ducal, où étant introduit devant le sénat et le collége sérénissime, après avoir rendu compte en bref de la charge de ambassadeur qui m’avoit été imposée, je donnai à entendre pour preuve du soin et de la diligence que j’avois faite, que je portois avec moi quelque thrésor de nostre glorieux protecteur, et de la grande courtoisie que j’avois reçue de vous; je portai sur le lieu quant et quant moy ce thrésor. Cette nouvelle fut entendue avec telle réjouissance intérieure, avec tel applaudissement et contentement extérieur, que difficilement le pourrois-je expliquer. Il fut aussitôt arresté de luy 1721D faire une image entière d’argent, en icelle, au lieu propre que sa relique se doit mettre, y reposer cet os sacré, et le porter a l’advenir à la procession qui se fait annuellement en l’honneur de ce grand saint, le jour de sa feste. Dès l’heure mesme elle fut consignée ès-mains du duc sérénissime, afin de la conserver jusqu’à ce que le tout fust appresté Mais quand le bruit eust couru par la ville d’une telle chose, l’allégresse qu’en reçut un chacun, les grands et les petits, les nobles et le menu peuple, fust très-grande, et tous, désireux d’entendre raconter comme le tout s’estoit passé. cherchoient tous moyens comment et par quelle façon on l’avoit pu obtenir, qui leur causoit en partie d’aller demandant, 1722C mandant, sçavoir de quel endroit du corps du saint; l’un disant d’une façon, l’autre d’une ne se pouvant contenir d’allégresse. Au lieu où elle reposoit par plusieurs jours furent fort fréquentes les visites, et s’enquéroit-on plutost de moy de cecy que de tout autre chose qui m’eust pu arriver pendant mon voyage avec grande estime d’un tel thrésor, et mille remerciemens envers vos Révérences, vostre saint monastère et tous les Pères qui y demeurent; tellement qu’il n’y avoit celui qui ne désirast seulement que quelqu’un d’iceux que plus vous aymés, pour le bon succès d’une telle affaire, fussent été présents, pour leur pouvoir rapporter comme le tout s’estoit passé. Enfin vint le jour de la feste du saint, qui eschet fort à propos en ceste saison pendant laquelle tous les citadins sont en ville, à tout le moins vindrent quasi tous en la cité, et fust la plus fréquente et la plus célèbre procession qui se soit faite de nostre temps. Mais pour autant 1722D qu’on n’avoit pas eu du temps assez pour faire l’image, on mit la relique en un vase travaille en crystal doré, au milieu d’une châsse d’argent fort belle et bien grande, où on porte ordinairement le Saint-Sacrement en procession; et semble que plusieurs grâces et faveurs ayent esté déjà reçues en partie par l’intercession de ce grand saint. Les sérénissimes sénateurs ont depuis destiné lettres de remercimens à Vostre Révérence et à votre révérend chapitre, que je vous envoye empacquetées; et de plus ont ordonné qu’au plustôt soit faite une lampe d’argent honneste, sinon selon le mérite du saint, à tout le moins selon la qualité des personnes qui l’envoyent, laquelle est déjà bien advancée; et ont 1723A encore résolu que j’en prendrois la cure en main, pour vous l’envoyer asseurément, afin qu’elle soit perpétuellement pendue au sacré tombeau du saint, en témoignage de la dévote affection et reconnoissance de la République tant envers ledit saint, comme envers celui qui si courtoisement l’a favorisée et enrichie de sa relique; la seroient les armes de la République, seulement afin qu’elles rendent témoignage de ce que dessus. L’on n’a pas encore si bien arresté où on la doit reposer, parce que l’asseurance la voudroit au thrésor public, la piété et la devotion la désireroit en quelque autel propre où tout le monde la pût honorer commodément à toute heure. La République trouve que l’église bastie en l’honneur de saint Bernard est un peu suspecte, parce que les Pères qui y demeurent pourroient demain en estre chassés, si c’étoit le bon plaisir de la République; c’est pourquoy ils n’en ont l’usage que pour un temps. Peut-être que l’on 1723B y fera encore un coffre de marbre avec la serrure bien assurée en plusieurs clouds ça et là dispersés, et se mettra soubs l’autel de saint Bernard, comme plus propre que tout autre, puisque l’église a toujours esté particulière à la République. Enfin la jalousie de la bien conserver n’a encore résout aucune chose pour assurée. Je crois que Vostre Révérence et vos révérends Pères, entendant ces nouvelles, demeureront fort satisfaits d’avoir exaucé mes humbles prières, et verront par effect que tout ce que je dis de la grande et universelle dévotion envers ce saint est très-véritable. Seulement, tout ce qui me rend la mémoire de cecy triste, est qu’étant favorisé de me trouver présent à l’ouverture de ce sacré linceuil où sont enveloppés ces sacrés ossemens, je n’ay procuré que quelque partie, tant petite eustelle esté, me fust à moy donnée: mais je confesse que la grande révérence que j’y avois pour lors me retint de le demander, tant estoit grande l’affection 1723C et dévotion qui me pressoit à l’heure. Je sais bien que je n’en ay tant mérité, mais la grâce m’en pouvoit rendre digne: qui ne seroit autrement grâce; je fus aussy retenu à la demander. Comme j’ay esté religieux et bien zélé à consigner és mains de la République tout ce qui me fut par luy (sic) mis en confiance, si quelque chose me causoit cette faveur, ce seroit peut estre pour avoir esté fidèle en ce qui me fust confié. S’il y a moyen de l’obtenir, je le remets à la mesme charité et bonté qui me l’a faite la première fois: et si je peux tant que d’en venir à bout, elle demeurera continuellement en bonne garde en nostre maison, en l’honneur et révérence de ce grand saint. De vous en dire davantage ce seroit ou présumer ou se défier trop; le saint sçait bien et connoit bien l’intention de mon coeur, et que ce n’est que pour la plus grande gloire et l’honneur de la Divine Majesté, et pour le plus grand soulagement de mon ame; et fais à Vostre Révérence autant 1724A de soumissions. La faveur se pourroit faire commodément par l’occasion du porteur de la lampe s’en retournant en nos quartiers: scellant et cachetant en un plis de la lettre, sans découvrir à personne le thrésor qui seroit cacheté dedans. Le Seigneur vous veuille inspirer et conduire le tout à sa plus grande gloire, et donne à Vostre Révérence et à tous les Pères toute vraye félicité.

De Vostre Grandeur le très humble et obligé serviteur Augustin CENTURION. De Gênes ce sept septembre 1633.

Et au revers est: «Traduction des lettres de M. l’ambassadeur de Gênes. — Vertebra dorsi corporis S. P. R. Bernardi concessa sereniss. Reipublicae Januensi per Illustriss. et Excellentiss. D. D. Augustinum Centurionem, etc.»

Dom Cl. Guyton ajoute (ibid., p. 59): «J’ay vu l’original italien génois de la lettre et idiome françois 1724B du nommé Augustin Centurion, copiée plus haut. Vu aussi l’original de la lettre en remerciement de la relique, du Doge ou duc de la République du 17 octobre 1633; il y fait mention de la lampe d’argent dont il fait présent à saint Bernard, pour être conservée dans notre église, comme témoignage de sa persévérante et ardente dévotion envers un si grand protecteur de leur République. — Autre lettre du nommé Giovo, marchand à Lyon, du 4 février 1634, par le moyen duquel cette belle lampe, aux armoiries de Gênes, est venue à Clairvaux; y a été conservée jusqu’en 1720 et tant d’années, que Dom Gassot, Abbé de Clairvaux, l’a changée à Paris, ne connoissant pas apparemment les conséquences et le deshonneur qu’il faisoit à la maison d’écarter un pareil monument, et de la sainteté de saint Bernard, et de la République pour ce saint. — Et autres lettres en langue génoise, au même sujet, dont la traduction françoise s’y trouve jointe. — Aussi la 1724C lettre de Dom Claude Largentier, tant en son nom que de son convent, sans date, en remerciant de la dite lampe; au dessous est:

Illustrissimuo et Sereniss. Duci, nec non ornatissimis Consulibus ac Senatoribus insignis Reipublicae Genuensis.

Illustrissime Princeps, Dux Sereniss., caeterique ornatissimi Consules ac Senatores optimi, insignis Reipublicae Genuensis Domini D. colendissimi et observandissimi.

Eximiae pietatis vestrae erga Divum Parentem nostrum Bernardum Clarevallensem pignus ad nos delatum . . . . . etc. — Qua debemus reverentia et honore sedulo devovemus et spondemus, Illustrissimae ac Serenissimae Dominationis vestrae humillimi oratores et addictissimi servuli.

Fr. Claudius Abbas, totusque conventus monasterii Clarevallis.

Au bas de cette copie est: du 19 avril, 1634.

No 6. Attestation d’une relique de saint Bernard donnée à la Reine.1723

Registrum Secretariatus Reverendissimi in Christo P. ac Domini mei D. Claudii Largentier. XLV ti suae Claraevallis Abbatis. — Coeptum per me fratrem Antonium Saulnier de Lignoto, eiusdem Claraevallis religiosum expresse professum sacerdotem, nec non eidem Rmo Domino meo Abbati a secretis (1642-1643-1644 1645), 1 vol. petit in-fol. couvert en peau rouge, p. 66 et 67, an. 1643. (Archives de l’Aube.)

1723D Nous soubzsignés Abbé, Prieur, Cellerier et Sacriste de Clairvaux, ordre de Cisteaux, au diocèse de Lengres, attestons et certifions à la très chrestienne, très auguste et très pieuse Reyne de France et de Navarre, Madame Anne d’Austriche, Régente, et à tous que besoin sera, que la parcelle d’ossement par nous présentée à Sa Majesté, pour accomplissement de sa piété et dévotion à l’endroit de 1724D nostre très dévot père et bienheureux patron saint Bernard, premier abbé de cette maison de Clairvaux, a esté détachée et tirée de son précieux chef au dessous de l’oreille gauche, attenant la maschoire, avec toute la révérence et respect à nous possible. En foy de quoy nous nous sommes soubzsignez, continuants nos humbles prières envers le mesme Saint, à ce que, comme il a esté dez ce monde et 1725A est encore au ciel favory de la reyne des anges, il soit en terre protecteur de Sa Majesté, du Roy, et de toute sa royale postérité, avec très humble supplication à sa dite Majesté d’avoir toujours les 1726A successeurs de ce grand saint, sa famille et sa maison en singulière et particulière protection. Donné à Clairvaux, soubz le contre-seing de nostre secrétaire. Le 26 juillet 1643. Signé F. A. SAULNIER

No 7. Sacra lipsana sancti Bernardi et sancti Malachiae.1725

1725A Je réunis sous ce titre un certain nombre de notes qu’il m’a semblé utile de recueillir.

I. CULTE DE S. BERNARD ET DE S. MALACHIE.

Voir dans le Thes. nov. anecd. tom. IV, les statuts des chapitres géneraux de l’Ordre de Citeaux relatifs à la fête de ces deux saints — 1220, no 24 — 1260, no 4. — 1238, no 2. — 1295, on 1. — 1321, 1725B no 2. — 1234, no 5. — 1321, no 3. — 1274, no 34. — 1323, no 1. — 1273, no 17. — 1191, no 21. — 1250, no 2.

MS. XV de M. l’abbé Matthieu, p. 391. — Paris, 1452, 20 Mai. — Indulgences accordées à perpétuité par le Cardinal Guillaume d’Estouteville, Légat du Saint-Siége en France, à tous les fidèles vraiment repentants et confessés qui aideront à reparer l’église de Clairvaux, laquelle était in suis structuris, edificiis, paramentis, libris et aliis ornamentis ecclesiasticis multum collapsa, ruinosa et defectuosa . . . et qui la visiteront le jour de la fête de l’Assomption, de S. Bernard, de S. Malachie, de S. Eutrope, de S. André apôtre et à la Toussaint.

Ibid., p. 260. — 1512, 19 juin. — L’Abbé de Clairvaux accorde la participation des biens spirituels de son Abbaye et membres en dépendant, à tous les fidèles utriusque sexus, qui visiteront la chapelle nouvellement érigée en l’honneur de saint 1725C Bernard dans la Collégiale S. Étienne de Troyes par vénérable et discrète personne D. François Fenot.

(Voir aux Archives de l’Aube — Fabrique S. Etienne, tiroir 3, G. 1.)

Ibid., 60. — 19 janvier 1669. — Indulgence plénière et perpétuelle accordée par le pape Clément IX (Dat. Rom. ap. S. M. Maj.) à tous les fidèles, utriusque sexus, qui visiteront, après s’être confessés et avoir communié, une église d’un monastère de l’O. de Citeaux, le jour de la fête de S. Bernard.

Ibid., p. 62. — Copie de la lettre de D. Magloires, religieux de Bonnecombe, ligne de Clairvaux, Procureur Général à Rome pour l’O. de Citeaux — 1669.

Mgr. Vostre Ordre a obtenu indulgence plénière à perpétuité pour le jour de nostre glorieux saint Bernard. Je vous en envoye le Bref original, comme 1725D à son successeur, afin qu’il vous plaise le faire imprimer, et authentiquer les copies de quelques notaires . . . . . . Il y a dix-sept ans et demy que’je travaille à obtenir cette grâce. Les papes Innocent et Alexandre VII ne la vouloient pas donner perpétuellement. J’ay porté cette affaire à la Congrégation des Indulgences, dans laquelle ce grand saint à trouvé tant de serviteurs qu’elle y a été conclue, et le pape de sa main propre l’a signée, et, à ce qu’on m’a dit, c’est la première et l’unique de cette nature. Edmond de La Croix ne l’a pu obtenir de Grégoire XIV et de Clément VIII que pour 10 ans à l’égard des séculiers.

Ibid., p. 373. — Extract. e quad. Collect. definition. Cap. Gen. O. Cist.

(Avant 1669). — In festo SS. Patris nostri Bernardi fiat solemnis processio cum tribus stationibus per claustri ambitum et duobus responsoriis, 1726A nempe B. Bernardus et Felix namque, et antiph. Benedictus Dominus Deus Pater . . . . . . . Ad effectum indulgentiae (ad decennium saecularibus a SS. Clemente VIII concessae, regularibus vero plenariae) majore cum merito consequendum, omnes utriusque sexus Ordinis nostri personae in vigilia praedictae festivitatis BB. Patris nostri Bernardi jejunent, orationesque ei in Brevi commendatas faciant.

1726B Histoire de la ville de Paris, liv. VI, 243, t., I (Paris, 1725, in-fol.).

Eudes de Sully, évêque de Paris, institua dans sa cathédrale en août 1207 la fête de S. Bernard. Pour cela il assigna un fonds sur lequel devait se prendre la rétribution des matines, qui était de 6 deniers pour chaque chanoine présent, et autant à chacun des 4 marguilliers prêtres.

Archives de l’Aube. — 1443, 11 janvier. — Donation d’une pièce de vigne sise à Rouvre (Aube — chargee d’ung denier de censive chascun an envers les religieux de Clairvaux), faite aux religieux de Clairvaux par noble homme Regnault de la Mothe, demeurant à Bar-sur-Aube. «Parmy ce que les diz religieux seront tenus de dire une messe de saint Bernart pour une foiz pour l’entencion dudit Regnault. (Parchem. — le sceau manque.)

Courtépée, Descript. hist. du duché de Bourgogne. Dijon, 1777, t., II, 286. — La chapelle du collége 1726C Godran, à Dijon, sous le vocable de la sainte Vierge et de saint Bernard, fut consacrée par Sébastien Zamet, évêque de Langres, le 15 août 1617.

II. RELIQUES DE S. BERNARD ET DE S. MALACHIE.

Voyage Littéraire, 1717, Iere partie, p. 99. — Clairvaux. — «Nous eûmes l’honneur, disent les Bénédictins, de dire la sainte Messe . Ils sont tous deux si petits qu’ils n’ont pas un demipied de hauteur, mais la coupe en est fort large et peu profonde.»

Ibid., p. 104. — «On montre dans le trésor un calice d’une façon tout extraordinaire, et on prétend qu’il a été à l’usage de saint Malachie. Il est à peu près de la grandeur et de la forme des calices dont nous nous servons aujourd’hui; mais 1726D il y a quatre clochettes d’argent attachées à la coupe. C’est l’unique que j’aye vu de cette manière; et il est tout différent du calice de S. Malachie qu’on montre à la sacristie, et avec lequel on permet de dire la messe aux étrangers qui en ont la dévotion. On nous y montra aussi plusieurs choses qu’on prétend avoir été à l’usage de S. Bernard, et entre autres une chasuble. Elle est assurément ancienne, mais si elle est de luy, il faut dire que les religieux de Clairvaux n’étoient point si ennemis de la soye et de l’argenterie dans leurs ornements, puisque la soye est d’un galon d’or.»

Ibid., p. 148. Prâlon. — «On dit que S. Bernard venoit assez souvent à Prâlon pour consoler les religieuses, et les soutenir dans la vertu par ses avis et ses conseils. On voit encore à un quart de lieue du monastère une fontaine, qu’on prétend qu’il obtint miraculeusement du Ciel; elle a retenu 1727A le nom de la fontaine de S. Bernard. On nous montra aussi son calice et tous ses habits sacerdotaux, et assurément on ne peut pas douter qu’ils ne soient de ce temps-là. Le calice est un peu plus grand que celui de S. Bernard qui est à Clairvaux, mais il est de la même forme, et la coupe, pour garder ses proportions, est aussi plus large. La patène est de même. L’amit est grand, et a une parure de broderie, comme sont celles dont on se sert encore aujourd’hui dans les églises cathédrales aux bonnes fetes. La ceinture est comme une petite corde, dans laquelle il y a plusieurs noeuds. Le manipule et l’etole sont étroits; la chasuble est fort grande, et toute fermée par le bas, comme le sont les anciennes chasubles. Il est difficile de croire que S. Bernard, qui faisoit profession d’une si grande simplicité et pauvreté, eut des ornemens parez de broderie; et il y a plus d’apparence que ce sont les ornemens ordinaires du monastère dont 1727B le saint se servoit comme les autres, lorsqu’il y venoit, et qu on les a conservés en mémoire de lui, parce qu’ils lui avoient servi quelquefois.»

— «Habent in sacrario suo Pratilongi sanctimoniales, dit le P. Chifflet, B. Bernardi lipsana complura, inter quae est alba et casula quibus indutus sacris operabatur: et calix ex argento deaurato, paterae instar latus ac parum profundus, illique alteri persimilis, quem etiamnum Clarevallenses ut S. Bernardi ipsissimum calicem religiose asservant.» (S. Bern. gen. illustr. assert., Divione, 1660, p. 401.)

— Courtépee écrivait en 1777, dans sa Descrip. hist. du Duché de Bourgogne: «Le trésor renferme les ornemens sacerdotaux de S. Bernard qui étoient à Praslon, abbaye de Bénédictines, supprimée en 1748.» Voy. Littér., 1717, IIe part., p. 150. — Chartreuse du Mont-Dieu. «On nous montra dans la sacristie une ancienne 1727C aube qu’on prétend avoir servi à S. Bernard lorsqu’il venait au Mont-Dieu.»

Ibid., p. 195. — Abbaye d’Afflighen en Brabant. — «Il y a dans le côté de l’église une figure de la Vierge, où la tradition porte que S. Bernard étant en oraison, la Ste Vierge lui parla, et en mémoire de ce fait, on garde un perpétuel silence dans le cloître. On montre dans le trésor la crosse de ce saint, que l’on a fort mal à propos dorée et enfermée dans de l’argent.»

Ibid., Paris, 1724, p. 46. — Cathédrale de Laon. — «Nous vîmes dans la nef la chaire dans laquelle S. Bernard a autrefois prêché.»

Ibid., p. 108. — Abbaye de Cambron. — «La chasuble de S. Bernard qu’on montre.. n’est ni de drap d’or, ni d’argent, ni de soye, mais de simple coton. Elle sert le jour de sa fête et à toutes les premières messes des religieux.» (Les Bénédictins (ibid., p. 40 et 199) ne reconnaissent pas 1727D l’authenticité de la coule de S. Bernard à Vauclair, ni celle de sa chasuble, dans le trésor d’Aix-la-Chapelle.)

Voir dans l’Iter Cisterc. de D. J. Méglinger, p. 145, 49 ce qu’il dit d’un vêtement de dessous ayant appartenu à S. Bernard, et qui était conservé dans l’abbaye de Longuay.

MS. XV de M. l’abbé Matthieu, p. 6. — Le jeudy 15 nov. 1753, un religieux de l’O. de Prémontré, profès de l’abbaye de Jandeurre, aujourd’hui en commande, prieur curé de la paroisse de Coutrisson au diocèse de Toul, à 2 lieues de la ville de Bar-le-Duc, nous a dit dans Clairvaux que leur maison en la ville de Prague, en Hongrie, conserve la lettre originale que S. Bernard écrivoit à S. Norbert, sur la croyance du saint archevêque que l’Antechrist venoit, et que la fin du monde approchoit.

Ibid., p. 213. — Le 14 Mars 1428 (more Gallicano computando), Dom Thibaud de Bergières, religieux de Clairvaux, dépose au nom de l’abbé dudit 1728A monastère entre les mains de R. P. Dom Gilles, abbé de Fécamp (Fiscampnensis): Unum gobeletum argenteum coopertum, ponderis V onciarum et unius sterling, et quemdam scyphum argenteum, ad pedem cuius in fundo est ymago S. Bernardi cum duobus personariis. Qui quidem scyphus est ponderis septem onciarum et XIV sterling . . . Actum Rothomagi.

Hist. génér. des auteurs sacrés et ecclés., par D. R. Ceillier, t. XXIII, Par., 1763, p. 100 — Art. de Ste Hildegarde. — «XIV . . . Ste Hildegarde écrivit une lettre adressée aux moines gris, nom que l’on donnoit quelquefois aux Cisterciens, parce qu’en voyage ils portoient un manteau gris. On montre encore dans l’abbaye de S.-Victor à Paris, celui de S. Bernard.»

Annales archéologiques, t. III, p. 286. — «A Chàlons-sur-Marne, dans la cathédrale, on conserve une mitre de S. Malachie . . . Cette mitre porte dans son tissu des ornements comme on en voit ici, 1728B (l’auteur parle d’un drap mortuaire gravé sur une tombe, semé de quatre feuilles et de médaillons où sont figurés alternativement des lions passants et des aigles au vol éployé.)»

Dom J. Méglinger, dit qu’à l’abbaye de Longuay, on lui montra « . . . Mitram S. Malachiae archiepiscopi Hiberniae, cui maximum facit pretium celeberrima viri sanctimonia, nam breves rubicundam bombycem ornantes ex auro lamellae haud magni aestimantur.» (Iter Cist. p. 145, 49.)

La Chartrcuse de Valbonne (dioc. de Nimes) possède un fragment assez considérable de la natte sur laquelle mourut S. Bernard, et une sandale de S. Malachie. Ces précieuses reliques lui ont été données par Monseigneur l’évêque actuel de Châlons.

Je transcris les renseignements que Sa Grandeur a bien voulu me fournir sur leur histoire dans la lettre dont Elle m’a honoré le 26 Décembre 1854. Je La prie d’agréer ici l’hommage de ma reconnaissance.

1728C «C’est de Clairvaux que me sont venues , et ç’a été par l’entremise de M. l’abbé Becquey, vicaire général, qui les avoit obtenues du dernier Abbé . . . Celles dont M. Becquey fut dépositaire, et qu’il obtint sur la demande qu’il en fit, consistent en une partie assez considérable de la naite sur laquelle S. Bernard est mort, et en une mitre de S. Malachie, bien authentique et scellée du cachet de l’Abbé de Clairvaux J’avois reçu par la même voie deux sandales (cuir doré) de S. Malachie. Je crus pouvoir en donner une à la Chartreuse de Valbonne; l’autre m’a été soustraite par je ne sais qui, et je l’ai fort regrettée.

«C’est, Monsieur, tout ce que je puis dire sur ces objets précieux, qui seront remis après moi entre les mains de notre Chapitre et qui sont destiné à notre église, quoiqu’en me les donnant, M. Becquey 1728D n’y ait mis aucune condition . . .

« † M. J. Evêque de Châlons.»

J’ai lu avec un vif sentiment de plaisir, dans l’Univers, no du 20 Décembre 1854, la nouvelle suivante:

«Le dimanche 5 Novembre, à Morrou, comté de Warren, a été consacrée une nouvelle église, sous l’invocation de S. Malachie, archevêque d’Armagh, au XIIe siècle.»

«On conserve dans l’église paroissiale de Fontaines-les-Dijon, dans un reliquaire bien et dûment vérifié par l’autorité episcopale, un fragment de la ceinture de S. Bernard — de zona S. Bernardi — qui paraît provenir du monastère des Feuillants.

Le Musée de Dijon possède la coupe de S. Bernard, qui serait bien mieux placée dans le trésor de la cathédrale. En voici la description d’après la remarquable Notice des objets d’arts déposés au Musée de Dijon, rédigée par feu M. de Saint-Mémin, 1729A Dijon, 1842, p. 141, no 718. — Coupe de S. Bernard.

« . . . Il serait difficile de préciser le temps le plus reculé auquel (cette tasse de racine de buis) peut avoir été montée en forme de coupe sur un pied et dans des cercles d’argent doré, telle qu’elle est aujourd’hui . . . Si l’on devait s’en rapporter à ‘l’époque marquée par la forme des caractères gothiques angulaires de l’inscription gravée sons le pied de la coupe, et desquels l’usage ne s’est établi que dans la première moitié du XIV siècle, ce vase n’aurait été garni d’argent doré qu’environ 150 ans après la canonisation de S. Bernard.

L’inscription est ainsi conçue: CIATHUS SANCTI BERNARDI ABBATIS CLAREVALLIS.

On lit dans l’histoire manuscrite de l’abbaye de Citeaux par dom Crestin, que l’on y conservait la coupe de S. Bernard dont il se serait servi pendant 1729B son noviciat . . . . Il paraît néanmoins que cette relique avait été transférée au trésor de l’église Saint-Etienne de Dijon, d’après les documents suivants . . . On. lit au Registre de S. Etienne, fo 75, vo, que le 21 Février 1659, le sieur Pidard, orfévre, demande 11 livres pour avoir racommodé la tasse de S. Bernard.

On voit encore au même registre, fo 125, que le 23 Novembre 1663, deux gentilshommes demandent la tasse de saint Bernard pour porter à la campagne, en donnant bonne et suffisante caution.

Je crois devoir rappeler ici simplement, sans me prononcer sur son authenticité, que l’on montre dans la bibliothèque publique de Troyes une chaise en bois sculpté, avec cette inscription: «Fauteuil réputé de la B. Aleth, mère de S. Bernard, acheté en 1793 à la vente faite à Clairvaux par le vandalisme révolutionnaire, et offert en 1849 par F. E. Jourdain, à la ville de Troyes sa patrie.»

1729C Bible de saint Bernard.

On conserve parmi les manuscrits de la Bibliothèque publique de Troyes une bible latine, in-fo de 30 centimètres de hauteur sur 24 centimètres environ de largeur, divisée en deux volumes, dont le premier comprend 261 feuillets et le second 234. L’écriture est une minuscule très-régulière, de la première moitié du XIIe siècle, sur deux colonnes, avec initiales peintes, souvent dorées et historiées, et titres à l’encre rouge et bleue.

Sur le recto de la garde, au commencement du premier volume, une main du XIIesup; siècle a inscrit en caractères gothiques assez gros ces mots: PARS PRIMA BIBLE BEATI BERNARDI ABBATIS CLAREVALLIS. et au dessous se trouve répétée cette inscription en minuscule tirant un peu sur la cursive, à peu près du même temps. Ces deux volumes ne sont 1729D plus dans leur couverture primitive.

Le dernier des inventaires de la maison de Clairvaux que fit dresser Pierre de Virey, lorsqu’en 1471 il prit, en qualité d’abbé, possession de Clairvaux, termine le numéro qui concerne cette bible, par ces mots: «C’est la Bible de Mgr saint Bernard.»

Les feuillets qui contiennent le Cantique des cantiques, sont particulièrement usés.

Ces curieux détails sont extraits d’une notice insérée dans les Mémoires de la Société Académique de l’Aube (Troyes, 1842, p. 246), par M. Harmand, bibliothécaire de la ville de Troyes. Je saisis l’occasion de témoigner ici à M. Harmand, ma reconnaisance pour la complaisance constante avec laquelle il a bien voulu favoriser mes recherches.

L’antiphonier de saint Bernard.

MS. XV de M. l’abbé Matthieu, p. 258. — 1500, 11 mars. — Je, frère Servais de Sellerie, religieux profès de l’abbaye du Jardinet, de l’ordre de Cisteaulx, 1730A ou diocèse de Liége, cognois et confesse avoir eu et receu de Monsieur l’ancien abbé de Clerevaulx la somme de 13 escus d’or au soleil, sur et tant moins de la somme de 52 semblables escus au soleil que je doy avoir pour l’escripture des quatre derniers antiphoniers, oultre les autres huic volumes que j’ay déjà faict, escript et noté audit Clerevaulx; et aussy pour escrire lesdits quattre restans volumes ay receu huit vingt six cayers de bon parchemin de Bruges, et le bel antiphonier entier de tout l’an, bien escript et notté, que on dit à Clerevaulx estre l’antiphonier sainct Bernard, à moy pour exemplaire presté, commençant ou second feuillet après 4 feuillets estans au commencement: De modo, ordine et correctione antiphonarii, et la lettre du IIII R Veniet in te, et finissant ou pénultième: Ecce spon. ve.; et est signé en l’inventaire de Clerevaulx Y, 17.

Lesquels quattre volumes d’antiphoniers je dessus dit frère Servais promets bien loyaulment escripre, 1730B noter et parfaire de ma main en la manière desdits autres huict volumes, pour le prix et somme desdits 52 ecus d’or au soleil, qui est pour chacun volume 13 escus d’or au soleil, et le plus tost que je pourray les rendre faits et parfaits, jusqu’à l’enluminature et relieure, lesquels ledit ancien Abbé sera tenu de payer et contenter. Et de ladite somme de XIII escus d’or au soleil, en déduction et tant moins des dessus dits LII semblables escus, me tiens pour bien content et en quit e ledit ancien Abbé et la dicte église de Clerevaulx, et des VIII XX VI cayers de parchemin pour faire lesdits quatre antiphoniers; et aussi, en lui délivrant ou à autre dudit monastère de Clerevaulx ayant puissance de recevoir et de ce faire, rendre et restituer ledit bel Antiphonier sainct Bernard, appartenant à ladicte église et monastère de Clerevaulx: ou si, avant la perfection desdits quatre volumes j’estois prévenu de mort, promets faire rendre 1730C audit Clerevaulx ledit Antiphonier. Tesmoing mon seing manuel cy mis et apposé le XIe jour de Mars l’an mil cinq cens, en la présence de Dom Nicole de Paris, bachelier en théologie, Prieur dudit monastère, de Dom Jehan de Vepria, ancien Prieur dudit lieu, Dom Jacques de Sézanne, secrétaire, et Dom Estienne de Beaupré, religieux dudit Clerevaulx. Fr. Servais, religieux du Jardinet. — A la suite est écrit: «L’Antiphonier de S. Bernard ne se voit pas à Clairvaux (1744); apparemment qu’on aura négligé de le retirer du Jardinet.» (M. l’ancien Abbé de Clairvaux, dont il est parlé dans cette pièce, est Dom Pierre de Virey, qui se démit de ses fonctions en 1496 et mourut en 1506.)

Note sur un manuscrit de la Bibliothèque publique de Dijon, désigné vulgairement sous le nom de bréviaire de S. Bernard.

Parmi los manuscrits de la bibliothèque publique de Dijon, il en est un que sa petitesse et sa 1730D forme singulière rendent fort remarquable, et qui, cependant, serait probablement très-peu remarqué des étrangers et des visiteurs, si l’opinion vulgaire qui en fait le bréviaire de S. Bernard ne lui avait donné une sorte de célébrité.

Les recherches que j’ai entreprises sur tout ce qui nous reste, soit du corps de S. Bernard, soit des objets qui ont appartenu à ce grand saint, m’ont amené, il y a quelque temps déjà, à examiner ce prétendu bréviaire.

Je ne crois pas que le manuscrit dont je m’occupe ait été regardé de bien près par des personnes quelque peu versées dans la connaissance des anciennes écritures: il leur eût paru si évident, à première vue, qu’il était postérieur de plusieurs siècles à saint Bernard, que depuis longtemps on se serait abstenu de le qualifier d’une manière inexacte.

Mais si on avait eu la patience de l’étudier en 1731A détail, on se serait aperçu bientôt que c’était un livre liturgique à l’usage de l’Ordre de Cîteaux: puis au 13e feuillet, après le V du IIe nocturne des matines du Samedi-Saint — Caro mea requiescet in spe, etc., on aurait lu ce qui suit, écrit à l’encre rouge, de la même main que ce qui précède, et on aurait possédé tous les éclaircissements désirables sur la nature et l’origine de ce curieux petit volume: «Explicit libellus breviarii de tempore de nocturna laude Creatoris mei Jhesu XPti, quem sic ideo scripsi, ne furetur mihi more alterius breviarii: nec ille, oro, egre ferat quia in tantam brevitatem compilavi, quia carui exemplari prolixiore; et benedictus sit ille in aeternum qui iniciandi dedit presumpcionem, et terminandi contulit facultatem anno Domini millesimo quadringentesimo nonagesimo octavo.»

Cette date est écrite à l’encre noire, ainsi que le titre que je vais copier, et qui reprend à la ligne: «Absolucio a pena et a culpa in articulo mortis 1731B concessa a providencia divina Domini Sixti, Pape IVi, fratribus Ordinis Cysterciensis tempore Reverendissimi Patris Abbatis Hymberti Cystercii,» etc.

La formule de l’absolution occupe quinze lignes. On a effacé trois lignes écrites à l’encre rouge pour tracer en noir le millésime et l’absolutio a pena, etc.; dont l’écriture présente quelques différences avec les caractères qui précèdent.

Il suit de la note que je viens de transcrire:

1o Qu’on a ici un cahier (libellus) du bréviaire Cistercien, contenant pour le propre du temps (breviarii de tempore), l’office de la nuit (de nocturna laude);

2o Que le religieux, auquel il appartenait, l’avait écrit sous un très-petit format (ideo scripsi), afin qu’étant tout à fait portatif, il devînt plus difficile de le voler; voulant ainsi lui faire éviter le sort d’un autre bréviaire, que sa grosseur l’obligeait 1731C probablement de laisser au choeur, où on le lui aurait dérobé

3o Que ce même religieux prie N. S. J.-C. de lui pardonner son oeuvre si écourtée, parce qu’il manquait d’un exemplaire plus étendu. Evidemment il fait ici allusion à la brièveté de son livre, qui ne contient que l’office de la nuit, et encore seulement pendant le propre du temps; il ne peut entendre ces mots: in tantam brevitatem compilavi, — des nombreuses abbréviations qui hérissent son texte, car il lui était facile de rétablir les mots abrégés dans l’exemplaire qu’il avait sous les yeux;

4o Enfin, que la copie de ce cahier a été terminée l’an de N. S. mil quatre cent quatre-vingt-dix-huit.

Voulant probablement plus tard remplir l’espace demeuré libre sur le treizième feuillet, après la note à l’encre rouge, par la transcription de l’absolution in articulo mortis, accordée aux Cisterciens par le pape Sixte IV du temps d’Hymbert, 1731D Révérendissime abbé de Cîteaux, notre religieux, afin de gagner la place nécessaire, aura effacé les trois dernières lignes de la note; puis il aura récrit à l’encre noire le millésime, en ajoutant l’absolutio a pena, par laquelle se termine l’office de la nuit, depuis l’Avent jus qu’à Pâques inclusivement.

Je passe maintenant à la desription du manuscrit.

Il se compose de 36 feuillets de parchemin de 135 millimètres environ de largeur, sur 155 environ de hauteur (pl. B, fig. 1), terminés aux points I et K par une languette haute de 30 millimètres (pl. A, fig. 1 et 2). Ces languettes, placées l’une contre l’autre, sont maintenues par une sorte de pince en fer à deux branches, se terminant en M (pl. A, fig. 2), en anneau de forme allongée. Les 1732A deux branches s’évasent à partir de M, jusqu’en I et K (pl. A, fig. 1), où elles atteignent une largeur de 45 millimètres. Trois clous en fer, rivés de chaque côte, maintiennent solidement les branches de la pince et les languettes (pl. A, fig. 1).

En supposant le manuscrit suspendu par l’anneau qui termine la pince et les feuillets pliés, la fig. 1 (pl. A) le représente vu de côte, et la fig. 2 (même pl.) le fait voir par le milieu.

Mais si on veut le lire, on doit le retourner d’abord, de manière à tenir la pince entre les doigts (pl. A, fig. 3), puis on déplie et on replie successiment chaque feuille. Il est impossible de saisir le mécanisme de cette opération sans avoir la pl. B sous les yeux.

1o Fig. 1. Le feuillet est déplié entièrement; il est couvert d’écriture sur toute sa surface; les lettres E, F, G, H. I, K, indiquent les lignes des plis.

1732B

1732C 2o Fig. 2. Le feuillet est plié sur lui-même aux points d’intersection G, H. Le point A est ramené sur C, le point B sur le point D, E sur I, et F sur K. On lit alors sur la moitié du Vo du feuillet; ce Vo est encore couvert d’écriture sur toute sa surface

1732D 1733

1735A 3o Fig. 3. En laissant le point B sur le point D, F sur K, et E sur I, on ramène A C sur K, et on recouvre ainsi une portion de l’écriture par le tiers du Vo du feuillet. Ce tiers reste toujours en blanc, afin de servir comme de couverture au feuillet plié (pl. A, fig. 1).

4o Fig. 4. Si on laisse A sur C, E sur I, et si on ramène D B sur I, on lit sur le tiers du Vo du feuillet; ce tiers est couvert d’écriture sur toute sa surface.

Les 36 feuillets se lisent ainsi que je vais l’indiquer:

1o Pl. B, fig. 4, a. — Fig. 2, b. — Fig. 1, g.

Feuillets 1 à 13 inclusivement, 23 à 36 inclusivement.

2o Pl. B, fig 1, g. — Fig. 2, b. — Fig. 4, a,

Feuillets 14 à 22 inclusivement.

Les feuillets 7, 10, 11 et 34 sont tous les quatre pliés de la même façon.

1735B Il faudrait compter 37 feuillets, au lieu de 36, parce que le premier a été arraché: ainsi, celui que je compte le premier n’est réellement que le deuxième. Ce feuillet devait commencer par les matines du 1er dimanche de l’Avent. Le feuillet suivant, aujourd’hui le premier, fort sale à l’extérieur, et dont l’écriture est d’abord presque entièrement effacée, commence par la XIIe leçon ou par l’évangile des matines du 2e dimanche de l’Avent.

On lit sur le Vo ces mots d’une écriture moderne et mal conservée: BREVIERE DE S. BERNARD.

Les treize premiers feuillets contiennent l’office de la nuit pour le propre du temps, depuis l’Avent jusqu’à Pâques.

Le 14e feuillet s’ouvre par l’indication des psaumes du 1er nocturne des matines de Pâques, et le 36e se termine par la collecte du 25e dimanche après la Pentecôte.

L’écriture présente dans le cours du manuscrit 1735C quelques variations et quelques différences; mais je ne les juge pas assez importantes pour en tenir compte.

Les rubriques sont-écrites à l’encre rouge. Jusqu’au 13e feuillet inclusivement, les majuscules initiales, tracées à l’encre noire, sont ornées d’un point rouge: quelques-unes, mais en très-petit nombre, sont faites au minium. Du feuillet 14 au feuillet 22, les majuscules initiales, presque sans exception, sont écrites à l’encre rouge: après le feuillet 22, elles deviennent beaucoup plus rares, et elles sont remplacées par des majuscules initiales à l’encre noire, sur lesquelles les points rouges reparaissent.

J’ajoute, pour terminer tout ce qui a rapport à la description de ce manuscrit, qu’au feuillet 21 on trouve l’office de la nuit pour la fête du S. Sacrement: IN FESTO CORPORIS DOMINI NOSTRI JHESU XPTI. — Cette seule indication suffisait, si on l’eût examinée 1735D avec soin, pour faire rejeter toute idée de reculer son âge jusqu’au XIIe siècle.

J’ai dit, en commençant cette note, que si ce petit monument devait perdre la consideration qu’il obtient sous le titre usurpé de bréviaire de S. Bernard, il n’en demeurerait pas moins une curiosité paléographique.

En efiet, ce manuscrit nous représente fidèlement ces bréviaires portatifs qui accompagnaient les cleres réguliers et séculiers dans leurs pérégrinations lointaines, et dont Mabillon parle dans son 1736A traité de la Liturgie Gallicane. Ce docte religieux en avait vu deux dans le trésor de Cîteaux, et il en transcrit la fidèle description donnée par le Père Joseph Meglinger, dans son ITER CISTERCIENSE. On ne peut manquer de la fire avec intérêt, à cause du rapport intime qu’elle a avec ce qui précède.

«Libelli trium digitorum latitudinem non excedunt, plus tamen longitudinis habent. Dum clausos aspicis, parvi apparent: at aperti triplo majores evadunt, foliis, quae ex membrana rudi constant, ter complicatis, deorsum, et ambobus lateribus. Neque in utraque parte litteris implentur paginae, sed interius tantum: ita ut licet folium a folio sejungas, nisi plicae explicentur, nullae litterae prostent; quae quidem minutissimae paucis syllabis totas periodos brevissimo compendio absolvunt. Nulla compage seu tegumento vinciuntur: sed uno in latere filum colligat folia, ne diffluant: 1736B ac deinde sacculus ex corio libellos recipit, egressuris forte de monasterio Patribus tunc serviens: quo etiam hodie a pulveribus custodiuntur .»

D. Martene et D. Durand en parlent avec moins de détail dans leur Voyage littéraire (tom. I. Paris, 1717, p. 222). Ils se trouvaient à Cîteaux en 1710. «Nous vîmes aussi, disent-ils, dans le trésor, les anciens bréviaires des religieux de Cîteaux, écrits d’un caractère fort menu dans des petits cahiers amovibles, que l’on tirait aisément pour donner aux voyageurs.»

Je serais bien tenté de croire que le P. Meglinger, dans son voyage à Cîteaux, en 1667, y a vu le prétendu bréviaire de S. Bernard, que j’ai décrit plus longuement que lui, mais certainement avec moins de netteté et de bonheur d’expression.

Cependant, à moins que la pince en fer n’ait été ajoutée plus tard, afin de relier les feuillets, en 1736C maintenant solidement les languettes de parchemin, il est bien évident que Mabillon et le P. Meglinger ont vu deux manuscrits différents du nôtre, puisque les deux manuscrits qu’ils ont examinés avaient leurs feuillets attachés par un simple fil. D. Martène et D. Durand semblent aussi indiquer par cette expression cashiers amovibles que le prétendu bréviaire de S. Bernard n’aurait pas passé sous leurs yeux.

Il est vrai que ces petits monuments, remarqués par quatre savants hommes, ont pu acquérir dès lors une assez grande valeur aux yeux des moines de Cîteaux, pour qu’ils aient substitué au simple fil qui reliait assez mal les feuilles de parchemin, l’armature en fer qui en assurait désormais la conservation parfaite.

Ce ne sont ici que de pures conjectures; et il importe peu au fond que le P. Meglinger, que Mabillon ou que ses doctes confrères aient vu le manuscrit 1736D dont je m’occupe. Je tiens seulement à constater, en terminant: 1o Que sa forme n’était pas inusitée à Cîteaux, et que notre religieux de 1498, songeant à se faire un bréviaire portatif et à l’abri des voleurs, trouva facilement à Cîteaux, le modèle plus propre à remplir ses intentions;

2o Que l’un des petits bréviaires portatifs conservés dans le trésor de Cîteaux, vus d’abord en 1667 par le P. Meglinger, en 1682 par Mabillon, et en 1710 par D. Martène et D. Durand, n’était pas regardé alors comme ayant été le bréviaire de saint 1737A Bernard; le P. Meglinger, Mabillon, D. Martène et D. Durand n’eussent pas manqué de rapporter au moins cette tradition.

En 1667, en 1682 et en 1710, Cîteaux ne possédait donc pas le bréviaire de S. Bernard.

Mais comment un manuscrit de la bibliothèque de Dijon, venu très-certainement de celle de Cîteaux, porte-t-il aujourd’hui cette qualification? C’est ce que je ne puis expliquer.

Passa-t-il, avec cette désignation, de Cîteaux à Dijon.

Je crois pouvoir avec certitude répondre négativement.

Si, en 1667, en 1682 et en 1710 on ne croyait pas posséder à Cîteaux le bréviaire de S. Bernard, je ne vois pas qu’on ait pu s’y figurer le contraire plus tard. Aussi, le catalogue des manuscrits de l’abbaye, rédigé très-probablement au moment de sa suppression, et conservé à la bibliothèque de Dijon, ne fait aucune mention de ce prétendu bréviaire.

1737B Quelle main très-moderne a tracé ces mots sur le Vo du premier feuillet: Breviere de S. Bernard? — Sur quelles données s’appuyait-on pour décorer d’une telle inscription un manuscrit du XVe siècle? — L’a-t-on fait par ignorance ou par mauvaise foi? — Ce sont là toutes choses que j’ignore, et qu’il me parait peu utile de chercher à connaître? Il me suffit d’avoir démontré, par des faits péremptoires, que cette qualification ne soutient pas un instant l’examen.

Je ne peux terminer cette note sans citer un passage curieux extrait d’une Histoire générale manuscrite de l’Ordre de Cîteaux, composée au commencement du XVIIIe siècle, et dont son Eminence Mgr le Cardinal de Reims a bien voulu me counmmiquer les fragments. On y lit, p. 49, que, quand S. Robert quitta Cîteaux pour retourner a Molêmes, il laissa, «à ses chers enfants de Cîteaux, pour gage 1737C de son amour paternel, tous ses meubles, qui consistoient en un petit diurnal d’une structure fort singulière, et une tasse dont il se servoit au réfectoire, quoiqu’elle ne fût que de bois. L’un et l’autre se garde encore fort précieusement dans le trésor de Cîteaux.» Puis, dans une note, on lit: «Cette tasse est ronde, et contient environ demi-setier; elle n’a point d’anses, mais un petit pied rond qui la soutient par dessous, dans lequel sont gravez en bosse ces mots en lettres gothiques: F. ROBERTUS. Le bois est fort poli, de 1738A couleur brune, et m’a paru être de châtaignier; pour ce qui est du diurnal, à moins que de le voir, il est impossible de faire comprendre ce que c’est-il est écrit à la main, d’un caractère si menu qu’il échappe quasi à la vue: sa grandeur n’est pas différente des nôtres, et il y a une attache pour le pendre à la ceinture.»

Voici encore, dans le trésor de Cîteaux, un diurnal qui ressemble signulièrement au prétendu bréviaire de saint Bernard, si même ce n’est pas lui, car les derniers mots du passage que je viens de transcrire permetteut peu d’en douter. Dom Joseph Meglinger, avant de décrire les curieux petits manuscrits, avait cru qu’ils venaient de saint Etienne et de saint Albéric. Voici ses propres paroles: «Unum superest, curioso spectatore dignum: quod quia non negligenter observavi, breviter exponam. Duos libellos nobis offerebant, in quibus precum statutarum canones propria manu exararunt Divi Patres Stephanus et Albericus, primi . . . . . Cistercii 1738B Abbates. Venerabar pulcherrima pignora simplicissimae antiquitatis, et clare elucentes sanctimoniae characteres exosculabar. Libelli trium digitorum, etc.» (Iter Cist., p. 239, 84.)

Je répéterai ici ce que j’ai dit plus haut. Si le P. Mabillon, si les PP. Martène et Durand eussent pensé que ces petits manuscrits liturgiques avaient appartenu, soit à S. Bernard, soit à S. Robert, à S. Etienne ou à S. Albéric, ils n’auraient certainement pas manqué d’en faire part au public. Mabillon vénérait trop ces anciens Pères de l’Ordre de Cîteaux, pour ne pas exprimer hautement la joie qu’il aurait éprouvée à toucher de si précieuses reliques; mais d’un autre côté, il était trop docte diplomatiste pour ne pas s’apercevoir immédiatement de leur peu d’antiquité. Aussi voit-on qu’il ne prend au P. Meglinger que sa description, et qu’il se garde bien de reproduire ce que ce religieux rapporte de l’origine des petits manuscrits. Comme il était l’ami 1738C du P. Meglinger il ne voulut pas réfuter directement ses assertions, peut-être aussi pensait-il que les convenances ne lui permettaient pas d’attaquer publiquement des traditions reçues à l’abbaye de Cîteaux. Il garda donc le silence: faisant assez connaître son opinion par ces paroles que j’ai rapportées un peu plus haut: «Id generis duos pro itinerantibus codices in sacrario Cisterciensi aliquando vidimus, quos hoc modo describit J. Meglingerus,» etc.

III. Lieux sanctifiés par la présence de saint Bernard. Cellules de saint Bernard à Clairvaux.1737

1737D On conservait à Clairvaux deux cellules de S. Bernard. La première était celle que Guillaume de Champeaux avait fait construire au saint abbé, en 1117 (Acta S. Bern., § LIX, chronol. Bern.), hors des lieux réguliers et de l’enclos du premier monastère (extra claustra et terminos monasterii, S. Bern. Op. Guillelm., VII, 32)?.

«Visitur, dit Dom J. Meglinger, casa lignea, instar tugurii cujusdam, qualia in campis pro armentis 1738D excitare solent . . . . . pio stupore correpti sumus, quod haec lignorum strues in tot saecula duraret, annis nimirum quingentis quinquaginta . . . . . In quadrum concinnata, per octodecim pedes undique extenditur, nulla contignatione superiorem a fundo partem dividente: tecto solo miseros parietes onerante: qui quidem nullo vitro illustres satis nempe ab inhabitante sanctimoniae luce resplendebant: fenestrarum loco asseres ad excisa foramina haerent, 1739A ut levi ductu prohiberi illis aura vel immitti possit. Idem lectisternii, adhuc ibidem pendentis, squalor fuerat, et anguli in quo jacebat.» (Iter Cist., p. 181, 61.)

Les Bénédictins visitèrent la pauvre cellule: «Derrière le rond-point de l’église, disent-ils, est le cimetière des abbés étrangers qui sont morts à Clairvaux, dans lequel on voit, contre l’église, les sépultures des frères de S. Bernard. C’est dans ce cimetière qu’on voit la cellule du Saint, que Guillaume de Champeaux, évêque de Châlons, lui fit bâtir pour le soulager dans ses infirmités. Il n’y a point de cheminée; car S. Bernard était si mortifié, et dégagé des sens, qu’il ne voulait pas qu’on lui fît du feu; mais, sous son lit, il y avait une grande pierre percée en plusieurs éndroits, sous laquelle on allumait un brasier pour échauffer sa chambre sans qu il s’en aperçût. On ne peut rien voir de plus simple que cette chambre, et que le lit de S. Bernard qu’on y conserve encore; et si un abbé 1739B malade était si mal logé, on peut juger quels étaient les appartements des sains et des simples religieux. Cette chambre touche à une petite chapelle, qui apparemment fut bâtie pour lui dire la messe. On tient qu’il y mourut, et on lit une inscription qui le dit assez clairement.» (Voyage littéraire, tom. I, p. 99. — Cf. pour ce qui concerne la chapelle, l’Iter Cist., ibid.)

La chapelle dont parlent les Bénédictins, fut bâtie plus tard par Geofroy, évêque de Langres et parent de S. Bernard, qui vint mourir à Clairvaux, et habita, pendant trois ans et neuf mois, la petite chambre du saint. Elle fut construite au lieu même où S. Bernard avait cessé de vivre. «Fecit fabricari ad opus suum in loco, unde S. Bernardus migraverat, capellulam satis humilem,» dit le Livre des Sépultures de Clairvaux (Henriquez, Fasciculus SS. O. C. Epitaph. B. Godofridi Lingon. episcopi, p. 474). C’est ce qui fit croire par la suite que S. 1739C Bernard avait trépassé dans la chapelle.

Manrique a décrit la cellule de S. Bernard. (Ann. Cist., ann. 1153, IX.) En 1738, dom Briger écrivait au P. Pien: «Praeterea domus, seu cella potius, tota poene lignea, et grabatus, in quo spiritum emisit, hodiedum supersunt in Claravalle.» (Acta S. Bern. Gloria posthuma, no 8.) La Relation imprimée dans les Ann. Archéol. parle aussi de la chambre de S. Bernard située vers le cimetière. Dans le plan de dom Milley, elle est figurée au no 62, derrière le choeur, à droite, à cinq toises environ du chevet de l’église, sous le titre de Cubiculum, capella et hortus S. Bernard.

L’autre cellule de S. Bernard se conservait dans le monasterium vetus, premier séjour des moines après la translation de l’abbaye en 1135.

Voici comment dom J. Meglinger la décrit: «Scalae, quae a refectorio ad dormitorium viam facit, imposita est cella, quam mellifluus Pater Bernardus 1739D incoluit. Parva sane est, et carceri quam conclavi similior, et tali, quam tantus Abbas habitaret. Nam uno solummodo pede latior est cellis, quas in dormitorio monasterii novi, supra no 57 descripseram (altiores non sunt octo pedibus, totidemque pedes latitudinem ac longitudinem absolvunt): sed incommodis multo pluribus obnoxia: cum nudo tantum tecto tegatur, per quod etsi non semper pluviae penetrent, frigus tamen aestusque et mille aliae sese intrudunt molestiae. Per idem tectum submotis aliquot assulis lumen solis immittitur, assere, si necessitas imbrium aut nivis jusserit, obstruente foramen. Porro scala, cui cella imminet, unum cellae angulum eripit asseribus, quibus contecta est; qui per illam partem declivi tabulatione descendentes commodum 1740A tamen D. Bernardo afferebant: illis nempe pro lecto usus: loco pulvinaris duos alios truncos securi laevigatos supponens. Quae omnia hodiedum videri, contrectari tamen minime permittuntur: multorum importuna pietate per minutas quidem, sed saepe repetitas partes pene totum auferente. Nunc cancellis inclusus hic (si tamen dici potest) lectus oculis non furtis patet: intra quos praeterea jacet cingulum setis et ferro asperum, quod vexando corpori induere sanctissimus Pater solebat, ac super nuda ejus cute post obitum inventum est. Sedile denique nihilo caeteris cellae partibus melius erat: praeterquam enim quod uno tantum a terra pede elevatum, id excavatus per modum sellae praebuerit murus: etiam sedentis caput erigi non patiebatur incumbentis tecti declivitas: ac proinde sedere aut assurgere volenti caput dorsumque inflectendum, donec uno passu amotus spatium acciperet erecto capite standi.» (Iter Cist., p. 201, 67.)

C’est de cette pauvre cellule que saint Bernard 1740B entendit une nuit les anges chanter dans la chapelle du monasterium vetus. Se levant avec précaution, de peur de réveiller ses moines endormis dans le dortoir tout voisin de sa cellule, saint Bernard se rendit à la chapelle où il apprit des bouches angéliques le Salve Regina.

Peu de temps après, prêchant à ses religieux dans le chapitre pour la dédicace de leur église, il leur rappela la merveille qui y avait eu lieu récemment. «Quaedam praeterea verba retulit, quae in ecclesia de recenti acciderant: «Nunc, inquiens, sancti angeli solemnizationi vestrae interfuerunt, et vos divinitus in suae cura custodiae susceperunt.» Adjungens etiam quaedam verba, quibus dabatur intelligi, quod antequam lapidem lapidi in constructione superaedificasset, idem locus designatus fuisset.» (Saint Bern. Op. Joh. Eremita, II, 7.)

Dès le temps où saint Bernard habitait la petite cellule que Guillaume de Champeaux lui avait fait 1740C construire en 1117, les anges lui avaient marqué en quelque sorte la place de l’église du monasterium vetus.

«Une nuit, dit Guillaume, ayant répandu son âme devant le Seigneur, avec plus d’ardeur que de coutume, il s’assoupit légèrement, et entendit le bruit des voix d’une multitude qui semblait passer. S’étant éveillé, et les voix lui parvenant plus distinctes, il sortit de sa cellule, et suivit leur direction. Non loin était un lieu encore tout couvert de ronces et d’épines, et qui maintenant est bien changé. (Haud procul aderat locus densis adhuc spinarum vepriumque frutetis abundans, sed nunc longe mutatus ab illo. — Guillelmus, VII, 34.) Il aperçut en cet endroit les anges formant deux choeurs, et leurs chants mélodieux le remplirent de joie. Il ne connut pas d’abord le mystère de cette vision; il le comprit plus tard, quand il vit, après la translation de l’abbaye, l’église bâtie au lieu 1740D même où il avait entendu les concerts célestes. (Cujus tamen mysterium visionis non prius agnovit, quam, translatis post aliquot annos aedificiis monasterii, eodem loco positum oratorium cerneret, ubi voces illas audisset.» Guillelmus, VII. 34.)

Il ne fallut rien moins, du reste, que ces révélations célestes pour déterminer le saint Abbé à quitter le lieu sauvage où il avait fixé son premier séjour (S. Bern. op., Guillelmus, 62).

Saint Bernard prêchant son sixième sermon pour l’anniversaire de la dédicace de l’église du monasterium vetus, se plaisait à rappeler à ses moines que ce lieu était fréquenté par les anges, quem angeli sancti frequentant (S. Bern. Op., t. I, col. 1088).

1741A Le Père Mabillon a remarqué, avec la justesse ordinaire de sa critique, que les sermons de saint Bernard in dedicatione ecclesiae ne pouvaient se rapporter à la dédicace de la grande église de Clairvaux, qui ne fut faite qu’après sa mort (en 1174 le 13 octobre — Cf. Menolog. Cist. IIIo id oct.), mais qu’ils devaient se rapporter à la dédicace de l’ancienne église, veteris basilicae. (S. Bern. Op., t. I, col. 1075, n. b).

Or qu’était-ce que cette vetus basilica, sinon l’église ou plutôt l’oratoire du monasterium vetus; pnisqu’on sait d’une manière certaine que saint Bernard ne comprit le mystère des visions angeliqnes qu’après la translation de l’abbaye, lorsqu’il vit l’oratoire bâti au lieu même où les anges avaient formé leurs concerts. (Guillelm. loc. cit.)

On sera touché en lisant la description que le P. Mélinger nous en a laissée.

«Inde ad oratorium descendimus; quod tale est, 1742B ut ipsa paupertas breviori compendio non concinnaret. Frontem altare occupat, eodem omnino hac tempestate cultu spectabile, nec alio quam quo divus Bernardus instruxit: nimirum in lignea tabula vili colore imago Christi in cruce pendentis rudi artificio exprimitur; a cujus latere Virgineae Matris et divi Joannis dimidia corpora pinguntur eodem exiguae artis penicillo elaborata. Extra chorum, seu mediam templi partem in latere dextro est altare S. Laurentii, in sinistro S. Benedicti pariter simplici manu expressis effigiebus nota.» (Iter Cist., p. 205, 69.)

Ces peintures sur bois, si dignes de l’âge d’or de Clairvaux, venaient sans doute de la première abbaye, dont elles avaient orné la pauvre chapelle. C’est probablement devant elles que saint Bernard, aux portes du tombeau en 1125 (Acta S. Bern. § LIX. — Chronol. Bernardina an. 1125), avait envoyé un de ses religieux prier pour lui. «Itum est, 1741C et oratum ad altaria, quae in eadem basilica erant tria: primum in honore B. Dei Genitricis, duo circumposita in honore B. Laurentii martyris, et B. Benedicti abbatis. (S. Bern. Op., Guillelm. XII, 58.)

Le monasterium vetus fut visité en 1517, par la reine de Sicile (Ann. Archéol.). En 1605, la V. M. Anne de Jésus «visita les dévotes ruines de l’ancien Clairvaux (monasterium vetus), et la celle de Clairvaux avec le chaslit où S. Bernard soulait dormir (Vie de la V. M. Anne de Jésus, Paris 1636).» Les religieux en raclèrent de petits fragments pour servir de reliques à leurs hôtes, — Je remarque que le Chàlit de S. Bernard existait à Clairvaux, de 1605 à 1673, puisque l’abbé Pierre (Henri) en tira le 7 janvier de cette année un morceau, avec toute la révérence possible (Reg. Secret. D. Petri, XLVI, Clarev.).

Cependant, d’après le ms., no 15 de M. Matthieu, contenant les notes de dom Guyton (p. 343), il aurait été détruit, en 1590, par la garnison que le conseil de l’union, établi à Troyes, avait envoyée à 1741D Clairvaux. Probablement la destruction ne fut pas complète; et diverses raisons me portent à croire que le récit des dégâts commis dans l’abbaye par les soldats de la ligue fut un peu exagéré.

Avant de m’éloigner du monasterium vetus je veux expliquer une phrase du Père Méglinger qui, après avoir parlé de la visite faite à Clairvaux en 1131 par le Pape Innocent II, ajoute ces mots: Porta qua intravit, ad rei gestae memoriam hodiedum obstructa manet ut ipsemet vidi.» (Iter Cist., p. 159, 56)

Il me semble évident que le P. Méglinger a confondu ici la visite du Pape Innocent II à Clairvaux avec celle que le Pape Eugène III y fit en 1148. Le Pape Innocent II avait vu l’abbaye dans son premier emplacement, dont il ne restait plus rien à l’époque où le P. Méglinger écrivait; tandis qu’il pouvait très-bien se trouver de son temps dans l’enclos de Clairvaux quelque porte murée en mémoire de la venue du Pape Eugène III. Ce qui a dù rendre la 1742A confusion encore plus facile c’est que ces papes vinrent tous deux à Clairvaux après avoir quitté Reims.

Il est fait mention de la chapelle de Saint-Bernard (bâtie non loin de sa cellule par Geofroy) dans un titre du XIVe siècle, dont voici un extrait:

De camera abbatis Villariensis in Claravalle.

1336, in vigilia Nativitatis Virginis gloriosae. — Moyennant la somme de 50 florins florentins, Jean, abbé de Clairvaux et toute la communauté, accordent «venerabilibus coabbatibus . . . . . de Villari, de Grandi-Prato et de Loco S. Bernardi, nunc existentibus et eorum successoribus in perpetuum, unam cameram cum appendiciis suis inter capellam B. Bernardi et cameram de Ungaria situatam, quam ipsi et eorum monachi ad capitulum generale venientes ac redeuntes habebunt, tenebunt et pacifice possidebunt tempore dicti capituli generalis.»

(Arch. de l’Aube. — copie du XVe siècle, sur papier.)

1742B Voy. Littér., Paris, 1724., p. 75. — Abbaye de S. Vaast à Arras. — «Comme nous sortions du monastère, on nous fit remarquer une croix à 40 ou 50 pas au delà, et on nous dit que S. Bernard étans venu à Arras, s’arrêta en cet endroit et ne voulut pas entrer au monastère, parce que l’abbé et les religieux lui avaient refusé un lieu de leur dépendance qu’il demandait pour y bâtir une abbaye de son ordre. On dit que c’est le lieu où est aujourd’hui la Prévòté de S. Michel, qui est assez agréable.»

Dans les fragments de l’histoire de l’Ordre de Cîteaux, que son éminence Mgr le cardinal de Reims a bien voulu’me communiquer, je lis à la page 390, que S. Bernard ayant visité la sainte chandelle d’Arras, et voulant témoigner l’estime qu’il professait pour cette précieuse relique, fit dresser une croix d’une grandeur extraordinaire. Elle subsista dans le même lieu plus de 300 ans. Enfin, comme elle menaçait de 1742C tomber en ruines, les religieux de Saint-Vaast, la relevèrent en 1447, mais ils lui donnèrent moins d’élévation.

En 1439 l’abbesse de Groeningen donna à l’abbé de Clairvaux un fragment de la sainte chandelle, par l’acte suivant:

«Nos soror Margareta abbatissa monasterii de Groeniinghen prope Curtracum, et Margareta Besoentz, et Katherina Cornu sacristiaria, totusque ejusdem loci conventus, confitemur nos unanimi consensu dedidisse et concessisse reverendo Patri nostro immediato domino abbati Clarevallis certam portionem cere de candela B. Marie de Atrebato, de illa porcione quam Illustrissima Domina Comitissa, relicta Illustrissimi Principis Domini Balduini comitis Flandrie et Imperatoris Constantinopoli, que quidem porcio cere sumpta fuerat de propria eadem candela B. M. de Atrebato, sicut postea ab antiquioribus nostris fuit 1742D veraciter repertum et probatum. In cujus rei testimonium . . . . Datum . . . . ultima die mensis februarii anno Domini millesimo CCCCo tricesimo nono, more Gallicano.» (Arch. de l’Aube. — origin. sur parch. — un seul sceau reste.)

Dom J. Méglinger dit la messe à Cîteaux in sacello D. Bernardi. «Locus est in quo ipse sanctus Bernardus aetatis suae anno 23 cum triginta sociis novitium agebat.» (Iter Cist., p. 130, 42.)

Le P. Chifflet imprimait en 1660 dans le S. Bern. gen. illustr. assert., p. 639: «In castro Granceio (Grancey, Côte d’Or). Adhuc exstat vetusta turris, quae dicta est post omnem memoriam et hodieque dicitur Turris S. Bernardi; quod ipse, dum cognatos suos subinde inviseret, in ea diversatus fuisse credatur.»

La Notice sur Châtillon-sur-Seine, par M. l’abbé Tridon, (Troyes 1847) renferme des renseignements fort intéressants sur l’antique oratoire de Sainte-Marie-du-Château, 1743A et sur la maison de la rue du Truchot, célèbres à Châtillon par les souvenirs de S. Bernard qui s’y rattachent.

Je lis dans les procès-verbaux des séances générales tenues à Troyes, en 1853, par la société Française pour la conservation des monuments historiques, (Paris, 1854; in-8o) p. 169 et 170 — qu’un vieux chêne porte encore à Cunfin (Aube) le nom de chêne 1744A de S. Bernard; qu’il y a à Dampierre (Aube) des reliques de S. Bernard, et qu’il existe auprès de Bar-sur-Seine une chapelle dédiée au saint abbé. Elle aurait été érigée en souvenir de son passage. On ajoute que le vallon qui conduit à Jully-sur-Sarce (Aube), siége d’un monastère de femmes où sainte Humbeline se fit religieuse, porte encore le nom de Val-S.-Bernard.

IV. Sceaux dans lesquels figuraient les armoiries de saint Bernard.1743

MS. XV de M. l’abbé Matthieu, p. 68. — Sceau de Guillaume, abbé de Clairvaux, pendant à un titre en parch. du 11 oct. 1431. — Orbiculaire. — Sur le fond paraît une main tenant une crosse; le bras est couvert de la manche de la coule. En haut, sur la droite de la crosse, est la lettre S, et, sur la 1743B gauche, la lettre B. Au bas, et sur la crosse, est un petit écusson qui représente les armes de saint Bernard, comme nous les avons aujourd’hui.

Ibid., p. 210. — 1656, 26 juillet. — Sceaux de l’abbé et du couvent de Clairvaux — pendants à un acte sur parchemin — imprimés sur cire entre deux feuilles de papier.

Celui de l’abbé, ovoïde — au milieu une grande niche, oû se trouve un prélat debout — une crosse sans voile (mouchoir — ou lacrymatoire) dans la main droite, soutenant une église de la gauche. S sous la main droite, et B sous la gauche. Aux pieds, un écusson, surmonté d’une crosse dans le milieu, et portant les armoiries de saint Bernard. — Au milieu du sceau de la communauté, une 1744A grande niche occupée par la S. V., tenant l’enfant Jésus sur son bras gauche. A droite, un évêque, S. Malachie, titulaire et patron de l’église de Clairvaux; à gauche, saint Bernard.

Ibid., p. 449. — 1524, 19 mai. — Sceau orbicul. — représentant la S. V., l’enfant Jésus, S. Malachie 1744B et S. Bernard. † SIGILLVM CONVENTVS MONASTERII CLAREVALLIS.

Ibid., p. 569. — 1669, 21 nov. — Laurent Gorillon, prieur de Clairvaux, vicaire général de l’abbé de Clairvaux.

Sceau ovoïde de 3 pouces de hauteur sur 2 de largeur, imprimé sur pain à — chanter. — Dans une niche ornée, un abbé régulier debout, nimbé, vêtu de l’habit monachal — tenant de la main droite une crosse avec son voile — sur sa main gauche repose une église: c’est S. Bernard. Au-dessous du coude droit S, et B au-dessous du gauche. — Sous les pieds, les armoiries de S. Bernard, surmontées d’une crosse par le milieu. SIGILLVM VICACARIATVS ABBATIS CLAREVALLIS.

V Portrait de saint Bernard.1743

1743C Je tiens à noter, au sujet du portrait de S. Bernard, une phrase de D. Joseph Méglinger. Ce religieux, racontant l’impression profonde qu’il avait ressentie à la vue des chefs de S. Bernard et de S. Malachie, conservés dans le trésor de Clairvaux, s’exprime ainsi: «Vultus praesertim melliffui Patris, et ex effigie passim obvia notus, et hic tam concinne elaboratus, intimas omnium pectorum medullas commovit.»

Ces mots — ex effigie passim obvia notus — établissent clairement qu’il existait pour le portrait de saint Bernard une tradition constante; aussi je remarque que le P. Méglinger a orné son livre intitulé: Nova melliflui Ecclesiae doctoris S. P. Bernardi effigies. Badae Helvet., 1670, in-8, — d’un portrait admirable, à mon avis, et qui offre la plus grande analogie avec le portrait gravé par Drevet (Vie de S. Bern., par Villefore, Paris, 1704, in-4), avec celui que les Bollandistes ont donné, d’apprès 1743D Puricelli, avec le beau tableau de l’église de Ville, avec le buste en terre cuite du XVIIIe siècle, qui se trouve dans l’église paroissiale de Fontaines-lez-Dijon, et avec d’anciens émaux que j’ai vus en divers cabinets.

Les portraits de profil par Ph. de Champagne (Vie de S. Bernard. Paris, 1648, in-4. — Petite gravure; Paris, chez Chereau le jeune.), et par Angelico de Fiezole, me paraissent s’éloigner du type convenu.

Les Bénédictins rapportent, dans leur Voy, Littér. (Paris, 1717, 2o part. p. 205) qu’ils trouvèrent chez les chanoines reguliers de Rouge-Cloître (Pays-Bas), 1744C «dans un manuscrit de S. Bernard, le portrait de ce saint, représenté avec l’ancien habit des religieux de Cîteaux, qui avaient le capuchon attaché à la robe»

Dans la première partie du même ouvrage, les Bénédictins parlent encore de cet ancien habit (p. 6). «Dans la croisée de l’église de la Mercy-Dieu, disent-ils, sont les tombeaux de quelques seigneurs de Prulli, autour desquels sont représentés des religieux avec l’ancien habit de Citeaux, le capuchon attaché à la coule.»

«On voit, disent-ils à la page 227, dans l’abbaye de La Ferté, sur le tombeau d’un seigneur de Marcilly, un religieux représenté avec l’ancien habit de l’ordre de Cîteaux, c’est-à-dire avec une coule dont le capuchon n’est point séparé. Nous remarquâmes la même chose sur les tombes des abbés qui sont dans le chapitre, lesquels, tous, jusqu’en 1387, ont le chaperon attaché à la coule. Le 1744D premier qui porte le chaperon détaché est de l’an 1419.»

Voici, à ce sujet, un extrait des fragments de l’Histoire manuscrite de l’O. de Cîteaux, que son éminence Mgr le cardinal de Reims a bien voulu me communiquer, p. 408. «On voit: dans l’église de l’abbaye de Longpont, le tombeau du B. Jean de Montmirail. Il est sous une arcade du sanctuaire de l’église, du côté de l’Evangile, élevé de 3 ou 4 pieds de terre. On voit le saint couche sur sa tombe, dans une figure en bosse fort naturelle, et revêtu de tous ses habits réguliers, tels qu’on les portoit en ce temps-là. Ils peuvent servir à décide 1745A plusieurs questions agitées en nos jours, sur la manière dont les religieux de Cîteaux étoient habillez du temps de S. Bernard. On y voit qu’ils ne portoient point par-dessus la coule ce grand chaperon qui tombe sur les bras et sur la poitrine, et qui descend par derrière quasi jusques aux talons. De tout ce vestement, ils n’avoient précisément que ce qui sert à couvrir la teste: il étoit cousu au collet de la coule, et se terminoit par une petite pointe en haut, à peu preès comme les Chartreux le portent encore. Leur coule n’avoit point ces longues 1746A et vastes manches qui tombent jusqu’à terre. Elles n’alloient que jusqu’au poignet, et n’avoient de largeur qu’autant qu’il en falloit pour entrer facilement par-dessus les manches de la robe, qui étoient plus courtes et plus étroites.»

Le ms. IX de M. l’abbé Matthieu, aprés avoir rapporté le passage qui précède (p. 336), ajoute: «On voit encore ce costume dans deux représentations de S. Bernard à Clairvaux: l’une dans l’église, l’autre à la porte d’entrée du grand cloître.»

VI. Sceau de saint Bernard.

1745B Le 16 août 1837 M. Deville, directeur du musée d’antiquités de Rouen annonçait à l’Académie des Inscriptions la découverte du sceau de saint Bernard . Ce sceau, donné par un officier en retraite, M. Pays d’Issoudun, est déposé au musée de Rouen.

«Il est en cuivre jaune, dit M. Deville, et de forme ovale; il a 40 millimètres de long, sur 30 dans sa plus grande largeur, son épaisseur est de cinq millimètres; il pèse 30 décagrammes. Le revers est plat et uni, sans apparence de manche ou d’appendice.»

On a très-bien observé, dans la Revue Archéologique, 2e ann. Ile liv. (1845) p. 99, — que saint Bernard y est représenté assis sur une chaise abbatiale dont les bras se terminent en têtes de lions grossièrement figurées.

La Revue pense que le saint abbé tient un rouleau de la main droite.

Le P. Mabillon, annotant la lettre de saint Bernard à Eugène III, écrite vers 1151 (Epist. 284), 1745C dans laquelle il lui annonce que la perversité d’un faussaire l’a contraint de changer de sceau, voit un livre dans la main droite à la place d’un rouleau. «Certe in charta Bernardi ipsius pro compositione litis inter monasteria S. Genovefae et S. Victoris, appensum est Bernardi sigillum cum ejus nomine et effigie, librum dextra, pedum sinistra tenente.» (S. Bern. Op., Epist. 284 not. d.)

Je lis dans les fragments de l’Histoire de l’abbaye de Clairvaux par Dom Le Boullenger (Ms. IX, de M. l’abbé Matthieu, p. 434): «Saint Bernard se 1746B trouva nécessité à se faire graver un autre cachet. On montre encore ce cachet dans le trésor de Clairvaux; il est de cuivre, de figure ovale. S. Bernard y est représenté assis, tenant sa crosse de la main gauche et une paix à la main droite, et autour est écrit: † SIGILLUM BERNARDI ABBATIS CLAREVALLIS.»

«Le cachet de saint Bernard, dit D. Cl. Guyton (Ms. XV de M. l’abbé Matthieu, p. 8), qui se conserve à Clairvaux, avec lequel le saint a scellé un accord qu’il a fait pour Saint-Victor-les-Paris, et qui y subsiste, représente S. Bernard assis.».

En 1594 l’abbé de Cîteaux écrivait à Dom Denis Largentier, abbé de Tironneau (Ms. XV de M. l’abbé Matthieu, p. 40): «Je vous ay écrit de Spa, Anvers et Bruxelles . . . . si vous trouves l’Histoire de Gaguin, vous in verrez in Philippo Pulchro que, cum omnes episcopi starent contra Pontificem Bonifacium solus abbas Cisterciensis stetit pro Pontifice. Nous avons eu nos beaux priviléges, en l’ung des quels il est 1746C dit: Mecum certasti, mecum sedebis; je ne voudrois pas faire moins que mon prédécesseur en l’affaire présente, mais Belleforest Commingeois ni Jean de Serres en leur histoire de France n’en disent mot . . . être assis n’est pas particulier à l’abbé de Citeaux: le cachet de saint Bernard le représentant assis. Donné à Besançon le 14 novembre 1594.

Votre confrère et cousin: Fr. EDME, A. de Cîteaux.»

M. Deville avait remarqué avec justesse que le sceau de Rouen est le second de saint Bernard, 1747A celui que les infidélités de son secrétaire Nicolas l’avaient obligé de faire graver et qui contenait son image et son nom — continente et imaginem nostram et nomen (Epist. 284 — voir aussi Epist. 298). L’imperfection de la gravure a toujours, comme on le voit, jeté des doutes sur la nature précise de l’objet que S. Bernard tient de la main droite: mais je crois qu’il est plus conforme aux usages suivis au XIIe siècle pour les sceaux des abbés, de s’en tenir au livre avec le P. Mabillon. (Cf. Natalis de Wailly, Elém. de paléogr., part. IV, c. VII.)

Quelle était la forme du premier sceau de saint Bernard? c’est ce que l’on apprend de plusieurs textes que je vais citer.

Ms. XV de M. l’abbé Matthieu, p. 61. — «Charte du temps de saint Bernard sur une feuille in-fo. C’est un double original de l’accord conclu entre les moines de Vauluisant et les chevaliers du Temple par les soins de saint Bernard . . . . Le second sceau 1747B est un oval autour duquel est: † SIGN. ABBATIS CLAREVALLIS. — Le fond est occupé par une main qui tient une crosse en dedans, dont le bras est couvert de manche de robe et par-dessus la manche de la cuculle . . . . Le long de l’écrit, en travers, on voit à demy chacune des lettres suivantes: CIROGRAPHUM.»

J’ai cru utile de transcrire ici l’accord dont parle Dom Guyton, d’après le cartulaire de l’abbaye de Vauluisant (Bibliothèque Impériale. — in-4o. parchem. — XIIIe siècle. — fo. 83 Ro).

Compositio monachorum Vallis-Lucentis militumque Templi, per manum Domni Bernardi Clarevallensis abbatis.

«In nomine Sancte et Individue Trinitatis. Notum sit omnibus presentibus et futuris quod inter monachos Vallis-Lucentis et milites Templi de Colatorio, per manum Bernardi Clarevallis abbatis facta est hec compositio: quod milites Templi quicquid 1747C habebant in territorio de Cirilli, a divisione que est inter grangiam ipsorum militum et grangiam monachorum, totum monachis concesserunt: id est medietatem atrii, medietatem decime et terras alias; ita ut deinceps a divisione predicta usque ad Sevei nichil nemoris neque terre adquirere possunt milites Templi, nisi forte omnino gratis datum fuerit in eleemosinam, ut nichil terrene substancie ab eis accipiat is qui dederit.

«Similiter monachi Vallis-Lucentis concesserunt militibus Templi quicquid habebant a predicta divisione 1748A usque ad ripam Venne, ita ut in valle illa nichil possint adquirere nemoris seu terre, nisi forte gratis omnino ab aliquo fuerit datum ut nichil terrene substancie ab eis accipiat is qui dederit.

Laudavit hoc Norpaldus abbas Vallis-Lucentis et frater Everardus Magister fratrum de Templo qui in Francia sunt.

Et ut firmum permaneat utriusque sigillo firmatum est, cum sigillo abbatis Clarevallis.

Laudavit hoc etiam frater Humfredus Magister Templi.»

Le Gallia Christiana (tom. XII, col. 231) parle ainsi de cet accord: «Quaedam permutavit (Norpaudus) cum militibus Templi apud terram de Cerilly. Permutationis cartae appendet S. Bernardi sigillum, in quo repraesentatur manus monachi pedum abbatiale gerens.»

Tel était donc le premier sceau de saint Bernard; car l’accord que j’ai transcrit est antérieur à l’époque 1748B où le saint abbé se vit forcé d’en faire graver un avec un nouveau type.

Les noms de deux personnages mentionnés dans l’accord servent à en fixer approximativement la date.

Norpaldus, ou Norpaudus, premier abbé de Vauluisant, donne les années 1129 à 1159 (Gall. Christ. ibid.); Évrard des Barres, maître particulier de son ordre en France dès 1143, fut élu grand-maìtre du Temple en 1147. (Art. de vérif. les dates — on n’y trouve pas le nom de Humfredus parmi ceux des grands-maîtres du Temple.)

Or, comme il est encore appelé ici — Magister fratrum de Templo qui in Francia sunt — il est évident que l’accord est antérieur à 1147: mais ce ne fut que plus tard que saint Bernard changea de sceau.

Le 7 septembre 1520 l’abbé de Clairvaux Dom Edme allant à Rome, arriva avec sa petite troupe 1748C au monastère de Bon-Mont en Savoie «auquel, dit la relation de son voyage, est la bourse de saint Bernard avec deux lettres dictées par luy et scellées de son scel, qui est inscrit à l’entour: SIGILLUM ABBATIS CLAREVALLIS, et au milieu est une main tenant une crosse.» (Voir la curieuse relation d’un voyage à Rome commencé le 23 août 1520 et terminé le 14 avril 1521 par R. Père en Dieu Mgr Dom Edme XLIe abbé de Clairvaux — publiée par M. Harmand dans les Mémoires de la Société académ. de l’Aube, IIe série, tom. II)

VII. Titres où il est fait mention de saint Bernard.1747

1747D Il serait fort important de recueillir et de publier tous les titres dans lesquels il est fait mention de l’intervention de saint Bernard ou de sa présence en qualité de témoin; ces documents seraient précieux pour établir plus complétement encore la chronologie de son histoire.

Il existe aux archives de l’Aube, dans les chartriers de Clairvaux, de Larivour, de Montiéramey, etc, plusieurs chartes originales dans lesquelles saint Bernard est nommé à titre de témoin. Je dois même faire une mention particulière de ces magnifiques pièces sur parchemin qui remontent aux premières années de l’abbaye de Clairvaux, et où se montre dans tout son éclat l’habileté de ses calligraphes.

Les Annales Ord. S. Benedicti (t. VI. Lut. Par., 1739) citent quelques documents cù figure le nom de S. Bernard: en voici le relevé.

P. 110 — In Guiberti de Novig. Opp. p. 832, Litter. Barthol. Laudun. ep. (1124).

P. 152 — In Chifflei opusc. 4, p. 176, Instrum. 1748D Hug. duc. Burgund. (1127). — In Spicil, t. XIII, p. 307, — Carta Theob. Camp. Com. de Sparnacen. eccles. (1127).

P. 370 — In Marlot t. II, p. 337, Litter. Samson. Rem. Archiep. (1143).

P. 699 — Carta Bartholom. ep. Laudun. (1146).

P. 723 — Diplom. Henr. Com. (1149).

Voir dans le Gallia Christ. t. XII, Instrum. col. 268, cart. XXXII (1152).

Voici la copie de quelques pièces que le Gallia Christ. t. XII se contente d’indiquer ainsi dans l’art. consacré à l’abbaye de Montiéramey.

«Guidoni, ad preces S. Bernardi, Atto Episc. dat ecclesiam de Clareio, quam donationem firmavit Innocentius II, Nonis Maii.»

«Donatio ecclesiae de Follis confirmata a Lucio II, XV kal. Apr.»

«Guido apud Claramvallem obtinet a Godefrido Lingon. ep. ecclesias de Landrevilla et de Lochiis.»

1749A Biblioth. Imper. — Cartulaire de l’abbaye de Montiéramey; in-fo, sur parchemin. (Il y en a une copie sur papier; in fo.)

Fo. 48, Ro. — Cure de Clarey.

Innocentius Episcopus Servus Servorum Dei Dilecto filio Guidoni Abbati Arremarensi, Salutem et Apostolicam benedictionem. Que pietatis intuitu et amore religionis monasteriis et aliis piis locis a fratribus nostris Episcopis impenduntur laudamus et votis atque desideriis postulantium assensum praebentes libenter scripti nostri munimine roboramus. Eapropter, dilecte in Domino Fili, karissimi filii nostri Bernardi Clarevall. Abbat. precibus inclinati, donationem vobis de ecclesia Clareii a Trecensi Episcopo rationabiliter factam firmamus et scripti nostri privilegio communimus. Dat Lat. Nonis Maii.

Ibid., fo 48, Ro — Cure de Folz.

«Lucius Episcopus Servus Servorum Dei Dilectis 1749B filiis G. Abbati et monachis Arremarensis monasterii Salutem et Apostolicam Benedictionem. Que a fratribus nostris episcopis et ecclesiarum Dei rectoribus religionis intuitu acta sunt, in sua volumus stabilitate firmari, ne pravorum hominum valeant refragatione turbari. Ideoque Venerabilium fratrum nostrorum Hu. Altissiodorensis Episcopi et Bernardi Clareval. Abbatis precibus inclinati, preces vestras paterna benignitate admittimus et ecclesiam 1750A de Follis quemadmodum a Vener. Fratre nostro Attone Trecensi Episcopo vobis canonice concessa est, per presentis scripti paginam vobis et per vos Arremarensi monasterio confirmamus. Si quis autem huius nostre confirmationis paginam sciens contra eam temere venire temptaverit, indignationem Omnipotentis Dei et Beatorum Petri et Pauli Apostolorum eius se noverit incursurum. Dat. Later. XV Kal. Ap.»

Ibid., fo 85, Ro — «In nomine Domini. Ego Gofridus Lingon. Episcopus notum fieri volo quod ecclesias de Landrevilla et de Lochia dedi abbati Guidoni et ecclesie monasterii Arremarensis libere in perpetuum possidendas, laudantibus Clarembaldo Decano, ad cujus ministerium pertinebant et Radulfo presbytero qui eas tenebat; eo sane tenore ut electionem presbiteri deinceps habeant monachi; et dum iste Radulfus eas tenuerit, quartam partem reddituum earum, exceptis baptisteriis, nuptiis, sepulturis et confessionibus ac denario panis benedicti 1750B et reconciliationibus feminarum, post mortem vero vel dimissionem ipsius Radulfi, medietatem reddituum aliorum habeant monachi praeter illa que nominavimus que propria sunt sacerdotis. Testes sunt Dominus Alanus Episcopus Autissiodorensis, Domnus Bernardus Abbas Clarevallis, etc., (sic) Actum est et sigilii nostri impressione firmatum est apud Clarevallem anno ab incarnatione Domini 1152.»

VIII. Charte de fondation de Clairvaux.1749

1749B «Je trouve dans les fragments de l’histoire manuscrite de l’abbaye de Clairvaux par Dom L. Boullenger (MS. IX de M. l’abbé Matthieu, p. 351) une copie de la charte de fondation de Clairvaux, «conçue en ces termes tirés mot à mot de l’original qui est dans les archives de l’abbaye.

1749C In nomine (dans les imprimés on y ajoute sancte et) individue Trinitatis incipit carta Comitis Hugonis. Notum sit omnibus presentibus et futuris quod Ego Hugo Trecensis comes do Deo et B. Mariae et fratribus Clarevallis locum ipsum qui vocatur Clarevallis, cum pertinentiis, agris, pratis, silvis, vineis et aquis, nihil (dans les imprimés on lit mihi) omnino aut heredibus meis retinens. Unde testes Acardus Remensis, et Petrus, et Robertus Aurelianensis, milites mei. Et sciendum quod Gaufridus Felonia dat pasturas suas in finagio de Juvancurt, tam in bosco quam in plano, omni tempore. Et si aliquod damnum intulerint animalia dictorum fratrum, solum capitale restituetur sine emenda. Haec autem omnia dedi in presentia supradictorum testium. Sciendum quoque est quod Dominus Rainaudus de Perecin (dans les imprimés Perceris et dans le Gallia Christiana Preci — ce dernier mot est à présent en usage) dedit eisdem fratribus pasturam et usuarium per totam terram 1749D suam, et precipue in aquis, silvis, pratis, in finagio de Perecin. Huius rei testes sunt Acardus Remensis et Robertus milites mei. Item sciendum quoque est quod Ego Hugo Comes Trecensis laudo et concedo fratribus eisdem libere et quiete possidere terram et silvam de Aretela. Has donationes confirmamus Ego Joceranus Lingonensis Episcopus et Hugo Comes Trecensis de sigillo et annulo suo (dans les imprimés on lit meo).»

«A cet acte sont attachés deux grands sceaux pendants en cire verte. Le premier représente Jocevan assis, tenant de la main droite le bâton pastoral et de la gauche un livre, avec cette inscription à l’entour: † SIGILLUM JOSCERANI EPISCOPI LINGONENSIS.

«Le second représente Hugues à cheval, vêtu d’une cotte-de-mailles, tenant de la main droite une épée nue rehaussée, et de l’autre un écu oblique appuyé 1750B sur son côté gauche, sur lequel il n’y a rien de figuré; on lit à l’entour: SIGILLUM HUGON . . . . . »

Comme cet acte ne porte aucune date, il est difficile de dire précisément l’année qu’il a été fait. Le Gallia Christiana, tom. IV, col. 155, int. Instrum., a mis cette date 1115 qu’il a tirée sur un extrait 1750C nouveau qu’on lit sur une planche encadrée et attachée dans le cloître de Clairvaux.»

On peut comparer ce texte avec celui que le P. Mabillon avait reçu de Clairvaux et qui avait été copié sur le titre original — Ex autographo Clarae-vallensi acceptam referre debemus (S. BERN. Op. not. in Epist. XXXI, 24); avec celui que le P. Chifflet a publié — Ex autographo Clarevallensi — (S. Bern. gen. illustr. assert. p. 513), et le Gallia Christ. (loc. cit.)

J’ai vu en 1853 exposée dans une montre à la bibliothèque publique de Troyes une copie figurée de la charte de fondation de Clairvaux avec deux sceaux pendants. C’est une mauvaise imitation faite sur parchemin au XVIIe ou au XVIIIe siècle. J’ai trouvé dans le chartrier de Clairvaux, aux archives de l’Aube, quelques imitations de pièces anciennes du même genre que celle dont je viens de parler.

Le titre suivant ne sera pas déplacé à la suite 1750D de la charte de fondation. MS. XV de M. l’abbé Matthieu, p. 448. — Ego Henricus Comes Trecensis notum esse volo presentibus et futuris quod Ego concedo fratribus Clarevallis perpetuo possidendum quicquid predecessores mei eisdem fratribus contulerunt: scilicet locum ipsum in quo idem monasterium situm est, cum terris, aquis, vineis, silvis, pratis, agris adjacentibus predicto monasterio, et quicquid de feodo antecessorum meorum acquisierunt usque in presentem diem; nihil omnino aut heredibus meis retinens. Do etiam eisdem fratribus pasturas et usuarium tam in aquis, pratis, quam etiam in silvis, omnibus finagiis per totam terram meam, ubi libere ire possunt. Quod ut firmum et stabile permaneat in futurum presentem paginam feci sigilli mei impressione roborari. Actum anno Verbi incarnati M. C. LXVIII. — sceau pendant — rond-rompu par le milieu — on distingue le cavalier et le cheval, mais non l’écriture.

IX. Varia.1751

1751A Itinéraire de saint Bernard de Châlons à Clairvaux en 1146.

Saint Bernard revenant d’Allemagne en 1146, se trouva le 2 février à Châlons-sur-Marne où Louis VII était venu à sa rencontre; c’était un dimanche. (Dominica die festum erat Purificationis B. Mariae: et Francorum rex Ludovicus . . . Catalaunum occurrebat viro Dei.)

Saint Bernard y resta deux jours (detentus est per biduum). Il en sortit le mardi, 4 février (egredienti vero feria 3a . . . . ), et vint à Donnement éloigné de Châlons d’une dizaine de lieues.

Le 5 février il célébra la messe à Donnement, en l’honneur de sainté Agathe, dont on faisait la fête (4aferia . . . . ipsa siquidem die in vico Campaniae, cui nomen Davament. . . . missarum sollemnia celebravit.).

Il vint ensuite à Rônay, éloigné de Donnement 1751B d’environ deux lieues (in oppido cui nomen Rônay), puis à Brienne, situé à peu près à la même distance de Rônay (in eadem strata, aliud situm est castrum, quod Brena ab indigenis nominatur).

Enfin, il arriva à Bar-sur-Aube, distant de Brienne de cinq à six lieues; en sorte qu’il fit ce jour-là environ dix à onze lieues (ipsa die venimus Barrum).

Le jeudi 6 il dit la messe à Saint-Nicolas et regagna sa chère vallée (quinta igitur feria vir sanctus missarum sollemnia celebravit in ecclesia S. Nicolai . . . . ipsa die fuit redditus Clarae-Valli.)

— (S. Bern. Op. lib. VI, seu miraculor, C. XIII.)

MS. XV de M. l’abbé Matthieu, p. 344:

De sancto Patre nostro Bernardo.

Anno milleno nonageno simul uno

Fontanum castrum Bernardo contulit ortum.

1751C Postea duntaxat septem labentibus annis

Hoc in coenobio cepit Cistercius Ordo.

Sed dum quindenos Ordo succresset in annos,

Intus suscepit vir sanctus religiosam

Sub Stephano vestem, socios triginta trahendo.

Effectus posthac Clarevallis prius abbas

Sublimem sequitur sublimus vitam, repletque

Lumine doctrinae signisque micantibus orbem.

Oblatos septem contempsit pontificatus

Ne fugitivus honor mansuris rebus obesset.

Frustra conarer metro conscribere velle

Caetera quae nequeunt magni comprehendere libri.

Intendat opem nobis apud Omnipotentem.

AMEN.

— On voit par le 4e vers que cette pièce se trouvait à Clairvaux: c’était probablement une inscription.

L’édition du Grand Exorde, donnée par Dom Ignace de Ybero (Pampelune, 1621, in-fo), se termine 1751D par un miroir des religieux qu’on ne sera pas fâché, je pense, de trouver ici.

SPECULUM RELIGIOSORUM ex diversis sententiis B. P. N. Bernardi collectum, in quod prospiciens monachus, ad perfectionis culmen cito perveniet.

Sit omnis Religiosus

In ecclesia, devotus.

In choro, officiosus.

1752A In altari, discretus.

In libraria, tacitus.

In secretis, honestus.

In cella, studiosus.

In infirmatorio, medicus.

Inter fratres, jucundus.

Inter seculares, rarus.

In nihilo, moestus.

In adversis, pacificus.

In prosperis, modestus.

In claustro, clausus.

In coemiterio, pius.

In refectorio, contentus.

In oratione, assiduus.

In lectione, curiosus.

In lecto, compositus.

In consilio, facundus.

In compatiendo, charus.

Inter gentes, timidus.

1752B Ad parendum, facillimus.

Ad obsequium, promptissimus.

Ad confitendum, humillimus.

In mensa, sobrius.

In sacristia, tutus.

In capitulo, modestus.

In porta, brevilocus.

In horto, laboriosus.

In coquina, exosus.

In colloquio, pudicus.

In hospitio, providus.

In aspectu, modicus.

Et sic in omnibus semper

Deo erit gratissimus

Et speculum, hominibus:

Tria decent omnem religiosum,

Pauca loqui,

Paucos familiares habere,

Et multum orare.

1752C Tria religioso laudabilia:

Pondus maturitatis,

Amor communitatis,

Et fuga proprietatis,

Tria in religioso reprobanda:

Indevotio,

Dissolutio,

Et vagatio.

Duodecim abusiones claustri.

Praelatus negligens,

Discipulus inobediens,

Juvenis otiosus,

Senex obstinatus,

Monachus curialis,

Religiosus causidicus.

Habitus curiosus,

Cibus exquisitus,

Rumor in claustro,

Lis in capitulo,

1752D Dissolutio in choro,

Irreverentia juxta altare.

Aureum documentum.

In claustro clausus mundanos despice plausus,

Regnum suspira plenum dulcedine mira.

Hic sta, nec cesses, veniunt post semina messes,

Post planctum plausus, post hinc habitus paradisus

Meditatio die, nocteque exercenda.

Mors tua, mors Christi, fraus mundi, gloria Coeli,

Et dolor inferni sunt meditanda tibi.

No 8. Extraits des manuscrits de M. l’abbé Matthieu.1753

1753A MS. XV. (Notes de Dom Cl. Guyton), p 502. — (1143-1157). In nomine sancte et individue Trinita-Galerannus Comes Mellenti universis fidelibus Dei in posterum. Oportet nos operari bonum ad omnes, maxime autem ad domesticos fidei; sic enim monet nos Dominus ut faciamus nobis amicos de mammona iniquitatis, ut cum defecerimus recipiant nos in eterna tabernacula. Propterea ego Galerannus Comes Mellenti et Dominus castri quod dicitur Gornai, concessi in manus venerabilis Bernardi, Clarevallensis Abbatis, fratribus Clarevallensibus, et omnibus qui sunt ex ordine Cisterciensi, gratuitum transitum rerum suarum, ut neque apud Gurnaium, neque in alio loco ex his que ad me pertinent, pedagium aliquod exigatur ab eis. Ut autem firma sit concessio in eternum, et a nemine successorum possit evacuari, cartam hanc sigilli impressione firmavi, addens et episcopi Parisiensis testimonium et sigillum. Ego Theobaldus Dei gratia 1753B Parisiensis episcopus concessionem hanc ratam esse precipio et eam episcopali auctoritate confirmo. Testes ejus sunt Henricus de Ferreriis, Willelmus de Pinu et Robertus de Fromeville de clericis, Bernardus archidiaconus, Radulfus et Johannes canonici Parisiensis ecclesie.

— Deux sceaux pendants: le second est oval, représentant un évêque assis, la crosse en dedans: SIGILLVM THEOBALDI PARISIENSIS EPI. — Le 1er rond; empreint des deux côtés: représentant un seigneur à cheval: SIGILLUM GVALERANNI COMITIS.

Ibid, p. 504, ann. 1159. — In nomine sancte et individue Trinitatis, Amen. F. Dei gratia Romanorum Imperator et semper Augustus, omnibus fidelibus tam presentibus quam futuris in perpetuum. Quoniam sepe contigit ea que bona peracta sunt, vel hominum inconstantia mutari vel oblivione 1753C deleri, notum sit universis quod Ego, voluntate et consensu Beatricis Imperatricis, uxoris mee, pro remissione peccatorum nostrorum et omnium antecessorum nostrorum, concedo domui de Claravalle in perpetuum possidendum quicquid Guido de Wangionis-Rivo (Vignory) eidem domui dedit et concessit de proprio feudo ceterisque omnibus et homines ejus casati de suis casamentis tempore bone memorie Bernardi Abbatis, in terris, silvis, aquis, pascuis, ceterisque aizanciis, quodque de eodem dono et eleemosina Bartholomeus filius ejusdem G. postea concessit. Quod ut nullius temeritas ulterius audeas violare, sigilli mei impressione confirmandum duco. Actum in obsidione Chreme anno ab incarnatione Domini MCLIXe. Testes sunt Reinaldus cancellarius, electus Colonie archiepiscopus, Everardus episcopus Bambergensis, Henricus dux Saxonie, Bertoldus dux Turingie, Adam abbas de Ebra.

1753D — Les deux gros sceaux ronds, attachés sur la charte même. Le 1er représente un prince assis, vêtu d’une robe longue, un manteau par dessus; la couronne sur la tête, le sceptre en la main droite, de la gauche il tient un globe surmonté d’une croix: FREDERICVS DEI GRATIA ROMANORVM IMPERATOR AVGVSTVS. — L’autre, qui est vis-à-vis, représente l’impératrice assise. BEATRIX DEI GRATIA ROMANORVM IMPERATRIX AVG.

Ibid., p. 178, (ann. 1202). — Bernard. Doyen de Bar-sur-Aube, fait une donation à Clairvaux.

Hoc donum fecit idem Decanus in capitulo Clarevallis, presente Garnerio episcopo quondam Lingonensi, 1754A obtulit ad altare B. Bernardi, astantibus et hoc ipsum tactantibus Everardo presbitero Longi-Campi, fratre Jacobo et fratre Mattheo Clarevallis cellerariis.

Hilduin, évêque de Langres confirma cette donation avec plusieurs autres en 1202.

Ibid., p. 454, ann. 1335. — . . . . . . Nos frater Johannes Abbas Clarevallis. . . . . pie considerantes laborem quem confratres nostri, precipue monachi, sustinent in vigiliis et in die Beatissimi Patris nostri Bernardi, ut sibi, cujus veneranda gaudent presentia, laudes exsolvant debitas et devotas, centum librarum parvorum turonensium bursario tradidimus in utilitatem communem ecclesie nostre convertendas, pro emendis redditibus quinque librarum turonensium parvorum, de quibus emendi sunt pisces, et ementur perpetuo pro pitancia piscium tam monachis quam conversis in die B. Bernardi annis singulis facienda. . . . . MCCC tricesimo 1754B quinto, indictione IIIa, in die Nativitatis B, M. V.

Ibid., p. 523, ann. 1439, 22 avril. — L’abbé de Clairvaux accorde la participation à tous les biens spirituels de l’abbaye à très-noble et puissante dame, princesse, Madame Marguerite de Vaulx, comtesse de Saint-Paul, Brienne, etc., à cause de ses libéralités et de sa très-grande dévotion envers Monsieur S. Bernard, ayant visité en propre personne son glorieux corps sainct et prétieuses reliques qui reposent en l’église de Clairvaux.

Ibid., p. 212, ann. 1472, 22 janv. — Lettres de sauvegarde accordées à l’abbaye de Clairvaux par Charles le Téméraire, duc de Bourgogne, en l’honneur de N. S. J.-C., de la benoiste V. M. sa mère et du glorieux corps-sainct Monseigneur S. Bernard, chapellain de la dicte glorieuse Dame, et premier Abbé dudit lieu, lequel gist et repose en léglise et abbaye de N. D. de Clervaulx, premiere fille de nostre église et abbaye de Cisteaux; et pour considération de ce que en la dicte abbaye, nou set nos prédécesseurs 1754C comtes de Flandres, avons une belle et dévote chapelle en laquelle les religieux d’icelle abbaye sont tenus de perpétuellement célébrer, et célèbrent chascun jour une messe de requiem, pour le remède et salut des âmes de nous et de nos prédécesseurs et de nos successeurs comtes et comtesses de Flandres, qui les ont fondées et augmentées de plusieurs ventes et revenus en nos pays, dont piéça nous leur avons donné nostre main levée . . .

. . . Données à Bruges, le 22e jour de janvier, l’an de grâce 1472.

Ibid., p. 457, ann. 1479, 10 dec. — Les habitants de Belaon, dioc. de Langres, consentent à ce que les religieux de Clairvaux continuent de construire une forge à fer auprès de leur grange de Champigny, pour l’honneur et révérence de Dieu, de N. D. et de S. Bernard, premier abbé dudit monastère, auquel repose son précieux corps.

1754D Ibid., p. 183, ann. 1508, 19 janv. — Par devant Jehan Gillot et Etienne Deschiens, notaires jurés à Bar-sur-Aube, Thibaut Henrion de Brousseur , et Michau Hurren, tonnelier, demeurant à Clairvaux, reconnaissent que, de leur bonne volonté, pour leur singulière dévotion qu’ils auroient et disoient avoir dès longtemps Monsieur saint Bernard, et à l’église de Clerevaulx, en laquelle repose son précieux corps, et afin d’être participans ès prières, oroisons et biens spirituets et temporels qui de jour en jour se font, prospèrent et augmentent èn icelui monastère, ils se sont donnés en corps et en biens à icelui monastère, pour servir l’église et les personnes d’icelle selon leur possibilité, tant de leur métier que autrement, en toutes choses licites et honestes.

1755A Ibid., p. 631, ann. 1587. — On voit, dans une relation du siége de Clairvaux par les Reîtres calvinistes, que le duc de Guise étant venu au secours de l’abbaye (1er oct.), ce prince commença par aller faire ses prieères au tombeau de S. Bernard «où il fut fort longtemps avec une grande édification des religieux.»

La relation mérite d’être copiée tout entière:

«L’an mil cinq cent quatre-vingt-sept, les Reistres ou Calvinistes allemans pénétrèrent dans le royaume de France au nombre de 50 mille hommes, pour donner du secours et soutenir les calvinistes françcois. Une grosse partie d’iceux arriva vers Clairvaux, sur la veille de saint Michel, après diner, environ les 3 heures, et vindrent sommer la maison par un trompette, demandant au commencement d’y loger 5 à 6 cornettes. On leur fit entendre que feu le R. abbé Dom Lupin le Myrrhe, était en la ville de Troyes, et qu’il falloit premiérement l’en 1755B avertir. Lesdits Reistres ennemis étaient en nombre d’environ 45,000 en bon ordre, conduits par le duc de Bouillon, et venoient en longueur depuis Chaumont jusqu’à Latrecey, et en largeur depuis Richebourg jusqu auprès de Clairvaux, où étoit leur assurance d’avoir leur premier payement en France, en ladite abbaye de Clairvaux. Mais avec l’aide de Dieu et de la Sainte Vierge, très bonne patronne de cette maison, et de Monseigneur saint Michel, aussy de nostre très dévot Père saint Bernard, furent bien empeschés de leur mauvaise entreprise; car feu Monseigneur Henry, le duc de Guise, mandit à feu notre R. abbé le Myrrhe, qu’il n’y avoit point d’autre remède que de faire composition avec lesdits Reistres ennemis de la France, et leur promettre ce qu’ils demandoient: sçavoir 7000 escus, des boeufs pour saller et du vin en quantité: et qu’avec l’ayde de Dieu et faveur des glorieux saincts susdits, nous sauverions l’église de Clairvaux; et 1755C que quand ils brusleroient les cens, nous avions des bois pour les refaire, ne pouvans emporter les terres et le fond.

MM. les Vénérables religieux de Clairvaux, entendans ces piteuses nouvelles, se retirèrent en la ville de Bar-sur-Aube, avec leur R. Abbé le Myrrhe, persistans tous en prières, oroisons, sans aucun intervalle, nuit et jour, en la chapelle du petit Clairvaux où ils étoient tous retirés, et principalement le jour de saint Michel, auquel l’ennemi faisoit tous ses efforts pour entrer en ladite abbaye, jour le plus à craindre.

Néantmoins 4 ou 5 religieux, officiers de ladite maison de Clairvaux, demeurèrent avec très grande constance audit Clairvaux pour y donner ordre, et administrer les vivres et munitions aux soldats qui étoient en la maison pour la défendre; les noms desquels religieux sont: dom Bernard Brenay, célérier; dom Nicolas Thiefaud de Chaumont, moine 1755D du four; dom Jean de Reims, maîitre-d’hôtel, et le capitaine de Belleguise, fort bon gentilhomme et bien zélé à cette maison. Furent aussi assemblés tous les convers bien délibérés à combattre, auxquels demanda le dit seigneur de Belleguise quelle etoit leur volonté et leur résolution.

Tous, d’un commun accord, firent réponse qu’ils vouloient vivre ou mourir pour las conservation de la dite maison, et défendre leur pain.

Advisèrent tous ensemble avec les dits religieux officiers qu’il étoit expédient de rompre la chaussée de Ville: ce qui fut fait par un nommé Gautelet, de Ville, et manouvrier de la maison de Clairvaux; aussi rompre le Tréfou, pont auprès de Clairvaux appelée d’ancienneté le Pont au Prieur, qui est bien à 100 pas de la dite abbaye, allant au gagnage d’Outreaube; et fut la nuit même de saint Michel rompu par un maçon, de façon que le mardi au matin fut vu tout ledit, pont effondré contre l’effort de l’ennemy, lequel étoit audit Outreaube, 1756A notre cense, quand ledit pont effondroit avec grand effrayement.

Et le dimanche, par la permission de notre Dieu, la pluye se print par petite bruine, et de là jusques au mardy, en telle façon qu’il n’y avoit cheval qu’il ne fût en l’eau jusques aux flancs près d’Outreaube; qui étoit une grace spéciale de la divine bonté, pour donner ordre à la nécessité urgente et périlleuse. Notés que beaucoup de personnes ont vu pleuvoir un mois ou trois semaines, et que les eaux n’étoient pas si grandes qu’elles furent pour lors en deux jours et demi.

Et la plus grande rage que l’ennemy put exercer envers la dite abbaye, fut de tenter l’Outreaube, où ils mirent à bas les portes de la bouverie, fort grandes et spacieuses comme l’on peut voir, pour assiéger leur canon, afin de battre en ruine les murailles de la dite abbaye; ce que taschans d’exécuter, au premier coup le canon creva, se brisa et 1756B rompit en pièces; et nos vaillans soldats qui étoient au Pont du Prieur, bien résolus avec les convers, derrière une barricade du fou qu’on avoit dressée, allèrent en peu d’heures vers eux avec diligence. Eux, disent-ils, ne se soucioient aucunement, car les Reistres qui ne savoient les ambuscades de nos bons soldats, comme étrangers, n’avoient pas si tost levé et montré leur tête par-dessus la dite bouvière d’Outreaube, qu’on les saluoit avec grands coups d’arquebuse et mousquets, qui fut occasion qu’ils firent un trou auprès, en ce grand champ qui tire à la forge et prirent de grandes pièces de bois pour penser faire un pont afin de passer la rivière au droit du lavoir des brebis, où il y en avoit déjà 5 ou 6 de passés.

Les soldats qui étoient au Pont du Prieur, n’en voyoient rien pour cause du bois qui étoit sur la rivière; et les autres qui étoient en ambuscade près la Croix de Calvin, conduits par le valeureux 1756C capitaine Des Carreaux, descendirent à couvert pour passer au droit dudit lavoir du Pré la Barre, et entrèrent dans la prairie où il y avait de l’eau jusqu’aux genoux, pour tirer sur le gros desdits Reistres, et les empescher de passer la rivière. Et quand ils en furent proche à couvert, n’étant vus desdits Reistres, ils y tirèrent 40 ou 50 coups d’arquebuse.

On envoyoit Martin le plombier, de Ville, lors serviteur de cette maison, avec d’autres soldats pour porter arquebuses et pierres de roc pour tirer au pont, lequel fut gagné vaillamment par ledit capitaine Des Carreaux; et furent leurs planches et machines, jettées, où plusieurs des ennemis furent blessés et jetés en l’eau, qui fut la cause qu’ils s’en retournèrent bien honteux; et en tomba une grande quantité en l’eau, qui furent perdus et noyés d’autant que la rivière étoit roide et haute. L’un des chefs qui menoit les ennemis, irrité de si grande 1756D furie, fit serment qu’il ne boiroit ni ne mangeroit qu’il n’eust bruslé l’église de l’abbaye, et rôty tous les moines vifs: mais, graces à Dieu, la nuit mesme il mourut malheureusement sans avoir parlé à personne depuis qu’il se fut couchê, en la maison de feu Laurent Gorillon, à Longchamp, lors juge des terres de MM. de Clairvaux.

Le mesme jour qu’ils firent les plus grands efforts, sortit mondit Seigneur duc de Guise de Vignory, cinq lieues delà Clairvaux, et arriva à Bar-sur-Aube inopinément sur les 6 heures du soir, dernier jour de septembre; et aussitost envoya mondit Seigneur de Clairvaux le Myrrhe, pour parler avec luy, et éetoit pour lors au petit Clairvaux de Barsur-Aube.

Le mercredy au matin, jour de saint Remy, chef d’octobre, sur les sept heures du matin, vint è Clairvaux par la porte de la vigne, et alla avant toutes choses à l’église, faire ses prières au tombeau saint Bernard, où il fut fort longtemps avec une 1757A grande édification des religieux, qui étoient derrière lui. Et mondit Seigneur de Guise, avisa avec lesdits officiers et religieux, et mondit Seigneur de Belleguise, s’en alla reconnaitre la force qui étoit an Pont du Prieur, et cependant commanda qu’on eût à bailler à vivre aux soldats de sa compagnie, et refaire habilement le Pont du Prieur, avec des pièces de cuves et deux chars de trapans.

Neuf pièces de vin furent défoncées dessous la halle, par ledit dom Jacques Péricard, lors vinetier, aussi par l’advis de mondit seigneur de Belleguise, et grande quantité de pain fut portée dedans des sacs.

Faut notter que mondit seigneur Abbé le Myrrhe, ayant envoyé gens de Bar-sur Aube à Clairvaux, pour emporter les corps saints et les mettre en plus grande sureté, les religieux et convers qui étoient envoyés ne purent, en nombre de 10 ou 12 qu’ils étoient, lever ni mouvoir en aucune façon la 1757B couverture des tombeaux où iceux corps saints reposent; nonobstant qu’on ait expérimenté plusieurs fois que 4 hommes suffisoient pour faire le mesme office.

En actions de graces, on a accoustumé à Clairvaux de faire chaque année une procession générale le 29 septembre, jour de feste du B. Archange saint Michel, protecteur de l’Eglise et chef de toutes les troupes du Dieu des armées, et le déffenseur invincible des fidèles.

Ce présent escript est attesté par fr. C. de Bourgogne, religieux de Clairvaux, et fr. François Rongeot, Prieur, qui ont signé avec paraphe.

Je trouve dans le même ms. de M. l’abbé Matthieu, p. 67, une pièce qui se rattache à celle que je viens de copier:

«Je Balthasar Gobelin, Conseiller du Roy et Thrésorier Général de l’extraordinaire de ses guerres, confesse avoir eu et receu comptant en l’abbaye 1757C de Clairvaux, près Bar-sur-Aube, de Monsieur l’Abbé dudit lieu de Clervaux, la somme de 3000 escus soleil, en francs d’argent de XX sols pièce, XV quarts d’escus aussi d’argent de XV sols pièce, avec XV sols, empruntés par Monsieur le duc de Guise, gouverneur et Lieutenant Général pour Sa Majesté ès païs de Champagne et Brye, par luy ordonnée estre mise en mes mains pour l’employer au fait de ma charge, mesme à partie des frays et despenses de l’armée par luy conduite pour’le service de Sa Majesté audit pays de Champagne, pour s’opposer aux forces étrangières qui entroient en ce royaume. De la quelle somme de . . . . . je me tiens content et bien payé, et en ay quitté et quitte ledit Sieur Abbé de Clervaux et tous autres. En tesmoin de quoy j’ai signé la présente de ma main le 3e jour d’octobre 1587. Signé: Gobelin. — sur parchemin.

Ibid., p. 46, ann. 1595, 15 juin. — Clemens 1757D Papa VIII. ad perpetuam rei memoriam. De omnium Christi fidelium salute paterna charitate solliciti, coelestes indulgentiarum thesauros quorum dispensatores in terris Divina nos Clementia instituit, in suffragium etiam animarum quae in purgatorio detinentur libenter proferimus, prout in Domino salubriter inspicimus expedire. Volumus itaque ecclesiam monasterii Claraevallis Ord. Cisterciensis, Lingonensis dioecesis, quod monachorum, conversorum, donatorum et servientium numero inter caetera ejusdem Ordinis monasteria valde insigne et ob sanctorum corporum et aliarum sanctarum reliquiarum, et praesertim sancti Bernardi, dicti monasterii primi Abbatis, cujus corpus in eadem ecclesia requiescit, copiam in maximam apud omnes veneratione habetur, speciali privilegio quo nondum insignitum existit, in suffragium animarum fidelium defunctorum, decorare. Supplicationibus dilecti filii Dionysii Largentier, Abbatis Tyronnelli, nobis super hoc humiliter porrectis inclinati, 1758A de Omnipotentis Dei misericordia ac BB. Petri et Pauli Apostolorum ejus auctoritate confisi, concedimus ut quandocumque sacerdos aliquis ejusdem monasterii duntaxat missam defunctorum ad altare ejusdem sancti Bernardi, in quo ipsius reliquiae sunt conditae, pro anima cujuscumque fidelis, quae Deo in charitate conjuncta ab hac luce migraverit, celebrabit, ipsa anima de Ecclesiae thesauro indulgentiam consequatur, ita ut Domini Nostri Jesu Christi et ejus Genitricis B. Mariae Virginis, ac sanctorum omnium meritis sibi suffragantibus, a purgatorio liberetur; contrariis non obstantibus quibuscumque. Datum Romae apud sanctum Marcum, sub annulo piscatoris, die 15 junii 1595, Pontificatus nostri anno IV.

Signat. Vestrius Barbianus.

L’original est aux Archives, ajoute dom Cl. Guyton; et il y en a un exemplaire collé sur un petit tableau attaché sur l’autel de notre Père saint Bernard.

1758B Ibid., p. 352, ann. 1607, 14 janv. — Dom Denis Largentier, abbé de Clairvaux, en nommant un vicaire en Irlande, lui rappelle l’amitié de S. Bernard et de S. Malachie. «Pia illa, inter gloriosissimum Malachiam, quondam Hiberniae metropolitanum, et Beatissimum P. Bernardum nostrum, sacrarum amicitiarum intercessio; singularis illius in hanc Claram Vallem charitas, in qua, moriens, sacratum corpus suum, praeclarum specialis et perpetui sui patrocinii munimentum reliquit.»

Ibid., p. 213, ann. 1611, juillet. — Louis XIII confirme les priviléges accordés par ses prédécesseurs à l’abbaye de Clairvaux «étant ladite abbaye de fondation royale, et de tout temps, pour cette considération et la dévotion singulière que les roys ses prédécesseurs y ont portée, leur ayant icelle esté grandement recommandée comme dépositaire de plusieurs corps saints, notamment celui de 1758C saint Bernard.» — Donné à Paris au mois de juillet 1611.

Ibid., p. 213, ann. 1618, 29 juillet. — On conserve dans les archives de Clairvaux, une grande lettre que le R. P. D. Denis Largentier, 44e abbé de Clairvaux, de sainte mémoire, écrivait le 29 juillet 1618, à l’abbé de Cîteaux sur les affaires de leur Ordre; à la fin de laquelle il lui marque: Nous aurons le bonheur et l’honneur de votre présence à la Saint-Bernard, pour l’accomplissement de votre voue, etc.

Ibid., p. 217, ann. 1661, 2 sept. — Dom Pierre Henry, surnommé Duchesne, 46e abbé de Clairvaux, dans une sienne lettre en date à Clairvaux du 2 septembre 1661, adressé à dom Nicolas Perrin, religieux profès de Clairvaux, pourvu par le Pape Alexandre VII, de la cure de Colombey-la-Fosse, (Arrondissemt de Bar-sur-Aube, canton de Soulaines), écrit: «Curiam de Colombeio la Fosse, 1758D cum illam regularem esse et a religiosis tam nostre predicte domus Clarevallis quam alterius ordinis continuative sicut in presenti esse et fuisse occupatam, illumque locum de Colombeio la Fosse, duabus leucis tantum hinc distare noverimus, in quo BB. Pater noster Bernardus quotidianis huc usque claruit miraculis . . . »

— On sait que saint Bernard bénit une fontaine à Colombey-la-Fosse, et communiqua à ses eaux par un miracle la propriété de guérir diverses maladies. L’onde de cette fontaine, puisée d’aprè ses ordres, se changea en vin, à la grande admiration deses moines et de tous les assistants. (Vita S. Bern. a Joh. Eremita, II, 12.)

Je crois que la fontaine miraculeuse existe encore aujourd’hui, et qu’on a recours à ses vertus curatives particulièrement contre la fiévre.

Ibid., p. 400, ann. 1682, 22 déc. — Nicolas de Peiresson, doyen de Saint-Jean-Baptiste de Chaumont, écuyer, seigneur de Chamarande, Claude de 1759A Poiresson son frère, écuyer et seigneur dudit Chamarande, avec dame Germaine Geoffroy de Coeffy son épouse, fondent à perpétuité dans l’église de Clairvaux, moyennant 10 livres de rente annuelle, trois messes basses, pour reconnoître les graces particulières qu’ils ont reçues de Dieu, par les mérites et intercession de l’immaculée Mère de Dieu, S. Joachim, Ste Anne et S. Joseph et du B. S. Bernard.

Pendant leur vie les messes seront célébrées le 1760A jour de l’Assomption, le jour de la fête de S. Bernard, et le jour de la S. Joseph; après leur mort, elles se célébreront en la chappelle du, tombeau de saint Bernard, pour le repos de leurs âmes.

MS. IX. (Catalogue succinct des Abbés de Clairvaux). p. 264. — Il est fait mention d’une lampe d’or offerte au tombeau de S. Bernard par le duc de Penthièvre. On dit que ce prince était fort lié avec M. Rocourt.

No 9. Luminaire devant l’autel de saint Malachie et dans l’église de Clairvaux.1759

Les archives de l’Aube possèdent une charte de Robert Bruce, par laquelle il donne à l’abbaye de Clairvaux sa terre d’Osticroft avec toutes ses appartenances, pour entretenir un luminaire devant le tombeau de S. Malachie. «Ad sustinendum luminare 1759B coram B. Malachia. (Vid. Cang. Gloss., verb. Sustinere.)»

Cette charte n’est pas datée, mais un passage des statuts du chapitre-général de l’ordre de Citeaux, peut aider à fixer, à quelques années près, l’époque de sa rédaction.

On lit dans la deuxiéme collection des définitions du chapitre-général, distinct. 1, cap. X, de lumine ante altare in festis sanctorum accendendo:

«Cum festum alicujus sancti evenerit, ad altare in ipsius honorem consecratum, non cereos sed lampadis lumen vel candelae licebit accendere.» (Nomast. Cisterc. Paris, 1664, in-fo:, p. 277.)

En rapprochant ce passage, d’où ressort si clairement l’esprit de pauvreté des premiers cisterciens, d’une demande adressée en 1273 par l’abbé de Clairvaux au Chapitre-Général, afin qu’il lui fût permis d’avoir un luminaire devant le tombeau de S. Malachie, on voit qu’il ne pouvait être question 1759C que d’une riche fondation en l’honneur du saint archevêque. Il me paraît assez naturel de penser que c’était celle de Robert Bruce, qui donnait une terre entière avec toutes ses dépendances, pour environner le tombeau de S. Malachie de ce pompeux éclat que nos pères se plaisaient tant à voir autour des reliques des saints.

Je me crois donc suffisamment autorisé par le rapprochement de la permission accordée en 1273 à l’abbé de Clairvaux, pour ne pas faire remonter plus haut la date de la charte de Robert Bruce; la forme de l’écriture, minuscule diplomatique fort régulière, annonce la fin du XIIIe siècle. Ainsi, cette pièce serait émanée de Robert Bruce, compétiteur de Jean Baliol, et qui eut pour mère Isabelle, fille de David, comte de Huntingdon. (Cf. The Baronage of England by William Dugdale, Norroy King of armes. London, 1675, in-fo, tom. I.)

Voici le texte de la Charte de fondation, écrite 1759D parchemin et bien conservée:

«Sciant presentes et futuri quod Ego Robertus de Brus, Dominus Vallis Anandi, dedi et concessi, et hac presenti carta mea confirmavi Deo et Beate Marie ac domui Clarevallis et monachis ibidem 1760A Deo servientibus et in perpetuum servituris, ad sustinendum luminare coram beato Malachia, pro salute anime mee et salute omnium antecessorum et successorum meorum, in puram et perpetuam elemosinam, totam terram meam de Osticroft, cum 1760B rectis et antiquis suis divisis et pertinenciis, ac communibus aysiamentis et libertatibus dicte terre pertinentibus, prout Rogerius de William Wode et Galfridus Collan ipsam terram de me quondam tenuerunt, tenendam et habendam totam terram predictam monachis predictis de me et heredibus meis, libere, quiete, plenarie, integre et honorifice, sicut aliqua elemosina in toto regno Scotie liberius et quiecius tenetur aut possidetur, in boscis et planis, pratis et pascuis, moris et mariscis, turbariis, paunagiis, et omnibus aliis aysiamentis, que in dicta terra inveniri potuerunt vel exerceri, absque omni consuetudine seculari, exactione et demanda . Volo eciam et concedo pro me et heredibus meis quod terra prefata libera sit a multura, et quod tenentes eandem libere et sine contradictione molent in molendinis meis. Ego vero et heredes mei predictam terram cum omnibus suis pertinenciis, ut predictum est, prefatis monachis contra omnes homines 1760C et feminas warantizabimus, acquietabimus , et defendemus in perpetuum. Ut autem hec mea donacio et concessio perpetue firmitatis robur obtineant, presens scriptum sigilli mei munimine roboravi. Hiis testibus, Dominis David de Thorthorald, tunc Senescallus Vallis Anandi; Roberto de Herice; Willelmo de Sancto Michaele, militibus. — Magistro Adam de Kircudbricht; Domino Willelmo de Duncorry; Willelmo de Corri; Adam Hendeman; Ricardo Crispin; Willelmo de Are, clerico et aliis.» — Le sceau en cire blanche, pendant à des lemnisques de parchemin, rond, formant une calotte sphérique à l’opposé de la surface gravée; dans le champ un cavalier armé de toutes pièces, le casque fermé, orné d’un cimier en forme d’éventail, tenant une épéc de la main droite et un écu de la gauche, le cheval caparaçonné et galoppant de droite à gauche. — Légende. ESTO . . . DEO? . . . écriture majuscule gothique. Hauteur du parchemin, 1760D neuf centimètres. Largeur, vingt-six centimètres.

J’ai réuni un certain nombre de titres relatifs au luminaire de l’église de Clairvaux. Il sera bon, en les lisant, de se rappeler que l’emploi des cierges était interdit par les anciennes coutumes cisterciennes 1761A sur les autels des saints; que les anciens Cisterciens ne se servaient que de lampes dans leurs églises; et qu’aux fêtes principales seulement, lorsque les reliques étaient mises sur le maître-autel, on y plaçait deux cierges, outre les deux lampes fixées au mur de chaque côté. (Cf. Nomast. Cist., Usus ord. Cist., cap. LIII, 137; LIX, 153; LXVII, 158. — Instit. cap. Gen.; cap. LXXXII, 271; IX, 277.)

Ms. XV de M. l’abbé Matthieu, p. 192. — «Ego Hilduinus Dei gratia Lingonensium Episcopus, omnibus tam presentibus quam futuris notum facio quod Philippus miles de Chaleta dedit Deo et fratribus Clarevallis quicquid habebat in omnibus utilitatibus apud Cunfin . . . . . idem Ph. et post ipsum heres eius perpetuo singulis annis in festo S. Bernardi offerent ecclesie Clarevallis cereum unum, valentem sex denarios Pruvinienses . . . . . Actum anno ab incarnatione Domini MCC secundo.»

Ibid., p. 71. — «Theobaldus comes Campanie et 1761B Brie Palatinus, omnibus in perpetuum. Audivi et miratus sum quod, monachis Clarevallensibus missas suas peculiares et privatas celebrantibus, luminare cereum non accendebatur sed solis accensis lampadibus celebrabant, superque frequenter evenire periculum contingebat. Volens igitur hoc periculum amovere, donavi eisdem fratribus Clarevallensibus in perpetuam elemosinam pro cera emenda ad hos usus, decem et octo libras annui redditus Pruviniensis monete percipiendas singulis annis in nundinis Barri de proventibus nundinarum. Ipsi autem fratres mihi concesserunt in verbo veritatis quod sine accensa candela cere de cetero non celebrabunt. Preterea donavi eisdem fratribus ad usum unius lampadis quadraginta solidos redditus percipiendos singulis annis in eisdem nundinis Barri; que quidem lampas ardebit semper et continue in illo loco qui dicitur Charnerium, ubi ossa fidelium in Claravalle decedentium requiescunt. Quod ut 1761C notum permaneat presentem feci cartam sigilli mei munimine roborari. Actum anno ab incarnatione Domini MCCXXII, mense Martio.» — Copiée sur une copie collationnée faite le 14 août 1664 par des notaires.

Ibid., p. 199. — «Ego . . . . . Decanus Christianitatis Barri super Albam, notum facio . . . . . quod cum in omnibus rebus mobilibus et immobilibus quas Constantius clericus de Villari, tenebat die quo presens conditum est instrumentum, fratres Clarevallis medietatem per omnia haberent ex donatione fratris Durandi monachi Clarevallis, sicut ipsi Clarevallenses dicebant et ipse Constantius frater dicti Durandi testabatur, etc . . . . reddat vero idem Constantius pro recognitione supradictorum cereum XII denariorum singulis annis B. Bernardo in festo ipsius . . . . . anno gratie MCCXXVII.»

— On trouve aussi le titre de cet engagement dans le cartulaire de Clairvaux (ms. no 703 de la 1761D bibliothèque publique de Troyes), sous la rubrique: Ultra-Albam, CL. compositio inter Constantium clericum de Villari et fratres Clarevallenses.

J’extrais de ce même cartulaire la pièce suivante, de l’année 1215, où il est question d’un cierge rendu sur l’autel de S. Bernard le jour de sa fête.

Bellus-Mons, XVI.

1762A «Petrus Prior S. Petri, B. Decanus Barri, Paganus Officialis Lingonensis et Humbertus Prepositus Barri, omnibus Litteras presentes inspecturis salutem in Domino. Noverit universitas vestra quod discordia vertebatur inter Abbatem et fratres Clarevallis ex una parte, et Garnerium filium fratris Philippi de Chaleta ex altera, eo quod idem Garnerius denegabat facere hominagium Abbati et fratribus Clarevallis de omnibus que dictus Garnerius habebat et possidebat apud Cunfin et in toto finagio eius, sicut pater eius fecerat dicto Abbati et fratribus Clarevallis, sicut continetur in autentico Domni Lingonensis Episcopi. Tandem idem Garnerius in presentia nostra constitutus, cognita veritate, amicabiliter recognovit quod dictum feodum tenebat et possidebat ab Abbate et fratribus Clarevallis, et pro recognitione dicti hominagii idem G. debebat reddere unum cereum VI denariorum sine dilatione singulis annis et crastinatione aliqua in festivitate 1762B sancti Bernardi, super altare ejusdem sancti. Pro eo autem quod denegavit hominagium supradictum facere dictis Abbati et fratribus sicut debebat, idem G. ad arbitrium B. Decani Barri et Erardi de Porta fecit emendam et reddidit illam Galterio et Evrardo Cellerariis Clarevallis. De aliis autem querelis quas inter se habebant promisit idem G. super sancta jurando quod staret iuri de cetero coram dicto Abbate et fratribus Clarevallis quocienscumque supradictus Abbas et fratres eidem G. diem assignarent competentem, sicut domini solent facere de feodis suis, et quicquid dictus Abbas et fratres Clarevallis aut per se aut per aliam idoneam personam ratione previa indicaverint, salvis cartis fratrum Clarevallensium tam de suprascriptis et querelis universis quas dictus Abbas et fratres habent adversus dictum G., quam de querelis similiter quas idem G. se habere intendit adversus predictos Abbatem et fratres Clarevallis, infra terminum constitutum, videlicet 1762C ad proximum Pascha, inviolabiliter observabit. Et sciendum quod supradictus Abbas et fratres Clarevallis non extrahent dictum G. extra castellariam Barri quamdiu idem G. supradictis conventionibus coram dicto Abbate et fratribus Clarevallis, vel mandato eorum juri stare noluerit. Si vero sepedictus G. suprascripto omnia deinceps bona fide custodire noluerit, quod absit! et ea firmiter tenere, dictus Abbas et fratres tamdiu dictum feodum et supradicta omnia in manu sua, nemine contradicente, tenebunt, quousque ex integro suprascriptas conventiones in curia Abbatis et fratrum Clarevallis dictus G. emendaverit competenter. Ut autem suprascripta omnia rata et inconcussa permaneant postulatione utriusque partis presentem cartam fecimus et sigillorum nostrorum impressione precepimus roborari. Actum anno gratie Mo. ducentesimo XVo.»

Ibid. p. 180. — «Ego Theobaldus Campanie et Brie comes Palatinus, notum facio universis tam 1762D presentibus quam futuris presentes litteras inspecturis quod Ego dedi ecclesie Clerevallis in puram et perpetuam elemosinam, pro salute anime mee, viginti libras Pruviniensium annui redditus pro cera emenda ad faciendum luminare missarum in dicta ecclesia Clarevallis . . . . . . . Actum anno gratie M. CC. tricesimo primo, mense Maio.»

1763A Ibid., p. 17. — (je fais l’analyse d’après le titre original sur parchemin conservé dans les archives de l’Aube.

Frère Jehans, abbé de Clerevaux, autorise une religieuse personne de son abbaye, mue de grant devotion . . . en l’honneur et en la révérence de la benoite Trinité de paradis, aussi pour sa grant fiance . . . . à ma Dame saincte Anne . . . . et aux benois martirs, c’est asavoir sainctz Eutrope, Zozime et Bonose, desquieux li précieux corps posent honorablement en l’église de Clairvaux à consacrer la somme de 60 francs d’or d’ou coing d’ou roy qu’elle avait par devers elle par son industrie et bonne provéance, à l’entretien perpétuel de jour et de nuit de la lampe 1764A placée devant l’autel de la sainte Trinité dans le choeur des convers, et à l’établissement de tels et semblables luminaires en cierges de cire comme nous avons acoustumey avoir devant le grant autel ou circuite d’icelli et en la dicte église aux festes de mon sieur sainct Malachie et de nostre glorieux père monsieur sainct Bernart.»

Ibid., p. 5. — Reconnaissance d’une donation faite aux religieux de Clairvaux depuis 16 ans environ par Jehan le Pitois, receveur des domaines et des aydes à Bar-sur-Aube, et par Simonette la Rotie sa femme, pour faire ardre la lampe devant N. S. et le corps de Monseigneur S. Bernard perpétuellement.

No 10. Plans de Clairvaux par dom Nicolas Milley.1763

1763B Les plans de Clairvaux par dom N. Milley forment trois grandes feuilles ainsi désignées: Archicoenobii Claraevallensis ichnographia. Tabula 1a. — Archicoenobii Claraevallensis ad occidentem prospectus. Tabula 2a. — Archicoenobii Claraevallensis ad 1764B meridiem prospectus. Tabula 3a. — On lit sur chacune d’elles: F N. Milley delineavit — C. Lucas D. S. sculpsit 1708. Un grand cartouche, placé dans le haut de la troisième feuille renferme l’inscription suivante:

ILLUSTRISSIMO AC REVERENDISSIMO DOMINO D. PETRO BOUCHU CLARAEVALLIS ABBATI: UNIVERSI ORDINIS CISTERCIENSIS PATRI PRIMARIO, NECNON TOTIUS CLARAEVALLENSIS FILIATIONIS SUPERIORI IMMEDIA TO: ATQUE VIGILANTISSIMO ETC. IN AETERNUM OBSERVANTIAE SUAE MONUMENTUM, TERGEMINUM DOMUS EJUS ARCHICOENOBII DIAGRAMMA OFFEREBAT ADDICTISSIMUS RELIGIOSUS FRATER NICOLAUS MILLEY: DE MORELIIS PROFESSUS, DE MORIS PRIOR. ANNO SALUTIS M. D. CC. VIII.

1763C Le cartouche est orné des armoiries de l’Abbé de Clairvaux, Dom Pierre Bouchu, de celles du comté de Champagne et de celles de saint Bernard.

Chaque plan est accompagné d’une légende latine et d’une légende française. On verra par le marché que je vais transcrire qu’ils furent imprimés à Clairvaux même.

1708, 17 Sept. — Nous soussignés sommes convenus de ce qui suit: C’est à sçavoir que moy Edme Thevenart maître imprimeur en taille douce, promets et m’oblige imprimer dans le logis de monseigneur l’abbé de Clairvaux trois planches de son abbaye: sçavoir un plan géométral et deux veues perspectives de laditte abbaye, à raison de huict livres par cent d’estampes, l’une portant l’autre; fourni la presse et généralement tout ce qui sera nécessaire pour ladicte impression, à laquelle je m’oblige de travailler par moy-même et non par autruy, sans 1763D aucune discontinuation, à commencer au premier jour d’octobre prochain; ce que moy Dom de Montaubon ay accepté, et promets payer ladicte somme de huict livres par cent des dictes estampes à fur d’ouvrage; fournir le papier, un lit et une chambre pendant le cours dudit travail. Fait double entre nous ce 17 septembre 1708. F. de Montaubon — Edme Thevenart

Une quittance placée au dos du marché ci-dessus fait connaître que Thevenart reçut 372 livres pour 4,600 exemplaires des plans qu’il tira, plus 52 livres 10 sous pour l’impression de 1575 inscriptions en français pour leur explication, à 3 livres 10 sous le cent (l’imprimeur négligea les 75 inscriptions en plus des 1,500), plus 35 sous pour papier gris ou maculatures. En tout Thevenart reçut 426 livres 5 sous, dont il donna quittance à l’abbé de Clairvaux, à Paris, le 7 mars 1709.

1764C Le 8 mars 1709 Marie Warangne donna quittance à Paris à Dom de Montaubon de la somme de 50 livres 9 sous, 6 deniers, prix de la rognure de 4,038 exemplaires des plans de Clairvaux. — Le 14 mars 1709 quittance de la même au même, de la somme de 4 livres, prix de la rognure de 1575 exemplaires des tables en français desdits plans.

La gravure de ces tables avait coûté 35 livres, 2 sous, 6 deniers, d’après la quittance suivante:

«J’ai reçu du R. P. Montaubon, procureur de M. l’abbé de Clairvaux la somme de 35 livres, 2 sous, 6 deniers, pour la gravure d’une table en français pour les plans de son abbaye; dont je le quitte, à Paris ce 19 février 1709. Berey.» — plus bas est écrit: Convenu a 1 sol par chaque mot gravé, et 1 sol pour 3 chiffres. (Ces quittances sont conservées dans les archives de l’Aube.)

Les plans de Clairvaux sont très-habilement gravés. On trouve dans le bas de la 3e feuille une représentation 1764D pittoresque de la grande tonne appelée Dolium majus, qui était renommée pour salaste capacité. Dom Joseph Meglinger en donne une description fort exacte. « . . . . In cellas vinarias descendimus, ubi inusitatae magnitudinis dolia cernuntur. Unum praesertim supra caetera diligentem observationem merebatur. Id cum a vino vacaret, et grande fundum januas apertas ostenderet, meam curiositatem invitavit ut me intruderem ad explorandam interiorem fabricam. Sed tenebrae nihil permittebant, nisi ut pedibus longitudinem experirer, quam quidem triginta pedum ab uno fundo ad aliud inveni, altitudinem vero octodecim. Nullis orbibus seu circulis ex betula, pro nostrorum doliorum more, vincitur; ingentes quatuor trabes per incisas in extremitatibus juncturas colligatae stipant repetitis sexies ordinibus longissimos quernos asseres: ubi deinde in quatuor juncturarum angulis desinente circulo trabes hiant, 1765A cuneis impletur vacuitas: ut sic tota illa machina inter harum arborum vincula, quasi in equuleo laxari pro usu arctarive possit.» (Iter Cist. p. 209.) d’après dom Le Boullenger (fragm. de l’hist. de Clairvaux. MS. IX de M. l’abbé Matthieu, p. 361), la grande cuve tenait 730 muids de vin. Dom Le Boullenger rapporte en cet endroit le miracle de la vigne 1766A plantée in vertice montis qui proximus est Claraevallis, par un religieux nommé Chrétien, et que les frères de saint Bernard avaient maudite (S. Bern. Op. Joh. Eremita II, 10). «On voyait encore, dit-il, cette vigne, il y a trente ans, on l’appelait la grande vigne» à cause du miracle par lequel le saint abbé avait fait cesser sa stérilité.

No 11. Sépultures du choeur de l’église de Clairvaux. — Guillaume Flammeng. — Recherches ordonnées par un abbé de Clairvaux pour s’assurer des noms des saints martyrs Eutrope, Zozime et Bonose.1765

1767A I. Capella in honorem SS. Marci, Lucae et Johannis evangelistae. — Fuit consecrata anno M. C. LVII.

II. SS. Jacobo, Philippo et Barnabae nuncupata.

III. SS. Apostolis Andreae, Simoni et Judae dicata. — Intra murum hujus sacelli, ex parte sinistra, sub fornice lapideo jacet corpus Domini Roberti, episcopi Lingonensis, postea Leodiensis. (Cf. Henriquez, Fasciculus SS. O. C., Dist. XLI, IV.)

IV. SS. Apostolis Petro et Paulo fuit adscripta.

V. S. SALVATORIS D. N. nomine decoratur. — In hoc sacello requiescunt quatuor beatorum exuviae.

A. Ex parte sinistra, sub arcu lapideo, intra murum tumulata, jacet B. Alix, mater S. P. N. Bernardi, cum superposita ejusdem effigie, quam sculpi curavit Joannes de Cabilone, Abbas Claraevallis, ann. M. D. VIII (Cf. Henriquez, Ibidem IV), ubi legitur: «Item etiam ibidem jacet piae recordationis nobilis Domina, et Deo devotissima Aleydis, mater Doctoris egregii et P. N. B. Bernardi, primi 1767B Claraevallis Abbatis: quae primo apud Divionem sepulturae tradita fuit in monasterio B. Benigni; postea vero, Domino volente et nobiscum pie agente, ad humilitatis nostrae excitandam et ampliandam devotionem, translata est usque Claramvallem, et coram altari S. Salvatoris collocata, anno Domini M. CC. L. XIV. Kal. April.» (Cf. Acta S. Bern. § LIX. — Gallia Christiana, tom. IV, col. 806. — Menol. Cist., 18 oct.)

B. Pone sepulchrum B. Alidis, ad dexteram, humi legitur in lapide duas inscriptiones deferente 1o in parte lapidis anteriori, intrantibusque idem sacellum viciniori: «Hic jacet Dominus Eschilus Dannemarchiae episcopus, postea monachus Claraevallis.» — 2o In citeriori ejusdem lapidis parte legere est: «Hic jacet Dominus Radulphus XVs Abbas Claraevallis, postea archiepiscopus Lugdunensis.» (Cf. Henriquez, Ibidem.)

C: In ipso ingressu ejusdem capellae tabulae marmoreae 1767C subpositum jacet corpus B. Garnerii IX Claraevallis Abbatis, postea Lingonensis episcopi. (Cf. Henriquez, Ibidem.)

VI. Sub S. Joannis Baptistae titulo dicata.

VII. SS. Stephani et Sebastiani nominibus praefulgens.

VIII . . . . .

IX. S. Mammetis et Desiderii sacra. — In ea capella jacet Dominus Adam monachus Claraevallis, postea episcopus Sorensis (écrit de la main de dom Le Boullenger).

On peut lire à la suite de la Vie de Mgr sainct Bernard, dévot chapelain de la Vierge (Paris et Troyes, in-4o, goth.) l’épitaphe en vers de la B. Aleth composée par Guillaume Flammeng, ancien chanoine de Langres, qui s’était retiré à Clairvaux. (Cette épitaphe a été reproduite par le P. Chifflet, S. Bern. gen. illustr. assert., p. 435.)

Je trouve sur ce personnage une pièce fort intéressante 1767D dans le ms. XV de M. l’abbé Matthieu, p. 251; en voici la copie: 1499, 22 février. — «Nos Frater Johannes (Jean de Chalon) Abbas Clarevallis, Cist. Ord. in Dioc. Lingon. totusque ejusdem loci conventus, universis presentes litteras inspecturis salutem in eo qui est omnium vera salus. Notum facimus quod in nostro Capitulo ad nostre ecclesie tractanda agenda negotia, ut moris est, specialiter congregati, et nostram considerationem dirigentes ad magnas virtutes, gratias, praeclara merita et vitae honestissimae famam venerabilis et scientifici viri, Magistri Guillelmi Flammeng, devotissimi praesbyteri et nuper canonici ecclesiae Lingonensis, nunc vero curati et rectoris parrochialis ecclesiae de Molano (Maulain, Haute-Marne) ejusdem dioecesis, et etiam ad veram et perfectam dilectionem, devotionem et verum amorem quem per multas experientias eum ad B. Patrem Nostrum 1768A Bernardum et ad hanc suam Clarevallensem ecclesiam certissime habere cognoscimus, Nos, in suis virtuosis exemplis fructum sperantes plurimum, ipsum quamdiu vixerit, aut nobiscum manere voluerit, in nostrum consortium et societatem, nostrorumque bonorum tam spiritualium quam temporalium participationem suscepimus, et presentium tenore suscipimus; ita quod ipse plenarie particeps sit omnium missarum, sacrificiorum, vigiliarum, orationum, jejuniorum, abstinentiarum, disciplinarum, caeterorumque divini cultus suffragiorum et bonorum spiritualium quae fiunt et divina largitione in posterum in ipso monasterio fient; et insuper sua vita comite victum nobiscum habeat, sicut unus religiosus sacerdos in mensa Abbatis, quando et quotiens sibi placuerit, aut in conventu si aliquando maluerit. In die vero obitus sui, cum Dominus ipsum vocare dignabitur, fient pro eo exsequiae et servitium sicut pro uno fratrum nostrorum 1768B religiosorum, et in eorum coemeterio sepelietur. Ipse vero praefatus Magister Guillelmus realem effectum suae verae ad Nos et Claramvallem dilectionis demonstrando, ne monasterio onerosus esse videatur, in praemissorum recognitionem ducentos francos bonae et fortis monetae Franciae et ultra manualiter Cellerario et Bursario hujus nostri monasterii tradidit, in usu, necessitatibus et agendis nostrae ecclesiae realiter et de facto expositis. De quorum vera et reali receptione tenemus nos pro contentis, et de ipsa summa eumdem Magistrum Guillelmum quitamus, et apud omnes quietum facere teneri promittimus. Et ad observationem omnium praemissorum Nos et successores nostros, nostrumque monasterium et omnia eius bona spiritualia obligamus, et cohertioni ecclesiastice et temporalis justiciae subjicimus. Datum sub appensione nostrorum sigillorum, XXII die mensis Februarii, anno Domini millesimo quadringentesimo 1768C nonagesimo nono, more Gallicano. — On lit en marge: Pro Domino Guillelmo Flammeng, canonico Lingonensi, editore unius vitae Patris nostri Bernardi, anno 1520, in septem libros partitae, per Johannem Lecoq.» — Demeurant à Clairvaux, il composa l’épitaphe de la B. Dame Aelis ou Aelet, mère de saint Bernard, et qui se voit près de son tombeau sur un grand cadre de bois, en 14 strophes, chacune de 8 vers. Elle fut renouvelée en 1747. (Cf. Brunet, Man. du libraire. — Biograph. univ., éd. Michaud, Supplém., art. de M. Weiss. — M. Carnandet, bibliothécaire de Chaumont, a annoncé la publication de la Vie et passion de Mgr sainct Didier, martir et évesque de Lengres, faicte par personnages, à la requeste de mes seigneurs les confrères de la confrarie dudict saint, audict Lengres, composée par vénérable et scientifique personne, Me Guillaume Flamang, chanoine dudict Lengres; jouée en ladicte cité par lesdicts confrères, l’ an 1482. 1768D Le ms. in-4o, de 300 feuillets, rel. en bois, est conservé dans la bibliothèque de Chaumont.

Cent seize acteurs figurent dans la pièce.)

En 1256, un moine de Clairvaux, nommé Godefroy, chargé de faire en Italie la visite des monastères de la Filiation, reçut ordre de son abbé, Etienne de Lexington, de prendre toutes les informations possibles sur les noms des SS. martyrs dont le cardinal Conrad avait donne les corps à l’église de Clairvaux. La relation de ce religieux nous est parvenue: elle se trouve dans le Ms. 401 (no 78, ro) de la Biblioth. publique de Troyes; l’écriture annonce la seconde moitié du treizième siècle. — La similitude des noms et un examen superficiel ont fait croire à Ch. de Visch (Biblioth. script. O. C) qu’il s’agissait de Geofroy, scribe de saint Bernard, IVe abbé de Clairvaux, et que ce moine avait écrit les Vies des SS. martyrs Eutrope, Zozime 1769A et Bonose: «scripsit et vitas SS. MM. Eutropii, Zozimae et Bonosae, quorum corpora in Claravalle quiescunt.» Mais Geofroy (IVe abbé de Clairvaux) devint scribe de S. Bernard en 1148, selon Casim. Oudin (de script. eccles.); il avait au moins vingt ans, par conséquent en 1256 il eût eu 128 ans. Ce n’était plus un âge à aller visiter les monastères éloignés. Casim. Oudin place sa mort vers 1210, environ. — D’ailleurs Godefroy n’écrivit pas les vies des saints martyrs; il rapporta seulement d’Italie la Passion de sainte Bonose, telle que les Bollandistes l’ont donnée au 15 juillet, avec un prologue qui manque dans leur collection, mais qui a paru trop peu intéressant pour être publié.

Quant aux recherches de Godefroy, elles offrent une preuve curieuse du soin que l’on mettait au moyen âge à vérifier les reliques. Elles méritent d’être données au public, pour montrer que les moines n’étaient pas d’une crédulité si grande et si 1769B naïve qu’on a bien voulu gratuitement le supposer.

Relation de Godefroy.

«Anno Domini Mo CCo LVIo, cum ego frater Godefridus, humilis monachus Clarevallis, destinatus essem ad partes Italiae, pro visitandis filiabus abbatie dicte Clarevallis, in curia Romana aliquamdiu moram traxi, R. P. ac D. Iohanni, titul. S. Laurentii in Lucina, presbitero cardinali, humiliter serviendo. Accedens igitur tunc temporis ad praefatam Curiam, vir religiosus ac Deum timens, Abbas de Rupe in Anglia mandatum michi detulit V. P. D. Stephani Abbatis Clarevallis, super facienda inquisitione diligenti et fideli de nominibus IV Martyrum BB. quorum corpora de civitate Portuensi, tempore Honorii Papae III, per virum religiosum, discretum et devotum monachum Clarevallis, 1769C nonnum (pro domnum, vid. Cang. Gloss.) Renierium de Sena, capellanum et procuratorem pie recordationis Conrardi cardinalis, tunc temporis Portuensis episcopi, ad dictam abbatiam decenter sunt apportata, et de predicti Domini Portuensis voluntate et mandato; quatinus in prefata abbatia Clarevallis cum debita devotione et reverentia in Christo colerentur, et honestius revererentur. Etenim civitas Portuensis ad tantam deducta erat exterminii desolationem, quod vix aliquid nisi ruinae tantum modo ibidem apparebant. Speciali siquidem praerogativa dilectionis, dictus Dominus Cardinalis dilexit Claramvallem, et quidem in eodem monasterio abbatis gessit officium, antequam ad cardinalatus apicem promoveretur. Quare prefatam abbatiam in Domino honorare, et ad devotionis amplitudinem pie provocare desiderans, non solum corpora martirum predictorum illuc transferri fecit, verum etiam proprii corporis ossa in ultima 1769D voluntate apud memoratam abbatiam deferri statuit, et ibidem sepeliri. — Mandato igitur Abbatis mei reverenter parere volens, ad praefatam civitatem Portuensem perrexi, viro honesto, devoto et discreto, Suppriore S. Anastasii, michi associato, ut sepedictorum martirum nomina diligenter ac reverenter inquirerem: prout tanti dignitas negocii postulabat. Cumque ad ecclesiam venissemus Cathedralem, 1770A sperantes nos ibidem de dictorum SS. nominibus posse certius edoceri, ad domum Archipresbyteri divertentes, servientem invenimus custodem domus ipsius Archipresbiteri; a quo nil certum reportantes, de ipsius consilio, Romam reversi fuimus; eo quod nobis expressit quod apud S. Clementem Archipresbiterum memoratum inveniremus, qui nos de eo quod querebamus reddere posset plenius certificatos. Quesivimus igitur et invenimus eumdem Archipresbiterum, virum siquidem discretum, devotum et circumspectum, qui libros quos Rome habuit, diligenter revolvens, quia secundum cordis sui desiderium, certitudinem tunc temporis veram reperire non potuit: sicut homo timoratus ad plenum nichil voluit diffinire. Ad multiplicem tamen precum nostrarum instantiam dictus Archipresbiter supradictam Portuensem adiens civitatem, perscrutatis studiose libris ecclesie cathedralis et aliis, Romam reversus, constanter et firmiter, 1770B et absque ulla hesitatione, asseruit BB. Martyres Eutropium, Zozimam et Bonosam, in altari ecclesie B. Laurentii memorate urbis quondam fuisse reconditos; quos, ab eodem altari, per dictum monachum Renierium de Sena extractos, memoratus Dominus Cardinalis Conrardus transferri fecit et transportari usque Claramvallem.

«Ego tamen, frater Godefridus, majorem adhuc certitudinem reportare desiderans, cepi diligenter inquirere si Rome esset aliqua ecclesia in honore predictorum martirum dedicata. Tandem intellecto quod trans Tiberim quedam ecclesia in honore B. Bonose erat edificata, in qua predicta virgo cum magna devotione venerabatur, gavisus sum gaudio magno valde; prefatamque adivi ecclesiam, et sacerdotem ipsius ecclesie, hominem senem, maturum et magne devotionis virum, de vita et passione dicte S. Virginis interrogans, responsum accepi ab eo, quod corpus dicte S. Martiris a suprascripto 1770C monacho Clarevallis Renierio Senensi de altari dicte ecclesie B. Laurentii sublatum extitit, tempore bone memorie Conrardi cardinalis, tunc episcopi Portuensis, et ab eodem monacho cum aliis sanctorum corporibus martirum Claramvallem delatum.

His igitur intellectis, per plures viros discretos, autenticos et maturos, certificatos et testificatos, dicte sacre virginis vitam et passionem michi accommodari propensius postulavi; et faciens eam scribi, Claramvallem eam mecum apportavi. Dictorum autem BB. MM. festivitas Idus Julii celebratur, prout in Martirologio evidenter exprimitur. Quia vero in Romanis partibus ulterius michi morari non licuit, de quarto martire tunc temporis ad plenum nequivi inquirere. Creditur tamen a quibusdam quod B. existat lacinctus, cujus natalis VIIo Kal. Aug. recolitur: sive B. Vincentius cujus festum IX Kal. junii agitur: sicut patet in Martirologio; super quibus 1770D certa veritas inveniri poterit, si loco et tempore diligentius inquiratur.»

La Passion de sainte Bonose, précédée d’un prologue, écrite sur un beau vélin d’Italie, est placée à la suite de la relation. On trouve après la Passion une copie des leçons VII, VIII, IX, tirée des Mss. de l’oratoire de Rome, contenant cette même passion, et qui avait été envoyée à dom Guyton, en 1744

No 12. Le cardinal Conrad.1769 I. Petite bulte du Pape Honorius III, du 6 oct. 1226, assurant à l’abbaye de Clairvaux la propriété inaliénable des reliques qui tui avaient été données par le cardinal Conrad.1769D

«Honorius Episcopus, Servus Servorum Dei, dilectis filiis Abbati et conventui Clare Vallis Cistercien. 1770D Ordinis salutem et apostolicam benedictionem. Retulit Nobis venerabilis frater noster C. Episcopus Portuensis se quasdam ecclesie vestre reliquias contulisse, et rogavit instanter ut inhibentes ne quis eas inde alienare presumat excommunicationis sententiam proferremus in eos qui nostre inhibitioni presumpserint contraire, quatenus qui hoc noverint a presumptione hujusmodi hoc 1771A saltem metu deterritis, ecclesia ipsa perpetua dictarum reliquiarum veneratione letetur. Nos igitur ipsius Episcopi precibus et caritate qua zelamur honorem ipsius ecclesie inclinati, auctoritate presentium districtius inhibemus ne quis ab ea sepedictas reliquias donando, vendendo, subripiendo, aut alio quolibet modo alienare presumat. Nulli ergo hominum liceat hanc paginam nostre inhibitionis infringere vel ei ausu temerario contraire. Si quis autem eandem inhibitionem sciens contra eam quoquomodo venire presumpserit, excommunicationis laqueo se noverit innodatum. Datum Lateran., II Non. octob. Pontificatus nostri anno XI.»

(Archives de l’Aube. — Parchemin — le sceau manque — fragments de lacs de soie rouge et jaune.)

II. Don de reliques et d’objets précieux fait à l’abbaye de Clairvaux par le cardinal Conrad.1771B

1227, août. — «Omnibus presentes litteras inspecturis Stephanus miseratione divina Basilice XII Apostolorum presbiter et Petrus Sancti Georgii ad velum aureum Cardinalis in uno salutari salutem. Noverit universitas vestra quod cum nobilis vir Eginus Comes de Vrach, Dominus de Friburg, frater venerabilis Patris nostri Domini Conradi Portuensis et sancte Rufine Episcopi, quendam lapidem preciosum et magnum qui vocatur jaspis undique ornatum lapidibus preciosis, ex cujus parte una est sculptum signum crucis, et ex alia parte est de ligno Domini in argento, et inter argentum et ipsum lapidem sunt diverse reliquie et duo cimmilia aurea ponderantia novem marcas, et textum evangelii in tabulis aureis, et missale in tabulis argenteis, et magnum calicem argenteum, et capsam argenteam cum ligno Domini ornatam lapidibus 1771C preciosis et ponderantem viginti quinque marcas, predicto episcopo pro ducentis marcis sterlingorum pignori obligarit: idem episcopus obtenta prius a Domino Papa licentia de rebus suis libere disponendi, omnem actionem et jus quod habebat in ipsis nomine pignoris, monasterio Clarevallis Cisterciensis Ordinis pro salute anime sue inter vivos concessit atque dicavit. Ita tamen ut ea omnia dicto comiti fratri suo restituere teneatur si ipse ducentas marcas bonorum sterlingorum libere restituerit monasterio supradicto. Ne vero de hiis valeat in posterum dubitari presentes litteras sigillorum nostrorum fecimus roborari. Actum Anagnie in presentia nostra, mense Augusti, Pontificatus Domini Gregorii Pape noni anno primo.»

(Archives de l’Aube. — Original sur parchemin; il ne reste qu’un fragment d’un les sceaux.)

III.1772A

1228. — «Domno in XPO reverendo. Abbati Clarevall. et universo ejusdem monasterii conventui Eginus, Comes de Vra et Dominus de Vriborc Salutem et paratum semper in omnibus pro posse obsequium. In primis gratiarum actiones referimus sanctitati vestre pro immensa et precipua reverentia quam Domino et fratri nostro pie recordationis quondam Portuensi Episcopo semper dum adhuc viveret impendere consuevistis; et nunc ad cumulum totius honorificentie ossa defuncti de terris peregrinis per industriam vestram sunt reportata et apud vos tumulata. Nos igitur caritatis ac fidelitatis tante zelum attendentes domui Clarevallensi perpetuis nos obligamus obsequiis, et accepta occasione impendemus: Ornamenta itaque ecclesiastica que apud vos sunt reposita, que et nos memorato fratri nostro in pignore pro ducentis marcis sterlingorum quandoque exposuimus, pro 1772B remedio anime ejusdem fratris nostri simul et anime nostre et aliorum parentum nostrorum, procurante Donno Bertholdo fratre nostro quondam Lucelensi Abbate, testimonio litterarum harum sigillo nostro subarratarum monasterio vestro jure perpetuo ac proprietario tradimus possidenda. Ut autem inter reliquum thesaurum ecclesie vestre predicta ornamenta noscantur, accipite intersignia. Est ibi tabula argentea gemmis interstincta, plenarium auro tectum et lapidibus preciosis insignitum, calix magnus gemmis ornatus et sacramentis que XPS in carne gessit opere interrasili fabrefactus, liber missalis laminis argenteis obductus, due pelves auree, rotula aurea preciosis reliquiarum pignoribus referta et nobilibus margaritis circulata. Dat. anno gratie M. CC. vicesimo octavo.»

(Archives de l’Aube. — Original sur parchemin — le sceau manque — lacs de soie rouge et verte.)

1772C Il existe, dans les Archives de l’Aube, une charte originale sur parchemin, du mois d’août 1227. Conradus miseratione divina Portuensis et sancte Rufine Episcopus . . . . . . . . . . . . . . . . . . mense Augusti, Pontificatus Domini Gregorii Pape noni anno primo — à laquelle pend le sceau bien conservé du cardinal Conrad. Il est attaché à des lemnisques de parchemin. Le cardinal, mitre en tête et revêtu de ses habits pontificaux, est assis sur un siége à têtes de lions. Il bénit de la main droite et tient sa crosse de la main gauche. Légende: SIGILL. CONRADI PORTVEN. ET. SCE. RVFINE. EPI.

Epitaphe du cardinal Conrad.

Le cardinal Conrad mourut à la croisade le 30 septembre 1227. D’après ses ordres, son corps fut rapporté en France et enterré à Clairvaux, non loin de saint Bernard. On lisait cette épitaphe au pied de son tombeau: HIC IACET DOMINVS CONRADVS QVI PRIMO VILLARIENSIS DEINDE CLARAVALLENSIS, POSTEA CISTERCIENSIS EXTITIT ABBAS ET DEMVM PORTVENSIS EPISCOPVS CARDINALIS. HIC CVM IN TRANSMARINIS PARTIBVS MORARETUR INSTANTISSIME PRAECEPIT VT CLARAM-VALLEM VBI IAM DVDVM SVAM ELEGERAT SEPULTVRAM OSSA SVA DEFERRENTVR ET IBIDEM SEPELIRENTVR, OBIIT AVTEM ANNO DOMINI M. CC. XXVII. PRIDIE KAL. OCTOBRIS. (Gallia Christ. t. IV, col. 992.)

1771D On trouve, dans la chronique de l’abbaye de Villers en Brabant une autre épitaphe du cardinal Conrad; elle est en vers, et il faut pour l’entendre une certaine étude.

Petit-Radel, plus versé dans la connaissance des 1772D monuments antiques que dans l’interprétation des textes du moyen âge, en parle ainsi dans l’Histoire. littéraire de la France, tom. XVIII, p. 13.

«Nous ne la transcrivons point ici, parce que la plupart des vers en sont barbares, inintelligibles, 1773A et que, d’ailleurs, elle ne nous parait offrir aucun interet, ni sous le rapport historique, ni sous le rapport littéraire.»

J’avoue qu’il était plus facile d’en porter ce jugement sévère que d’en bien saisir le sens: mais j’espère que mes efforts, pour la rendre moins inintelligible, la feront apparaître sous un jour plus favorable.

Petit Radel se trompe en disant (loco cit.) qu’elle était écrite sur la tombe du cardinal.

Jeu d’esprit de quelque moine, elle passa de la chronique de Villers (Thes. nov. anecdot. t. III, col. 1276) dans divers recueils (Menol. Cist., 30 sept. — Ughelli, Ital. sac., Portuenses Episcopi. — Manrique).

En voici le texte restitué d’après Henriquez, Ughelli, Manrique, le MS. 360 de la Bibliothèque Publique de Dijon, renfermant la Chronique de Villers (fin du XVIe ou commencement du XVIIe1773B siècle), et mes propres conjectures.

Vive, vide, fida ne fide fidatur in aevo,

Quo vir eas, caro quo vireas, quo pingere naevo;

Spica senum, culmus juvenum, sed et indolis herba

Impariter, sed par per iter sunt messis et herba.

5. Conrardum tot in alta gradum firmasse reclusum

Cerne solo, feriente celi jam pondere fusum.

Iam neque net, neque aratra tenet, cum praemia cernat;

Praecipuus flos Roma tuus super aethera vernat.

Planta ducum Villare tuum descendit in hortum:

10. Dehinc vacuum Bernarde tuum transfertur ad ortum.

Mox matris pater, immo patris pater Ordinis esse

Promeruit; demum meruit tibi Papa coesse.

Papae conradians Conrardus ei quasi soli

Luna rotunda fuit tibi testis Roma fidelis.

1773C 15. Hispida conrasit Conrardus corpora, barbam

Ordinis, Imperii collum, Romaeque coronam.

In claustro Daniel, Noë portu pontificatus,

Imperioque Joseph, modo Benjamin in paradiso.

Anno milleno bis centeno trinoveno

20. Luce sua Coelis manus hunc sepelit Michaelis.

J’en essaie une traduction paraphrasée; la seule qui permette de rendre les sens multiples cachés sous ces vers compliqués.

«Toi qui vis, vois (de peur qu’on ne se fie sur le temps avec trop d’assurance) où tu vas comine mortel, jusqu’à quand fleurit la chair, quelle marque fatale tu portes. Le vieillard semblable à l’épi mûr, le jeune homme pareil à la tige de blé, l’enlant que je compare à l’herbe, paraissent bien différents entre eux, mais cependant je les vois, suivant une voie commune, arriver comme l’herbe sous la faux du moissonneur. Ce Conrad, qui d’un 1773D pas assuré gravit au faîte des honneurs, vois-le enfermé dans la fosse, abattu sous le poids des coups du ciel. Ce beau lis ne file plus, il ne dirige plus le soc, puisqu’il recueille la récompense. Rome, ta plus belle fleur s’épanouit dans l’empyrée. La tige des ducs, ô Villers, descend dans ton jardin; puis elle est transplantée, ô Bernard, dans ton berceau vide. Conrad mérita bientôt d’être le père de sa mère; bien plus! il fut jugè digne d’être le père du père de l’ordre; enfin, ô Pape, il mérita de partager ton pouvoir. Conrad, éclairé des rayons du pape, fut pour ce soleil comme la lune dans sa plénitude, et tu le vis, ô Rome, en refléter fidèlement l’éclat semblable à l’arc que Dieu a placé dans le ciel. Conrad réprima l’hérésie au corps de bête fauve; il rétablit la ferveur chez les moines, semblables à de sages vieillards; il rendit au clergé séculier la majesté du commandement, et à Rome l’éclat de sa couronne. Vrai Daniel dans le cloître, Noë dans le 1774A port de son pontificat, Joseph en exerçant le commandement, maintenant il est Benjamin dans le ciel. L’an 1227 la main de Michel l’ensevelit pour les cieux parmi les dernières pompes de sa fête.

Un court commentaire justifiera, je l’espère du moins, mon essai de traduction.

Indolis au troisième vers a le sens d’enfant, d’adolescent. — Adolescens, puer, dit Du Cange dans son Glossaire.

Le cinquième vers fait une allusion générale aux grandes dignités dont Conrad avait été revêtu, et dont le détail se retrouvera plus loin.

Dans le sixième vers, celi est employé comme un ïambe, tandis qu’il forme réellement un spondée coeli. Cette faute contre les règles de la quantité s’expliquerait peut-être ici par l’orthographe du moyen âge qui écrivait celum pour coelum.

Feriente celi jam pondere fusum, se rapporte au trépas imprévu de Conrad, atteint à la croisade 1774B d’une fièvre mortelle.

L’auteur de l’épitaphe, je n’ose dire le poëte, ayant déjà comparé au troisième vers la vieillesse à un épi mûr, la jeunesse à une tige de blé et l’enfance à l’herbe, compare dans le septième vers Conrad aux lis des champs dont il est dit dans l’Evangile qu’ils ne filent ni ne labourent. (S. Matth., VI, 28. — S. Luc., XII, 27.)

Dans le huitième vers s’adressant à Rome, il appelle Conrad, qui était cardinal de la sainte Eglise Romaine et légat du Pape, sa plus belle fleur, son plus bel ornement.

Planta ducum au neuvième vers, rappelle la noble origine de Conrad.

Il était fils d’Egon ou Éginon d’Urach, comte de Furstenberg et de Fribourgen Brisgau. Par sa mère, Agnès ou Judith, fille de Berthold IV, duc de Zaehringen, i’l était le neveu de ce Berthold V qui fut à la veille d’être proclamé roi des Romains, et qui le 1774C laissa en otage aux mains de l’archevêque Adolphe de Cologne, sans payer, dit-on, sa rançon. (Cf. Henninges, theatr. genealog. t. IV, 286. — Hist. d’Allem. de Luden, trad. fr., Paris, 1844, t. V, 141. — Petit-Radel, trompé sans doute par le Gallia Christiana, t. III, col. 586, confond le duché de Zaehringen avec la Thuringe.)

Dans le même vers l’auteur s’adresse à l’abbaye de Villers en Brabant, dont Conrad était devenu abbé en 1209. (Gall. Christ., t. III, col. 586.)

Dans le dixième vers, il s’adresse à saint Bernard, et il fait entendre que Conrad devint abbé de Clairvaux, d’où se répandit sur le monde l’éclat des vertus de saint Bernard.

Conrad monta en 1214 sur le siége abbatial de Clairvaux, demeuré vacant la même année par la mort de Gui. (Gall. Christ., t. IV, col. 804.)

Il devint alors le père de sa mère — matris pater — 11e vers; l’abbaye de Villers étant de la filiation 1774D de Clairvaux.

Il devint ensuite le père du Père de l’Ordre — meême vers — lorsqu’il fut nommé Abbé de Cîteaux, en 1217. (Ibid., col. 991.)

Le 12e et le 13e vers se rapportent à l’élévation de Conrad au cardinalat par Honorius III en 1219. (Hist. Littér., p. 8.) Il était cardinal évêque de Porto, du titre de sainte Rufine.

Les vers 13 et 14 sont imités de ce passage du psaume LXXXVIII, 36 — «Et thronus ejus sicut sol in conspectu meo, et sicut luna perfecta in oeternum, et testis in coelo fidelis.»

Les vers 15 et 16 sont certainement de toute la pièce les plus difficiles à entendre. Conradere n’a pas précisément le sens que mon essai de traduction implique, mais il semble que l’auteur n’a employé conrasit au lieu de rasit que pour jouer sur le nom de Conrad.

1775A Ces deux vers me paraissent indiquer les travaux auxquels Conrad devenu légat du pape après son élévation au cardinalat, se livra en France pour réprimer l’hérésie des Albigeois, et en Allemagne pour réformer les moeurs du clergé (Labbe, Conc., XI, 294); le soin qu’il prit de faire fleurir la discipline parmi les moines, et le lustre que l’éclat de ses vertus jeta sur le sacré collége, dont il refusa de recevoir la tiare après la mort du pape Honorius III. Mais je ne donne ici mon interprétation qu’à titre de simple conjecture.

Les quatre derniers vers ne présentent plus rien d’embarrassant.

Au 17e vers — Noe portu pontificatus — l’auteur joue sur le nom de Porto dont Conrad était évêque.

1775B Le vers 19 marque l’année de la mort de Conrad arrivée en 1227.

Le dernier vers rappelle que Conrad quitta la 1776A terre pour aller au Ciel le 30 septembre, le lendemain de la fête de S. Michel archange. (Petit-Radel marque le jour de sa mort au 29 septembre, ce qui est contraire à tous les monuments.)

Plusieurs auteurs ont confondu le cardinal Conrad, de la famille des ducs de Zaehringen, avec un autre cardinal Conrad de Bavière, aussi moine de Clairvaux (le Gall. Christ., t. III, col. 586, tombe dans cette erreur qu’il a évitée au tome IV), créé cardinal en 1142 par Innocent II, et qui mourut à Bari, au retour de la croisade. Mais, suivant ces paroles de Mgr Louis d’Attichy dans ses Flores historiae sac. Collegii (Lut. Par., 1660, I, 264) «ignoscendus error, cum fuerit idem utriusque nomen, patria . . . . . . eadem dignitas et profectio.»

Le cardinal Conrad Conrad portait, d’après Jongelinus 1776B (Purpura D. Bern. Col. Agripp., 1644; 28), écartelé d’Urach et de Seyn, sur le tout de Furstenberg.

No 13 Note sur les prétendus embellissemeuts de l’église et de l’abbaye de Clairvaux au XVIIIe siècle.1775

1775B «Entre plusieurs dépenses que fit pour la décoration de son abbaye, dit l’Histoire abrégée des Abbés de Clairvaux, on remarque un magnifique portail qu’il fit pour son église, un orgue, des autels de marbre, de beaux grillages, des statues enrichies d’une sculpture achevée, une cour abbatiale.» (MS. IX de M. l’abbé Matthieu, p. 342.)

De 1729 à 1736 on sculpta les nouvelles stalles de l’église.

Les anciennes avaient été enlevées par son prédécesseur, 1775C Dom Pierre Bouchu. Les Bénédictins, dans leur Voyage Littéraire, sont loin d’approuver ce changement. Voici dans quels termes ils en parlent: «L’église est grande, spacieuse et belle, mais simple et sans beaucoup d’ornemens. La nef étoit autrefois remplie de trois rangs de chaires de chaque côté, pour placer les frères convers durant l’office, et par le nombre des chaires, on juge qu’il y avoit autrefois près de trois cens frères convers à Clairvaux. Depuis peu d’années on les a toutes ôtées, et on s’est contenté d’en conserver un petit nombre sous l’orgue à l’entrée de l’église, où est aujourd’hui le choeur des frères convers. L’église en est assurément plus dégagée, mais beaucoup de personnes croient que cette antiquité retranchée la rendoit plus vénérable. La nef est suivie du choeur des infirmes, et celui-cy du choeur des religieux qui n’a rien que de simple, mais c’est une simplicité qui a quelque chose de grand.» (Voy. Littér. 1717, 1775D 1re part., p. 99.)

Les Bénédictins avaient pu lire à Clairvaux cette sorte d’inscription citée par dom Le Boullenger (MS. XV de M. l’abbé Matthieu, p. 542), d’après un ancien commentaire manuscrit sur la règle de S. Benoît conservé dans la bibliothèque de l’abbaye.

Hic ponuntur stalla ecclesie Clarevallis.

1776B In superiori et inferiori choro presbyterorum Centum quadraginta quatuor stalla. In superiori et inferiori choro infirmorum sunt Triginta tria stalla. In retro choro conversorum sunt Trecenta quinquaginta unum stalla.

Et extra predictos choros solebant esse ducenta

Octoginta septem stalla.

Et sic in totali summa solebant esse octocentum

Quindecim sedes seu stalla in ecclesia Clarevallis.

Je trouve dans les Archives de l’Aube divers marchés 1776C relatifs à la décoration de l’église de Clairvaux, que je me contente d’indiquer ici.

1736, 12 janvier. — Marché avec un fondeur de Langres pour 12 pupitres et un aigle en cuivre. — La dernière quittance est du 25 déc. 1738.

1737. — Statues de la Sainte Vierge et de saint Robert; — Marché de deux chapelles et autels en marbre.

1738, 19 août. — Devis et marché pour la construction en marbre du maitre-autel de l’église de Clairvaux. Il devait être posé le 1er nov. 1739; le prix en était de 3,050 livres. — Quittance du 5 février 1740.

1739, 22 mars. — Marché avec un serrurier de Paris pour les grilles en fer du choeur et celles de 4 chapelles situées en face de la croisée de 1776D l’église. — Quittance du 17 nov. 1740.

L’orgue mérite que je lui consacre une notice spéciale.

En 1731, le 20 janvier, Dom François Fauvre, prieur de N.-D.-des-Rosiers et procureur de l’abbaye de Clairvaux, conclut avec Jacques Cochu, 1777A facteur d’orgues, demeurant à Châlons-sur. Marne, un marché par lequel ce dernier s’engageait à exécuter, moyennant 1,550 livres, un positif de 8 pieds en montre, et de 16 jeux.

Montre de 8 pieds.

Bourdon de 8 pieds.

Prestant de 4 pieds

Flûte de 4 pieds.

Cornet.

Nazard.

Quarte de nazard.

Doublette.

Tierce.

Fourniture.

Cimballe.

Larigot.

Trompette de 8 pieds.

Cromorne de 8 pieds.

Clairon de 4 pieds.

Voix humaine de 8 pieds.

Tremblant et tiralle.

Tous les matériaux, tels que bois, étain, plomb, cuivre, etc. devaient être fournis au facteur; on le nourrissait avec son compagnon comme les religieux, sauf la collation qui était remplacée par le souper. L’époque de la remise de l’ouvrage n’était pas fixée, mais on arrêtait qu’il serait commencé au 1777B premier avril au plus tard, pour être poursuivi sans interruption.

Le 20 juillet 1732, Dom Fauvre et Jacques Cochu concluaient un nouveau marché. Cette fois il s’agissait du grand orgue, que Cochu promettait de rendre dans quatre ans et quelques mois, moyennant une somme de 6,000 livres. Les conditions étaient à peu près les mêmes que celles dont ils étaient convenus pour la facture du positif; seulement il est parlé de 4 compagnons, et Cochu se réserve six semaines par an pour aller vaquer à ses affaires particulières, quand besoin y sera. Le positif n’était pas encore achevé; on devait le terminer avant d’entreprendre la construction du grand orgue.

Voici le détail du devis:

1o Faire 6 soufflets de bois de chêne de 6 pieds 4 pouces de longueur, sur trois pieds et demi de largeur, dont les plis et tables seront bien garnis: 1777C les rendre bien étanchez avec les chassis, gosiers, bascules et portevents pour conduire aux sommiers.

2o Plus, faire 4 parties de sommier pour le grand clavier, lesquels seront de bois de chêne, pour y poser les jeux ci-après détaillés; dont lesdits sommiers seront sans emprunts, communications, et bien étanchez.

3o Plus, faire un clavier de 50 touches d’étendue, bois de chêne, plaquées d’ébène, et les feintes plaquées d’ivoire; ledit clavier montant jusqu’au d la ré en haut, compris l’ut dièze.

4o Faire et construire tous les mouvements et abrégés, et les rendre bien libres.

5o Faire une montre détain polie et brunie, sonnant et résonnant 16 pieds.

6o Faire un bourdon de 8 pieds bouchés, savoir: 26 tuyaux d’en bas de bois de chêne, et tout ce qui suit jusqu’en haut, tous les corps et pieds d’étoffe; 1777D ledit bourdon sonnant 16 pieds: unisson à la montre.

7o Faire une flûte de 8 pieds ouverts, sçavoir: 26 tuyaux d’en bas de bois de chêne, et tout ce qui suit jusqu’en haut, tous les corps et pieds d’étoffe; ladite flûte sonnant à l’octave de la montre.

8o Faire un huit pieds, dont il sera pris une partie dans la montre, et le reste sera en dedans; tous les corps d’étain sur pied d’étoffe; ledit huit pieds sonnant à l’octave de la montre.

9o Faire un petit bourdon de 4 pieds bouchés, dont 14 d’en bas seront de bois de chêne, et tout ce qui suit jusqu’en haut, tous les corps et pieds d’étoffe; ledit bourdon sonnant 8 pieds.

10o Faire un cornet de 27 touches d’étendue, commençant à la clef d’ut jusqu’en d la ré en haut; ledit cornet sera composé de 5 tuyaux sur chaque touche, sçavoir: bourdon, flûte, nazard, quarte et 1778A tierce; lesquels tuyaux seront tous les corps et pieds d’étoffe.

11o Faire un prestant; tous les corps d’étain sur pieds d’étoffe; ledit prestant sonnant quatre pieds.

12o Faire une grosse tierce, tous les corps et pieds d’étoffe; ladite tierce sonnant à la tierce du prestant.

13o Faire un nazard, tous les corps et pieds d’étoffe, sonnant à la quinte du prestant.

14o Faire une quarte de nazard, tous les corps et pieds d’étoffe, sonnant à l’octave du prestant.

15o Faire une petite tierce, tous les corps et pieds d’étoffe; ladite tierce sonnant à la tierce de la doublette.

16o Faire une grosse fourniture de deux tuyaux sur chaque touche, tous les corps d’étain et pieds d’étoffe.

17o Faire une petite fourniture de quatre tuyaux sur chaque touche, tous les corps détain sur pieds 1778B d’étoffe.

18o Faire une cymbale de quatre tuyaux sur chaque touche, tous les corps d’étain sur pieds d’étoffe.

19o Faire une bombarde, tous les corps d’étain, anches et languettes de cuivre, rasette de fil de fer, coins de bois, noyaux et pieds d’étoffe; ledit jeu sonnant 16 pieds.

20oFaire une trompette, tous les corps d’étain, anches et languettes de cuivre, rasette de fil de fer, coins de bois, noyaux et pieds d’étoffe; ladite trompette sonnant huit pieds.

21o Faire un cromorne, tous les corps et pointes d’étain, anches et languettes de cuivre, rasettes de fil de fer, coins de bois, noyaux et pieds d’étoffe; ledit cromorne sonnant 8 pieds à l’unisson de la trompette.

22o Faire un clairon, tous les corps d’étain, anches et languettes de cuivre, rasettes de fil de fer, 1778C coins de bois, noyaux et pieds d’étoffe; ledit clairon sonnant à l’octave de la trompette.

23o Faire une voix humaine, tous les corps et pointes d’étain, anches et languettes de cuivre, rasettes de fil de fer, coins de bois, noyaux et pieds d’étoffe; ladite voix humaine sonnant huit pieds.

24o Faire un cornet de récit de 27 touches d’étendue, commençant à la clef de C-sol-ut jusqu’en D-la-ré en haut, composé de cinq tuyaux sur chaque touche, sçavoir: bourdon, flûte, nazard, quarte et tierce, tous les corps et pieds d’étoffe; le clavier sera de bois de chêne, plaqué d’ébène, et les feintes plaquées d’ivoire.

25o Faire une trompette de récit de 27 tuyaux sur le même clavier, tous les corps d’étain, anches et languettes de cuivre, rasettes de fil de fer, noyaux et pieds d’étoffe.

26o (Echo composé de 8 jeux.) Faire et construire un sommier d’écho de 39 gravures d’étendue, pour 1778D y poser les jeux ci-après dénommés, qui sera de bois de chêne, sans emprunt ni communications, bien étanché; construire toutes les bascules et mouvements, avec son clavier de bois de chêne plaqué d’ébène, et les feintes plaquées d’ivoire; ledit clavier commençant à C-sol-ut de la clef de fa, et continuer jusqu’en D-la-ré en haut.

1o Faire un bourdon, tous les corps et pieds d’étoffe.

2o Faire un prestant, tous les corps d’étain sur pieds d’étoffe.

3o Faire un nazard, tous les corps et pieds d’étoffe.

4o Faire une quarte de nazard, tous les corps et pieds d’étoffe.

5o Faire une doublette, tous les corps d’étain sur pieds d’étoffe.

6oFaire une fourniture de trois tuyaux sur chaque 1779A touche, tous les corps d’étain sur pieds d’étoffe.

7o Faire une cymbale de deux tuyaux sur chaque touche, tous les corps d’étain sur pieds d’étoffe.

8o Faire un cromorne, tous les corps et pointes d’étain, anches et languettes de cuivre, rasette de fil de fer, coins de bois, noyaux et pieds d’étoffe.

26o Faire et construire deux parties de sommier de pédale de 32 gravures d’étendue, qui seront de bois de chêne, sans emprunt ni communications, avec leurs mouvements et abrégés bien libres, et le marchepied de 32 touches d’étendue à commencer à F-ut-fa du ravalement, jusqu’à la clef de C-sol-ut.

1o Faire une pédale de flûte de 8 pieds avec son ravalement, laquelle sera toute de bois de chêne.

2o Faire une pédale de flûte de 4 pieds, sçavoir: l’octave d’en bas de bois de chêne, et tout ce qui suit jusqu’en haut, tous les corps et pieds d’étoffe.

3o Faire une pédale de trompette, tous les corps 1779B d’étain, anches et languettes de cuivre, rasettes de fil de fer, coins de bois, noyaux et pieds d’étoffe.

4o Faire une pédale de clairon, tous les corps d’étain, anches et languettes de cuivre, rasettes de fil de fer, coins bois, noyaux et pieds d’étoffe.

27o Faire un tremblant à vent perdu; faire un tremblant à vent lent.

Pour le positif comme pour le grand orgue, Cochu ne se chargea pas du buffet, de la menuiserie, de la sculpture et des ouvrages en fer; j’ignore par qui et à quelles conditions ils furent exécutés. Un maître Jean Gillot de Langres fit, moyennant 800 livres, la balustrade de la tribune, composée de 20 balustres, pour laquelle on lui fournit 1,233 livres de cuivre. Son marché est du 3 juin 1735, et la quittance finale du 12 janvier 1736.

Cette même année le grand orgue se trouvait terminé. Dom Nicolas Similiart, religieux profès de Signy, organiste, et Bénigne Balbastre, organiste 1779C de la cathédrale et autres églises de la ville de Dijon, experts nommés par les religieux de Clairvaux, passèrent quatre jours à examiner le travail de Cochu. II fut déclaré bon et recevable le 29 mars 1736, et le 7 avril suivant le facteur donna sa quittance finale.

Clairvaux jouit de son orgue pendant cinquantesix ans. Le 10 février 1792, l’abbaye passa entre les mains de nouveaux maîtres. Ils devaient conserver l’orgue et ses accessoires, jusqu’à ce qu’ils fussent enlevés par l’administration, qui se les était réservés avec plusieurs autres objets.

Des affiches apposées dans le district de Bar-sur-Aube et dans les villes importantes des départements voisins, annoncèrent bientôt que l’orgue de Clairvaux était à vendre, et que l’adjudication s’en ferait à Bar-sur-Aube, le 10 septembre 1792.

Cette nouvelle émut les marguilliers de la cathédrale de Troyes. Ils exposèrent (10 août 1792) aux administrateurs du département que l’orgue de 1779D Saint-Pierre, placé mesquinement entre deux piliers du choeur, ne répondait pas à la beauté du vaisseau; que la vente de l’orgue de Clairvaux produirait un mince bénéfice, et que sa véritable place était à la cathédrale, dans une tribune qui serait construite au-dessus de la porte principale.

L’évêque constitutionnel, Augustin Sibille, signa la requête des marguilliers. Le directoire du département la renvoya au directoire du district de Troyes.

Ce dernier, considérant que l’orgue de Clairvaux devait être mis au nombre des ouvrages d’art, dont la conservation était dans les principes et les lois de l’Assemblée Nationale; que d’ailleurs la vente annoncée ne produirait à la nation qu’une somme médiocre, consentit à la demande des marguilliers, à la condition que la fabrique supporterait tous les frais 1780A et il l’autorisa à vendre le vieil orgue de Saint-Pierre pour couvrir une partie de la dépense. (18 août 1792.)

Le 29 août 1792, le directoire du département ratifia la décision du directoire du district de Troyes, et il commit le sieur Richard, facteur d’orgues de Nancy, pour diriger les travaux de déplacement et de reconstruction. Il décida en outre que son arrêté ne recevrait d’exécution qu’après avoir été approuvé par le ministre de l’intérieur, auquel on en adressa l’expédition le 14 novembre suivant.

Le ministre de l’intérieur faisait attendre sa réponse. Cependant l’acquéreur de l’abbaye de Clairvaux réclamait l’enlèvement des objets mobiliers réservés lors de la vente, et qu’il était tenu de conserver. Il avait, disait-il dans sa pétition au directoire du département (6 janvier 1793), il avait rempli cette obligation avec la plus scrupuleuse exactitude, 1780B et avec d’autant plus de raison, que ces objets ne l’avaient que peu gêné jusqu’alors; mais il se proposait d’établir une verrerie dans l’église du monastère, et il prévenait l’administration que le feu, la fumée et les mouvements de nombreux ouvriers pourraient causer un grand préjudice à l’orgue, qui se détériorait déjà. D’un autre côté, le directoire du district de Bar-sur-Aube demandait qu’on le débarrassât de la surveillance de cet instrument précieux, qui se dégradait nécessairement par le défaut d’exercice et du soin qu’un organiste seul eût pu apporter à sa conservation. (31 janvier 1793.)

La réponse du ministre n’arrivant pas, le directoire du département considéra son silence comme une désapprobation de son arrêté du 29 août 1792, et faisant droit aux réclamations de l’adjudicataire de C airvaux, il arrêta, le 11 février 1793, que l’orgue serait vendu à Bar-sur-Aube, suivant la forme 1780C prescrite par la loi.

De nouvelles affiches furent apposées, fixant la vente au 12 mars suivant. Elle eut lieu ce même jour, et l’orgue fut adjugé, moyennant la somme de 12,500 livres, au sieur Bernard Lécuyer, entrepreneur de bâtiments, demeurant à Bar-sur-Aube, sous le cautionnement du sieur Joachim Girardon.

Le 24 mars 1793, le ministre de l’intérieur répondit enfin qu’il ne voyait aucun inconvénient à ce que l’orgue de Clairvaux fût accordé à la commune de Troyes, à la charge par elle de supporter les frais de placement et de déplacement.

Les citoyens Lécuyer et Girardon n’eurent pas plus tôt connu la lettre du ministre qu’ils proposerent aux administrateurs du département de résilier purement et simplement la vente qui leur avait été faite, en les déchargeant du payement du prix de l’adjudication, voulant concourir, autant qu’il était en leur pouvoir, à l’embellissement de l’église principale du département, et à la conservation d’un 1780D monument des arts.

Après l’accomplissement de diverses formalités administratives, le directoire du département de l’Aube accepta, le 19 juin 1793, la résiliation offerte par les adjudicataires, et autorisa la municipalité de Troyes à faire transporter l’orgue en question de l’église de la ci-devant abbaye de Clairvaux dans celle de St-Pierre de Troyes; a la charge par elle d’entretenir ledit orgue, sans néanmoins que cela puisse nuire au droit de propriété de la nation sur ledit orgue dont la municipalité de Troyes ne pourra disposer en aucune manière sans l’approbation de la nation.

Avant la destruction de l’abbaye de Clairvaux, Réné, fils de Jacques Cochu, avait aidé son père à perfectionner son oeuvre: il fut choisi naturellement pour amener l’orgue à Troyes. Il le démonta, en numérota toutes les pièces, et il les déposa 1781A dans la cathédrale, sous la tour St-Paul. Les graves événements qui se succédèrent depuis cette époque firent oublier l’orgue pendant bien des années, et quand on se souvint de l’existence de ce bel instrument, la poussière et l’humidité lui avaient déjà porté de graves atteintes.

Le 19 brumaire an XII (11 novembre 1803), la fabrique de St-Pierre se trouva légalement constituée. Les premières pensées des administrateurs qui la composaient, furent pour l’orgue et pour sa restauration. L’archevêque-évêque, le préfet, le maire promirent de seconder leurs efforts; mais les ressources dont ils pouvaient disposer ne répondaient pas à la grandeur de l’entreprise. Ils résolurent alors d’en appeler à la générosité du public, et, le 23 avril 1804, une souscription fut ouverte pour la restauration et l’établissement de l’orgue de Clairvaux en l’église cathédrale de St-Pierre de Troyes. J’ignore ce qu’elle produisit.

1781B Le 21 août 1805, la fabrique, qui avait obtenu la coupe de la réserve de ses bois, fut autorisée à appliquer une partie de la somme qui lui en reviendrait par la vente, à la construction d’une tribune destinée à supporter l’orgue. On prit des arrangements provisoires avec Réné Cochu, et, grâce aux fonds avancés par quelques marguilliers, les travaux commencèrent sous la direction de M. Vaudé, architecte.

Le devis de la tribune montait à 34,567 francs 81 centimes. Au mois de mai 1807, les deux tiers environ de l’ouvrage étaient achevés. Réné Cochu avait présenté son devis à la fabrique, le 2 janvier de la même année: il s’élevait à 11,050 francs. Le 3 décembre, il s’engagea, aux conditions fixées par lui, à réparer l’orgue, à le poser sur la tribune et à le mettre en état d’être touché le 20 avril de l’année suivante au plus tard.

Au mois de mai 1808, la tribune était terminée, 1781C et l’orgue y était rétabli dans sa beauté première. M. Nicolas Séjean, organiste de l’église St-Sulpice, à Paris, vint examiner le travail de Cochu. Il en rendit le compte le plus favorable. (10 juillet.) Il remarqua particulièrement la disposition ingénieuse de la soufflerie, qui peut être mise en mouvement par un enfant au moyen d’un seul balancier. Il estima enfin que la fabrique devait payer à Cochu, outre la somme convenue, une somme de 500 francs pour les changements et augmentations en jeux de basses, de serpent de 23 tuyaux, de clarinette et de haut-bois de 30 tuyaux.

«Dom Pierre Mayeur, dit l’Histoire abrégée des Abbés de Clairvaux (ms IX de M. l’abbé Matthieu, p. 342), fit construire à grands frais le superbe cloître des religieux, le refectoire, la boulangerie, les dortoirs; il employa des sommes immenses pour décorer l’abbaye.»

C’est à son règne que se rapporte la pièce suivante:

1781D Ms. XV, de M. l’abbé Matthieu. p. 617. — Tombeaux ouverts dans l’église de Clairvaux, croisée du côté du septentrion et cimetière des religieux au-devant de la chapelle de tous les saints. Il y 1782A avoit 6 pierres ou tombes sépulcrales auxquelles répondaient 5 figures en peinture sur la muraille plus bas, de cinq évêques; et une plus petite pierre taillée en coeur, couvrant le coeur de Dom Tristand de Bizet, moine de Clairvaux, natif de Troyes, Abbé de Signy, puis évêque de Xaintes, mort et enterré au collége des Bernardins, à Paris, dont on a envoyé le coeur à Clairvaux. Ces 6 pierres surpassaient le pavé de 4 à 5 pouces. On a changé en l’an 1751 le pavé qui étoit de carreaux de briques en grands carreaux de pierre. Pour lors on a ôté et tiré dehors les dites pierres sépulchrales, ce qui a donné lieu à découvrir les 5 pierres creusées et taillées en coffres, dans les quelles on avoit mis les corps des cinq évêques, couverts chacun d’une pierre plate de la longueur et largeur dudit coffre. On a trouvé dans les cinq quelques ossements pourris; des lambeaux de vêtements pourris; des crosses de bois pourries; des cuirs pourris, mais sans 1782B aucun écrit dans 4 de ces coffres ou cercueils. Pour le cinquième qui étoit au milieu, on y a retrouvé et retiré une plaque de plomb d’environ 8 pouces de longueur et 5 à 6 pouces de largeur, laquelle en écriture gravée en 8 lignes dont les dernières sont un peu mangées, porte ce qui suit:

† Sexto idus novembris. pie memorie Dns Godefridus. Eps Lingonensis hoc in loco sco fine quievit. Vbi et inunctus fuerat. Et divinis sacramentis munitus per ministerium Dni Alani Epi Autissiodorensis. Et ablutus in conventu per manus Eporum . . . . . et Autissiod. Et Abbatum honorifice tumulatus.

On voit par là que Godefroi reçut l’extrême-onction et le saint viatique dans l’église. Pour le coeur de l’évêque de Xaintes, enfermé dans un coeur de plomb tout embaumé, on l’a laissé en terre comme il étoit; les cercueils aussi laissés comme ils étaient et recouverts de leur pierre. Et pour les pierres 1782C qui excédaient le carrelage, on les a tirées hors de l’église: on a mis en leur place, à fleur du pavé, des plaques de marbre noir sur lesquelles on a gravé les noms, qualités, dignités de chaque évêque, et des lieux de leur évêché.

Le 8 septembre 1771, on exhuma les corps de 24 Abbés de Clairvaux et les coeurs de 2 Abbés de ce monastère, placés dans l’ancien cloître, et on les déposa solennellement après la messe de communauté, le 11 du même mois, dans lex deux collatéraux de l’église, suivant leur rang.

On ne put exhumer le corps de S. Robert, deuxième Abbé de Clairvaux, attendu qu’après avoir ouvert sa tombe placée sous le premier arceau du cloître, on trouva ses ossements entièrement consommés. (Extr. du procès-verb. d’exhumation et d’inhumation rédigé et signé par les religieux. — Arch. de l’Aube.)

Je trouve dans les Archives de l’Aube un marché 1782D passé le 2 mai 1780, avec un Italien pour blanchir tout l’intérieur de l’église de Clairvaux, et tirer en carreaux toutes les voûtes, piliers et colonnes, moyennant 1500 livres.

No 14. Chapelle des comtes de Flandre.1781

1781D La chapelle dite des comtes de Flandre était située 1782D à peu de distance de l’extrémité est de l’église 1783A de Clairvaux, et orientée comme elle. La tradition du monastère attribuait sa construction à Philippe, comte de Flandre, mort au siége d’Acre le 1er juin 1191 (Art de vérifier les dates), et la lui faisait bâtir dans cette année même. Il m’a paru intéressant de discuter en peu de mots ces deux points.

Avant d’adresser une requête au roi pour obtenir la permission de transférer les ossements contenus dans cette chapelle, on chargea dom Le Boullenger, archiviste de l’abbaye, de rechercher son origine. Le travail du religieux nous est parvenu, et c’est ce petit mémoire que je vais examiner (Archives de l’Aube).

Dom Le Boullenger commence par avouer que les archives de Clairvaux ne lui ont fourni aucun renseignement; et c’est au moyen des imprimés qu’il établit sa thèse. Il s’appuie particulièrement sur l’épitaphe du comte Philippe, rapportée dans Henriquez, sur le P. Martène, dans ses Anecdota, et sur 1783B le Journal de Trévoux (1739 août), pour prouver que la chapelle fut bâtie par le comte Philippe, et l’année même de sa mort. Il cite aussi victorieusement une attestation, donnée le 13 février 1544 par les moines de Clairvaux, dans laquelle on lisait: «capella constructa est per illustrissimum Philippum comitem Flandriae.»

Discutons brièvement la valeur de ces autorités:

1o L’épitaphe tirée du livre des sépultures porte en effet que la chapelle avait été construite par le comte de Flandre pour lui et sa femme: « . . . diligentia uxoris suae Mathildis translatus est Claramvallem, ac reconditus honorifice intra hanc capellam, quam illi et sibi paraverat.» (Henriquez, Fasciculus SS. O. C., tom. II, Dist. XLI, VI.)

Mais, pour tirer’une conclusion certaine de ce texte, il faudrait établir l’antiquité du livre des sépultures, tel qu’il a été publié par Henriquez; et cette antiquité est du moins fort douteuse. Je sais 1783C que Ch. de Visch (Biblioth. script. O. C.) attribue à Geofroy, IVe abbé de Clairvaux et scribe de S. Bernard, la composition de ce livre: «huic attribuitur liber de personis illustribus in Claravalle sepultis, qui inscribi solet Liber sepulchrorum.» Mais c’est une simple assertion, d’autant moins prouvée à l’égard du texte donné par Henriquez, que ce dernier n’a cité aucun nom d’auteur.

Il est presque superflu de faire remarquer que Geofroy n’aurait composé qu’une très petite partie du Livre des Sépultures, et qu’il se serait grandement accru après sa mort.

D’ailleurs Henriquez a lui-même rectifié l’assertion de l’épitaphe dans le Ménologe de Cîteaux, où il écrit au 12 août, en parlant de la chapelle des comtes de Flandre: «Hanc sibi construxerat Mathildis vidua Philippi Elsatii Flandriae comitis.»

2o Le P. Martène n’est entré dans aucune discussion sur l’auteur de la chapelle et sur l’époque de 1783D sa construction; il a seulement publié deux chartes dont nous ferons mention un peu plus loin.

3o Le Journal de Trévoux ayant rapporté une tradition, sans la discuter, il ne peut être invoqué en témoignage, pas plus que l’attestation des moines.

Au reste, une erreur grave sur un point facile à vérifier, dans laquelle tombèrent le Journal de Trévoux, dom Le Boullenger, et sur sa foi, les religieux de Clairvaux dans leur requête, montre qu’ils ont pu se tromper en d’autres points d’une vérification moins aisée. Cette erreur consiste à avoir donné au comte Philippe et à Mathilde une fille Agnès, qu’ils n’ont jamais eue.

«On voit dans la même chapelle, dit dom Le Boullenger, le tombeau d’Agnès, comtesse de Champagne, fille du comte Philippe et de Mathilde.»

La requête au roi en dit autant, et le procès-verbal d’exhumation parle des ossements de Philippe, 1784A de Mathilde et «d’Agnès leur fille.» Le Journal de Trévoux avait avancé quelques années plus tôt cette incroyable assertion, et peut-être avait il contribué à établir une créance si singulière.

On eût pu cependant savoir, sans grands frais d’érudition, que le comte Philippe était mort sans enfants, après s’être marié deux fois, et Henriquez ne permettait pas de se tromper sur la princesse Agnès, enterrée à côté du comte de Flandre. Voici ce qu’on trouve au livre des Sépultures. (Fasciculus SS. O. C., tom. II, Dist. XLI, VI.)

Agnes Comitissa.

«Post tumbas D. Philippi comitis Flandriae et Mathildis uxoris ejus, jacet in eorum capella illustrissima Domina Agnes comitissa Campaniae.»

On voit par ce qui précède que les recherches 1784B de dom Le Boullenger n’avaient pas été dirigées par une critique bien sévère, et que ce religieux s’en tint à la tradition du monastère, confirmée en apparence par l’épitaphe du livre des Sépultures.

Quelques pièces, bien connues de dom Le Boullenger, eussent dû, ce me semble, éclaircir la question.

Ce sont: 1o Une petite bulle de Clément III, donnée à Latran, le XI des cal. de fév., la IIIe année de son pontificat. (22 janv. 1190.) — Confirmant la concession de la sépulture dans leur église, que les moines de Clairvaux avaient faite au comte Philippe et à Mathilde: «Nobilis viri Flandrensis comitis et Mathildis comitisse uxoris eius postulationibus inclinati, liberam sepulturam eorum in ecclesia vestra, cum Deus ipsos de presenti vita vocaverit, juxta concessionem quam illis, ad instantiam eorum fecistis, eidem ecclesie apostolica auctoritate concedimus, et presentis scripti pagina confirmamus. 1784C (Ex origin., Archives de l’Aube.)»

2o Une charte de 1191, par laquelle Philippe, comte de Flandre, donne à Clairvaux la chapelle portative qui doit l’accompagner à la croisade: «Quam mecum defero in itinere Ierosolimitano.» (Voy. cette pièce dans le Thes. nov. anecdot., tom. I, col. 639.) — Le pape Innocent III, par une petite bulle donnée à Rome, à Saint-Pierre, le IV avant les Ides de décembre, la VIIe année de son pontificat (8 décembre 1204), confirma cette donation. «Capellam, quam ad altaris obsequium (ornamentum — vid. Cang. Gloss.) clare memorie Philippus comes Flandrensis, vobis ultima voluntate legavit, sicut . . . . . ipsam possidetis . . . confirmamus.» (Les originaux de cette bulle et de la charte de donation existent aux Archives de l’Aube.)

3o Une autre charte du même, datée de l’an 1191, par laquelle on voit que Philippe avait donné en présent sa chapelle (il faut entendre par là tous les instruments et non le lieu du culte) à son épouse 1784D Mathilde: «Cappellam meam . . . donavi carissime consorti mee Mathildi Regine» (Mathilde était fille d’Alphonse, roi de Portugal; elle épousa Philippe en 1185. — Voy. Art de vérifier les dates), et que Mathilde, après l’avoir enrichie: «Sicut illam in multis ampliaverat,» l’avait donnée, à son tour, à l’église de Clairvaux, où Philippe et Mathilde avaient choisi leur sépulture, «quam et ipsa postea, de assensu et beneplacito meo, sicut illam ampliaverat, devote contulit ecclesie B. Dei Genitricis Marie Clarevallis, UBI EGO ET IPSA PARI DEVOTIONE NOSTRAM ELEGIMUS SEPULTURAM.» (Thes. nov. Anecdot., tom. I, col. 639. — L’original est aux Archives de l’Aube.)

Il me semble que ces documents authentiques établissent que le comte de Flandre, avant 1191, avait choisi sa sépulture dans l’église de Clairvaux 1785A , et non dans une chapelle séparée. On voit que la princesse Mathilde voulait être enterrée dans cette méme église; ce qui montre qu’elle songea à construire une chapelle distincte, seulement après la mort de son mari.

Il parait évident encore que les deux donations du comte Philippe et de Mathilde, mal interprétées, et prises dans un sens inexact, donnerent naissance à la tradition qui leur attribuait la construction de la chapelle de leur nom. Je dis qui leur attribuait, car il n’est pas entièrement démontré qu’elle ait été bâtie même par la princesse Mathilde, attendu que dom Le Boullenger avoue que le comte Philippe et sa femme n’y attachèrent jamais ni fonds ni revenus.

1786A M. Arnaud rapporte dans son Voyage archéologique (Troyes, 1843), p. 205, qu’il trouva abandonné, dans une rue de Bar-sur-Aube, un fragment de tombe en beau marbre noir, encadrée de filets et d’un mètre de large, avec cette inscription incomplète:

HIC JACET ILLVSTRISSIMA DOMINA MATHILDIS VXOR PHILIPPI COMITIS FLANDRIAE . . . .

C’etait tout ce que le temps avait épargné alors de la nouvelle chapelle des comtes de Flandre.

No 13. Eugène III.1785

1785B Il n’est pas sans intérêt de suivre le voyage du pape Eugène III en France, d’après les indications fournies par ses actes. Je les relève ici sur les Regesta Pontif. Roman. de Ph. Jaffé; Berolini, 1851, in-4o.

1147.

Mart. 7. 8. Secusiae.

Mart. 9. Ulciae.

Mart. 26. Cluniaci.

Mart. 30. 31. Divione.

Apr. 3. 4. ap. Masnile-Lamberti.

Apr. 10. Trecis.

Apr. 11. in territorio Trecensi.

Apr. Proviniaci.

Apr. 15. in territorio Meldensi.

Apr. 20. Parisis.

Apr. 30. ap. S. Dionysium.

Apr. 24, 25, 28. Parisiis.

Mai. 1, 6, 7, 11, 14, 15, 16, 17, 18, 25, 1785C 27, 28, 29, 30. Parisiis.

Jun. 1, 3, 5, 7. Parisiis.

Jun. 10. 11. ap. S. Dionysium.

Jun. 12, 13, 14, 17, 19, 22, 24, 26, 29. Meldis.

Jul. 2. Parisiis.

Jul. 14, 15, 16, 17, 23, 28, 29, 30, 31. Altissiodori.

Aug. 3, 8, 13, 15, 22, 23, 24, 25. Altissiodori.

Sept. 6. Altissiodori.

Sept. 14, 17. ap. Cistercium

Sept. 19. ap. S. Sequanum.

Sept. 25. Altissiodori.

Oct. 6, 10, 11, 12. Altissiodori.

Oct. 13. ap. S. Florentinum.

Oct. 24, 25, 26, 27. Catalauni.

Nov. 1, 3. Catalauni.

Nov. 5, 9, 11, 22. Virduni.

1785D Nov. 29. prope Treverim.

Nov. 30. Treveris.

Déc. 7, 18, 20, 22, 25. Treveris.

1148.

Jan. 13, 20, 27, 28, 31. Treveris.

Febr. 6, 13. Treveris.

Febr. 15. ap. Sarranium.

Febr. 18. Metis.

Febr. 22, 26. Virduni.

1786B Mart. 16, 17, 21, 28, 29, 30. Remis.

Apr. 1, 3, 4, 5, 7, 8, 10, 13, 14, 18. Remis.

Apr. 20. Catalauni.

Apr. 23. in territorio Trecensi ap. Brennam.

Apr. 24. 26. ap. CLARAMVALLEM.

Apr. 27. in territorio Lingonensi.

Apr. 29. Lingonis.

Mai. 5, 7. Bisuntii.

Mai. in montanis Jurensibus.

Mai. 14, 17, 20, 27. Lausaniae.

Jun. 16. Vercellis.

Ce simple tableau dérange bien un peu l’itinéraire que les Annales Ord. S. Benedicti (tom. VI, lib. LXXIX, p. 441) font suivre au Pape Eugène III: mais les doctes auteurs de ce grand travail ne possédaient pas le facile moyen que les Regesta m’ont fourni, et qu’ils pourront fournir à d’autres, de 1786C suivre les voyages d’un pape, jour par jour, en quelque sorte.

Il parait, d’après le Voyage Littéraire (Paris, 1717, 1re part., p. 101), que le pape Eugène III, alors qu’il n’était que simple moine à Clairvaux, avait été chargé du soin du chauffoir.

«Le chauffoir, disent les Bénédictins, joint le réfectoire. On lit sur la porte les vers suivants:

En ce chaufoir le bon religieux

Se doit chaufer sans bruit ou en silence,

Soi démontrant de maintien gracieux,

Et mêmement tenant paix et silence.

Car; comme on dit, icy en patience

Fut chaufournier Eugène le saint homme;

Mais sa vertu et grande sapience

Tant l’exalta qu’il fut Pape de Rome

Le ms. XV de M. l’abbé Matthieu renferme la copie d’une petite bulle du Pape Eugène III, que je 1786D crois utile de reproduire:

P. 216. — «Eugenius Episcopus, servus servorum Dei, dilectis filiis conventui Savigniacensi et Abbatibus monasteriorum ad idem coenobium pertinentium, eorumque fratribus, salutem et Apostolicam Benedictionem. Pax Ecclesie, fratrum concordia, Religionis vigor, status monasteriorum unitatis vinculo conservantur. Hujus rationis intuitu, dilecti filii nostri Savigniacensis et Belbacensis Abbates 1787A ad Cisterciense Capitulum venientes, tam se quam suam universitatem per carissimum filium nostrum Bernardum Clarevallis abbatem in unitatem Cisterciensis Congregationis et Ordinis suscipi a Nobis presentibus humiliter postularunt. Eorum itaque religiosam devotionem in Domino commendantes paterne charitatis debito sumus congavisi, scientes scriptum esse: frater qui adjuvatur a fratre, ambo consolabuntur. Quocirca secundum eorum gratum Deo et laudabile desiderium, tam eos quam vos sancto illo collegio sociantes, Apostolica auctoritate statuimus ut hec amabilis et jucunda societas futuris temporibus inviolabiliter observetur. Prefato igitur filio nostro Savigniacensi Abbati tanto vos propensius 1788A filialem obedientiam secundum ejusdem Ordinis instituta exhibere precipimus, quanto actentius pro vestra salute cognoscitur laborare. Si quis autem contra hujus nostre confirmationis paginam scienter venire temptaverit, indignationem Omnipotentis Dei et BB. Petri et Pauli Apostolorum ejus se noverit incursurum. Datum apud Segnanum, XIII Kal. Octobris, 1148.» (Cf. Manrique, Ann. Cist. ann. 1148, cap. VII.)

Il existe une Histoire du pontificat d’Eugène III, par dom Jean Delannes, bibliothécaire de Clairvaux; Nancy, 1737, 1 vol. pet. in-8o. — Ce religieux dit dans sa préface qu’il s’appliquait depuis trois ans à une histoire de l’abbaye de Clairvaux.

No 16. Clairvaux acquis par le gouvernement.1787

D’après un décret du 16 juin 1808, le Gouvernement se rendit acquéreur de l’ancienne abbaye de Clairvaux. La vente lui en fut faite le 27 août 1808, 1787B par M. Antoine-Pierre Rousseau, propriétaire manufacturier, membre du collége électoral du département de l’Aube. M. Rousseau l’avait acquise luimême du sieur Cauzon, premier acquéreur, le 2 vendémiaire an VIII. (24 sept. 1799.)

Clairvaux fut vendu au Gouvernement moyennant la somme de 350,000 fr.

Je lis les détails suivants dans un état des bâtiments, dressé le 8 nov. 1808 par M. Gilbert, architecte des bâtiments civils preès du ministère de l’intérieur.

ART. 27. — Eglise. «En sortant des cloîtres, on entre à l’église au-droit de la croisée.

Cette église a été transformée en halle de verrerie; elle est disposée et forme nef et bas côtés dans sa plus grande dimension, à prendre du portail à la croisée . . . . . En face de la nef, dans la partie de la croix, est un rond-point avec colonnes et galerie, et sur la gauche, au nord, une sacristie.»

Un rapport du même architecte apprend qu’en 1788A 1812 l’église était, sinon entièrement, au moins aux trois quarts démolie.

1788B Dans la chapelle actuelle des détenus, à Clairvaux, j’ai vu, en 1846, un bon tableau en grisaille représentant saint Malachie en habit de moine, la mitre en tête, et couché sur sa crosse. Des anges lui jettent des fleurs.

Quelques personnes croient y trouver l’image de saint Bernard, faute de se rappeler que le grand abbé ne porta jamais la mitre, et que, jusqu’à son trente-troisième successeur, Etienne de Soisy, elle ne parut pas sur la tête des abbés de Clairvaux.

«Stephanus de Sossiaco, disent les Elogia de dom Antoine Saulnier, XXXIV Abbas Claraevallis, anno Domini 1380, sacrae theologiae professor, quondam abbas de Pruliaco, abbatizavit hic annis viginti duo. Hic fuit primus mytratus.

Hic Stephanus de Sossiaco, dictus quoque Doctor

Primo Pruliacum rexit et hancque domum;

Annis bis denis qui praefuit atque duobus.

Primus mytratus extitit hic Dominus.»

(Cf. Gall. Christ. t. IV, col. 809.) No 17. Extraits des inventaires de Clairvaux relatifs à saint Bernard et à saint Malachie.1787 A. I. INVENTAIRE DE 1504.1787C

Inventarium sacristiae Claraevallis, factum die decima quinta mensis decembris, anno Domino millesimo quingentesimo quarto tempore Reverendi in Christo Patris et Domini, Domni Johannis quadragesimi Abbatis Claraevallis, sacrae Theologiae professoris (Johannes de Cabilone); in presentia Reverendi in Christo Patris, Domni Petri de Vireyo, senioris Abbatis, et Nonnorum (pro Domnorum) Nicolai de Parisiis Prioris, et Jacobi de Sezania sacristae ejusdem monasterii.

Fo 1, Ro et Vo. Tabula magna cum portis.

Primo loco est tabula cum portis, in quarum superficie sunt duo Angeli elevati; quae facta fuit tempore Domni Guillelmi, XII Abbatis Clarevallis, et Nonnorum Petri et Drogonis sacristarum, ex XXXV marcis argenti, et II marcis auri; continens 1787D plures lapides preciosas, videlicet XVI balais, et saphiros XXXI, et alias lapides minoris pretii. In hujus 1788C tabulae medio collocata est portio Dominicae crucis quae missa fuit Beato Bernardo a patriarcha Jerosolymitano, sicut ipse scribit ad ipsum patriarcham in quadam epistola et a tempore ipsius diu sola fuit in Claravalle . . . in eadem tabula continentur istae reliquiae . . . digiturs B: Bernardi — vacuum reperitur vasculum digiti.

Fo 2, Ro. Tabula crucis missae Beato Bernardo ab Almarico rege Jesolymitano.

Secundo loco est tabula argentea continens IX marcas argenti et I marcam auri; quam fieri fecit in Claravalle Hugo, quondam Abbas sancti Gilleni (S. Guislain, D. de Cambrai), tunc autem monachus Claraevallis, tempore Nonnorum Anselmi, Petri et Drogonis sacristarum; in cujus tabulae medio, in eminentiori parte posita est crux, quam miraculose misit Almaricus rex Jerosolymitanus in Claramvallem, post plurimos annos a transitu Beati Bernardi ab eodem in somnio admonitus, sicut in tractatude 1788D eadem plenius continetur.

Fo 5, Vo. — Undecimo loco est vas quoddam quod 1789A factum fuit tempore Nonnorum Petri et Drogonis sacristarum Claraevallis, ex III marcis et dimidia argenti, in quo collocata est crux Dominica, quam attulit in Claramvallem Nonnus Evrardus de Barris, quondam Magister Templi, postea monachus Claraevallis; avunculus Domini Adam Morinensis Episcopi, postea monachi Claraevallis. In hoc vase positus fuit dens sancti Bernardi, qui delatus est Parisiis.

Fo 8, Ro. — Sequuntur capita.

Voyez au commencement de ma lettre les paragraphes de cet inventaire, relatifs au chef de S. Bernard, et à celui de S. Malachie.

Fo 9, Ro. — On trouve cette indication: Ea quae sequuntur fuerunt addita inventario sacristiae Claraevallis, tempore Domni Petri de Vireyo, tunc Abbatis, et Domni Jacobi de Sezania sacriste.

Fo 9, Vo. — Duo pulchrae, magnae et altae imagines Beatae Mariae Virginis et sancti Bernardi, cum suis 1789B pedibus, diadematibus, et caeteris ornamentis, valde benefactis et operatis et deauratis: simul ponderantes CLXXVI marcas, III uncias, VII tresellos.

Fo 10, Ro. — Imago Beati Bernardi per se ponderat XCII marcas, VII uncias, V tresellos; sicut patet per declarationem partium ejusdem imaginis; cujus solum corpus ponderat XXX marcas, III uncias cum dimidia; caput vero duo brachia et diadema ponderant XXVII marcas, III uncias cum dimidia; ecclesia et crossa sine baculo ponderant XVI marcas, VI uncias, V tresellos; pes vero cum repositorio reliquiarum sine cristallo ponderat XVIII marcas, II uncias; quae omnes partes simul junctae efficiunt totale pondus XCII marcarum, VII unciarum, V tresellorum; sub cujus pede in philacterio continentur reliquiae sequentes; videlicet: de costa Beati Bernardi . . . de cuculla et de coopertorio Beati Bernardi, et de matta super quam obiit. Quarum imaginum lapides tam pretiosae quam communes, valorque 1789C et pretium facturae alibi diffusius declarantur; scilicet in declaratione per domnum Guillelmum Mole tradita, et sua propria manu scripta.

Fo 10, Vo. — Duo magni plati sivi disci argentei, ad serviendum praelato in majori altari, in quorum medio intra figuram solis sunt posita arma (armoiries) sancti Bernardi; qui, sine deauratura, ponderant XV marcas, V uncias cum dimidia.

Fo 11, Ro. — .Sequuntur aliae reliquiae in diversis vasculis.

Vas cristallinum eum triplici pede argenteo et deaurato, in quo positus est pollex Beatissimi Bernardi Abbatis, coopertus uno campanili argenteo, in cujus summitate est saphirus. Quod vas fecit fieri Domnus Johannes de Aizanvilla; ponderis IV marcarum cum dimidia, et dimidia uncia.

— Est brachium Beati Malachiae argenteum; quod 1790A fecit fieri idem Domnus Johannes de Aizanvilla ex VII marcis et dimidia argenti, cum lapidibus pretiosis et annulo incatenato catena argentea.

Fo 12, Ro. — Parvum scrinium ligneum deargentatum, cujus sera est de argento, plenum reliquiis, scilicet: de vestimentis sacerdotalibus Beati Bernardi Abbatis et superior pars crossae ipsius.

Fo 13, Ro. — Aliud vas oblongum . . . continens multas reliquias; videlicet: . . . . de sancto Bernardo . . . . ponderis XIII unciarum cum dimidia.

Fo 15, Ro. — Zona sancti Bernardi de serico, munita argento deaurato in suis extremitatibus.

Fo 16, Ro. — Tabulare ligneum cum portis (volets), in quo depictae sunt imagines B. M. et BB. Bernardi et Benedicti — datum a Domno Petro de Vireyo.

Fo 17, Ro. — Rosarium de ebore appositum imagini argenteae Beati Bernardi — datum a Domina Catharina Ferrières uxore Domini de Dintavilla (Dinteville).

B. INVENTAIRE DE 1640.1790B

Cet inventaire existe en original aux Archives de l’Aube. C’est un registre in-fo en papier, couvert en peau brune; sur le plat de la couverture on lit ces mots: «Inventaire de la sacristie de Clairvaulx faict en l’an 1640.» — Malheureusement il est mutilé; les feuillets manquent jusqua’au Fo 6. — Au Fo 17, Ro, on lit: † Inventaire de la sacristie de Clairvaulx comprenant le petit reliquaire, les calices et aultres argenteries, les ornements pontificaux, les parements d’aultels, chassubles, chappes, les linges, tapisseries et aultres choses appartenantes à la décoration de l’Eglise; faict le quatorziesme de may, mille six cent quarante, par l’ordonnance de Révérend Père en Dieu, dom Claude Largentier, quarante cinquiesme Abbé dudict Clairvaulx, en presence 1790C de dom Didier Gautherin, et de dom Benoist Lavandier, et mis entre les mains de dom Antoine le Borgnet soubprieur et grand sacristain, et dom Ponce Thibaron aussy sacristain.

Fo 6, Ro. — En la quatriesme armaire cottée D, est premièrement un coffre couvert de feuilles d’argent doré, lequel est supporté de quatre pattes de cuivre; au dessoubs du couvercle il y a deux rangées de reliques avec leurs noms qui sont gravés dessus; en la plus haulte rangée sont ces reliques, sçavoir: . . . . . S. Malachiae episcopi . . . . . Ce reliquiaire a estè faict du temps de dom Guido Xe Abbé de Clairvaulx.

Fo 7, Vo. — En l’armaire cottée E, il y a un beau reliquaire d’argent doré, comme en pyramide, où repose le chef de S. Barnabé apostre; la poignée a six images en esmail, au-dessus de laquelle sont 1791A représentés les mystères de l’Annonciation. Sur ces mystères il y a six chapiteaux avec six piliers et autant de tournelles, dans lesquelles les reliques n’ont point d’escripteau maintenant. Mais, selon un vieux mémoire trouvé dans ce mesme reliquaire, les reliques qui sont en ces tournelles sans inscription propre, sont . . . de coopertorio S. Bernardi. Ce reliquaire a esté faict du temps des RR. PP. en Dieu dom Evrard, XVIIe et de dom Guillausme II, XVIIIe Abbés de Clairvaulx.

Fo 9, Vo. — En la sixiesme armaire, cottée F, il y a une grande table d’argent doré, embellie de diverses pierres prétieuses et bordures de perles, communément appelée la Table des Anges, qui se ferme à deux portes, au-dessus desquelles il y a deux anges en bosse, et au-dedans l’on voit au milieu une croix artistement élabourée, contenant une partie de la vraye croix de Notre-Seigneur, envoyée à S. Bernard par le patriarche de Hiérusalem. En toute la table, il y a cent et seize cabinets tant quarrés 1791B et ronds, comme en triangle et en forme de losanges, où il y a diverses reliques avec leurs noms qui y sont gravés . . . Cette table a esté faicte du temps de dom Guillausme, XIIe Abbé de Clairvaulx. En l’un des cabinets était le doigt de S. Bernard, mais il n’y est plus maintenant.

Fo 10, Vo. — En la septiesme armaire cottée G, est premièrement une grande châsse d’argent doré, faicte en forme de coffre, préparée pour mettre le corps de nostre glorieux père S. Bernard. En l’un des bouts est un crucifix, et en l’autre, N. D. tenant le petit Jésus. A l’entour sont les douze apôtres. Aux deux chapiteaux des deux côtés de la longueur est une armoirie portant deux espées croisées avec une barre d’or, où il y a deux hures de sanglier, et au milieu une croce, le tout environné d’un chapeau de feuilles verdes. Le courvercle est persemé de pierreries, et à l’un des bouts l’image de N. S. au jugement, et en l’autre la mission du Saint-Esprit. 1791C Tout au-dessus est un petit clocher sans cloche, sur lequel il y a un crucifix. Cette châsse a esté donnée à Clairvaulx par Monsieur Tristand, évesque de Xainctes, et auparavant religieux de Clairvaulx.

Fo 11. Ro. — Même armoire.

Une image d’argent doré, haulte de quatre pieds ou environ, laquelle représente nostre glorieux Père, saint Bernard. Au pied est un chrystal enchâssé en argent, aux quatre coings duquel sont douze perles joinctes à quatre saphyrs. Soubs ce chrystal il y a: De costa S. Bernardi — de cuculla et coopertorio S. Bernardi — de pileo S. Bernardi — de matta super quam obiit S. Bernardus. A l’entour du pied sont plusieurs fenestres esmaillées, sur lequel est sainct Bernard portant l’eglise de Clairvaulx, qui en son clocher a une clochette dedans et une croix en hault, et tient une croce artistement élabourée et ornée de perles et de pierres. 1791D Derrière son chef est un diadème embelli de perles et de pierres.

Fo 11. Vo. — Même armoire.

1792A Une table d’argent doré, ornée de perles et de pierreries, appelée la Table d’Almaricus (la Table d’Amaury). Au milieu est une assé grande croix artificiellement élabourée, contenant une portion de la vraye croix de N. S . . . . . Aux quatre coings de la croix, il y a quatre quadres couverts de chrystals, soubs lesquels sont diverses reliques. Au quatriesme crystal qui est en bas, il y a des reliques de S. Malachia et de S. Bernardo. La portion du bois sacré qui est au milieu de la table a esté envoyée à Clairvaulx par Almaricus, roy de Hiérusalem . . . . . Il y a une table de parchemin faicte selon la forme de ce reliquiaire où est déclaré comme Almaricus envoya cette partie de la vraye croix à l’instance de S. Bernard qui luy apparut.

Fo 17. Ro. — L’an 1635, au mois de septembre, le grand et le petit reliquiaire, à cause des troubles et dangers de la guerre, ayans esté transportés de la sacristie, et cachés en un lieu d’asseurance jusque au mois de mars de l’an 1640, l’humidité du 1792B lieu où ils estoient enfermés a consommé et réduit en poussière les escripteaux de plusieurs reliques, qui avoient chacune en particulier leur superscription; mais n’en ont plus maintenant, ou, si elles en ont, ce sont celles-cy ou semblables: Harum reliquiarum nomina sunt in libro vitae. — Scribuntur in libro praedestinationis. — Nos latent sed non Deum. — Ignorantur a nobis. — Et d’autant que les vieux inventaires et certains mémoires qu’on a trouvés font mention des reliques de quelques reliquiaires particuliers, autant qu’on a peu cognoistre et juger probablement, et qu’on s’est peu bonnement souvenir, on a laissé sur ces reliquiaires particuliers des petits billets contenant les noms d’aucunes reliques qui y sont, quoy qu’elles soyent maintenant entresmeslées par ensemble et qu’on ne les ait peu distinguer l’une de l’autre.

Fo 18. Ro. — Un reliquiaire d’argent doré, esmaillé à l’entour; le pied est faict en triangle, sur 1792C lequel trois bandes soustiennent le chrystal où est le poulce de nostre glorieux père, saint Bernard, premier Abbé de Clairvaulx. La couverture est en forme de pyramide, et au-dessus il y a un boutun d’argent doré. Ce reliquaire a esté faict par l’ordonnance du R. P. en Dieu dom Jean d’Aizanville, XXXe Abbé de Clairvaulx.

Fo 18. Ro. — Un bras d’argent où est un os du bras de saint Malachie, archevesque et primat de toute l’Hibernie; au bas et auprès de la main est une bordure de pierreries et d’images d’argent esmaillé. En deux doigts de la main il y a deux anneaux, dont le plus petit n’est que d’airain et a une pierre au milieu; le plus grand est d’argent et a trois pierres. Au dos de la main est la Vierge en argent esmaillé.

Fo 18. Vo. — Un reliquiaire d’argent doré, faict en forme de chapelle, lequel a un crucifix en hault, se démonte au pied et s’ouvre au milieu, où il y a 1792D un rond couvert d’un vitre de part et d’aultre, soubs lequel il y a: De pulvere capitis B. Bernardi. — De cuculla S. Bernardi.

1793A Fo 19. Vo. — Un reliquiaire en façon de gobelet, faict d’une grosse noix, tenue de trois bandes d’argent. Sur le pied, qui est d’argent doré, est escript: Guido, et sur la poignée qui est en esmail: Ego sitio. La couverture de verre a un cercle d’argent doré; il y a ycellui: De pulvere capitis B. Malachiae primatis Hiberniae.

Fo 19. Vo. — un coffret de chrystal, soutenu de quatre pieds, faicts en façon de roses, desquelles trois sont d’argent et l’aultre n’est que d’airain. Aux deux bouts il y a des roses gravées, et audedans il y a: De pulvere mattae super quam obiit B. Bernardus.

Fo 20. Ro. — Un reliquiaire d’argent, en forme de tour. En la poignée sont six roses en esmail, et en hault une petite croix, et six fenestres tenues de six bandes d’argent doré. Au dedans, il y a: De pulvere capitis B. Malachiae archiepiscopi et primatis totius Hiberniae.

1793B Fo 20. Ro. — Un petit reliquaire d’argent doré; la boîte s’ouvre des deux costés, en l’un desquels est N. S. portant sa croix, et en l’autre un Agnus Dei. Il y a dedans: De pulvere capitis S. Bernardi primi Clarevallis abbatis. Il a esté faict par l’ordonance de R. P. en Dieu dom Claude Largentier, XLVe Abbé de Clairvaulx.

Fo 26. Ro. — Argenterie.

Deux petits chandeliers d’argent, lesquels sont dorés en plusieurs endroits. Les pieds sont ronds, et en la pomme d’iceux est un escusson my-parti, au milieu duquel sont les armes de sainct Bernard; et, d’un costé, il y a trois estoilles, une cicoigne et un lion, et de l’autre costé sont les mesmes armes.

Fo 30. Vo. — Ornements pontificaux.

Deux croces. — La première est d’argent doré, laquelle se démonte en quatre pièces. La pièce d’en bas est, sans façon, ferrée au bout d’une pointe de fer à pand. La seconde et troiziesme 1793C pièces sont parsemées de fleurs de lis. La quatriesme contient les douze apostres, et l’arbre de Jessé avec plusieurs feuillages à l’entour. Au mitant (milieu) du dessus de la croce est la Vierge donnant du laict à saint Bernard. Cette croce se met dans un estuis de cuir, qui est divisé en deux. Le mouchoir qui en dépend a en hault un bouton d’orfèvrie, et, au-dessoubs, est un fond de satin rouge, avec des branches d’or et semences de perles où, d’un costé, N. D. tenant son fils, en broderie d’or, et de l’autre costé est sainct Bernard, à demy-corps, tenant d’une main l’église de Clairvaulx, et de l’autre une croce. Le mouchoir a plusieurs bouquets de broderie de soye, et au bas une frangette de soye blanche et ysabelle.

La seconde croçe est d’argent blan . . . . . Le mouchoir a au hault une pointe de drap d’or, où est saint Jean l’Evangéliste, saint Bernard et deux autres religieux.

1793D Fo 58. Ro. — Chappes rouges.

Une chappe de drap d’or fin façonné de velours rouge; l’orphroy en broderie d’or et de soye a S. Bernard tenant l’éeglise de Clairvaulx, S. Robert, S. Benoist, S. Malachie . . . . . Sur le chapperon est un Monstra te esse matrem.

Fo 58. Ro. — Deux chappes de damas rouge parsemé de bouquets tant d’or fin que de soye verde et isabelle, avec des rosettes d’or . . . . . L’orphroy de l’une a six tableaux de broderie représentans divers miracles de S. Bernard. Sur le chapperon est le trépas de S. Bernard.

Fo 62. Ro. — Panneaux et rideaux servants au grand autel.

Deux rideaux de damas blan où sont les armes de S. Bernard. Le bas est orné d’une frange d’or fin et de soye rouge, et, tout à l’entour, il y a un passement d’or fin large d’un demy-doigt.

1794A Fo 63. Ro. — Trois panneaux faicts en quarreaux de drap d’or et de damas rouge à fleurs d’or et de soye, tout à l’entour est une bande de velours violet; la frange est de soye rouge. Ces panneaux servent au dossier, aultrement au ciel de damas caphart jaulne et blan, qui se met sur le tombeau de nostre glorieux Père saint Bernard, ès-jours solennels.

Fo 63. Vo. — Deux rideaux de damas rouge, l un desquels porte les armes de sainct Bernard. La frange au bas est de soye verde.

Fo 64. Vo. — Panneaux et rideaux violets pour le grand-autel.

Deux rideaux de damas violet; chacun desquels a un escusson des armes de sainct Bernard.

Fo 69. Vo. — Parements de la crédence. — Parements blancs.

Un mystérion, autrement parement blan de la crédence, qui est de satin parsenté de fleurettes; au 1794B milieu sont les armes de sainct Bernard; la frontière est faicte par quarreaux de satin jaulne, bleu, blan et rouge, avec une frange de soye de diverses couleurs. Au bas est aussy une frange de soye de plusieurs couleurs.

Fo 70. Ro. — Parements verds de la crédence.

Un mystérion de satin verd de Bourges, ayant au milieu deux anges tenant un calice, sur lequel est une hostie; et aux costés, les armes de sainct Bernard.

Fo 74. Ro. — Couvertures de diverses couleurs sur les piscines du maître-autel.

Une piscine de satin jaulne; au milieu est N. S. embrassant sa croix, et sainct Bernard à ses pieds, avec cet escripteau: Miserere mei Deus.

Fo 74. Vo. — Couvertures des piscines des petits autels. — Couvertures blanches.

Une piscine de toile blanche avec plusieurs escriptures de soye rouge, entre lesquelles il y a des 1794C barres faictes en tapisserie de soye verde. Au bas, sont deux escussons, l’un de sainct Bernard, l’autre portant un lion noir en champ d’or; au bas est une frange de soye rouge.

Fo 76. Vo. — Corporaliers et volets rouges.

Un corporalier de velours rouge, où N. D. donne du laict à sainct Bernard, en broderie d’or fin. Aux bords est escript: Beatus Bernardus quasi vas auri solidum.

Fo 78. Vo. Corporaliers et volets de diverses couleurs.

Deux corporaliers de velours bleu à ramages. En l’un est une croix de broderie parsemée de perles; en l’autre est un sainct Bernard de papier, en un rond de vieille broderie usée.

Fo 79. Coussins blancs.

Deux coussins de lacis de filet blanc. En l’un est N. D. dans un soleil, et en l’autre saint Bernard à genouil.

1794D Fo 80. Vo. Coussins de diverses couleurs.

Trois coussins en tapisserie de Turquie, où sont les armes de saint Bernard.

Fo 81. Vo. — Parures diverses pour orner plusieurs lieux de l’Eglise.

Une petite châsse de cuivre doré, fermante à deux ventillons: au dessus, l’on voit quatre ronds; l’un devant, l’autre en derrier, et les deux aultres aux deux costés. Celui qui est au-devant est couvert d’un petit chrystal, souls lequel sont les reliques . . . . . S. Malachiae . . . . . Tout au hault se met une pyramide qui a une croix, sur laquelle est un crucifix en bosse.

Fo 82. Ro. Un parement pour orner les piliers de la pyramide qui est sur la porte du choeur, entre le siége de l’abbé et du prieur, où est la Vierge tenant son Fils. Ce parement est de velours violet; au bas duquel de part et d’aultre est l’arbre de Jessé, 1795A en broderie d’or et de soye; et en hault est N. S. embrassant S. Bernard. Au haut de l’arbre de Jessé est un chapperon en broderie d’or fin, dans lequel Dieu le Père est représenté portant son Fils entre ses bras; au-dessus est le Saint-Esprit, et a costé deux anges.

Fo 82. Vo. — Un devant de corporallier de satin blan, où la Vierge donne du laict à sainct Bernard; et au hault, le Sainct-Esprit est dans une nue; le tout en broderie d’or et de soye.

Fo 82. Vo. 83. Ro. — Le poil, autrement le drap mortuaire de velours noir; ayant une croix qui va tout du long, faite de quarreaux de tapisserie, avec des noeuds d’amour et des ronds de taillure de satin blan. Au milieu il y a une teste de mort de satin, environnée de larmes d’argent et de quatre flammes de clinquant d’or; s’y voyent aussi quatre escussons: deux de saint Bernard, entourés d’un chappelet de taillure de satin blan, et les deux aultres 1795B portant les armoiries, tant de sainct Bernard et de Clairvaux, comme celles de R. P. en Dieu, dom Claude Largentier, XLVe abbé de Clairvaux, lequel a fait faire ce poil.

Fo 83. Vo. Tapisserie.

Une grande pièce de tapisserie, où est N. S. priant au Jardin, ayant aux deux bouts S. Jean et S. Bernard.

Fo 84. Ro. — Une petite pièce de tapisserie, en forme de tapis, au hault de laquelle sont les armes de S. Bernard; au milieu un ange, et au bas l’aigle de S. Jean.

Item. Une petite pièce de tapisserie, en forme de tapis; au hault sont les armes de S. Bernard, dans un rond, et au bas est S. Paul, dans un autre rond.

Item. Un petit parement de tapisserie servant au dais du tombeau de nostre glorieux Père S. Bernard, où est N. D. donnant du laict à S. Bernard; 1795C avec une armoirie qui a un chevron rompu jaulne. en champ d’azur. Au-dessus est escript: Sicut myrrha.

On conserve dans les archives de l’Aube une copie du marché de la châsse destinée par l’évèque de Saintes à renferme le corps de saint Bernard, et dont il est question dans l’inventaire de 1640, fo 10, Vo.

Cette copie est de la fin du seizième siècle ou du commencement du dix-septième; on en lira avec intérêt la reproduction.

«1577, 27 juillet. — Fut présent en sa personne Révérend Père en Dieu, messire Tristan de Bizet, Évesque de Xainctes et abbé commendataire de l’abbaye Sainct-Nicolas-au-Boys, diocèse de Laon, disant que dès son jeune aage il auroit été mys religieulx au convent et monastaire Nostre-Dame de Clervault, ordre de Cisteaulx, receu profex en icelluy et tant coustumé aux estudes, que par le moyen 1795D d’icelles et par la grace de Dieu, il auroit et a esté pourveu en grandes dignitez et offices, et à raison de ce possédé, comme il fait encores, de grands biens et possessions en l’Église. Ne voullant le dict sieur estre ingrat envers la dicte Église et convent, mais voullant aucunement icelle rémunérer et récompenser des biens spirituels et temporels qu’il en a receuz, il auroit dès longs temps eu, comme il a encores de présent, voulloir et intention de faire faire en l’honneur et gloire de Dieu Nostre Père, Saulveur et Rédempteur Jésus Christ, Père, Filz et Sainct Esprit, de la Très Sacrée Vierge Marye, Monsieur Sainct Bernard, une châsse d’argent, pour en icelle mectre et reposer les sacrez ossemens dudict sainct Bernard, estans en ladicte église Nostre-Dame de Clervault; à la charge de mectre et assocyer par les religieulx, abbé et convent dudict Clervault le dict sieur Révérend aux prières et oroisons qui se dient journellement en ladicte église et convent, et aussy de mectre et inscripre 1796A au Martiroge et livre des bienfaicts d’icelle leur dicte eglise (le nécrologe) le contenu en ces présentes, affin de perpétuelle mémoire.

«Pour faire laquelle châsse, auroit ledict sieur Révérend faict venir par devers luy honorable homme Jacques Beguyn et Jehan Jolly, maistres orfèbvres à Paris, y demeurans: assavoir, ledict Beguyn, rue des Lavandières, et le dict Jolly, rue de la Vannerie; ausquelz il auroit dict son dict voulloir et intencion, et demandé s’ilz voulloient entreprendre à faire ladicte châsse, selon le portraict qu’il leur monstreroit: à quoy lesdictz Beguyn et Jolly se seroient consentiz et accordez.

«Partant icelles partyes, de leur bon gré et bonne volonté, sans contraincte aucune, si comme elles disoient, recogneurent et confessèrent avoir faict, feisrent et font entre eulx et de bonne foy, les marché, promesses et obligations qui ensuyvent: C’est assavoir: lesdictz Beguyn et Jolly avoir 1796B promis et promectent, et de faict se sont obligez et obligent l’un pour l’autre, et chacun d’eulx seuls et pour le tout, sans division ne discution, renonceans aux béneffices de division, ordre de droict et de discution, à et envers ledict sieur Révérend, ce acceptant, de faire et parfaire bien et deument, au dict d’ouvriers et gens en ce congnoissans, ladicte châsse d’argent, de trois piedz et demy ou environ de longueur, de trois piedz de haulteur, comprins les harpies de dessoubz, et de 20 poulces de largeur; poisante huict vingtz marcs ou environ, qui sera enrichie des ymages des douze Appostres à l’entour, de l’image Nostre-Dame tenant son enffant, assize sur le bout de devant de la dicte châsse; de l’image sainct Bernard, et de la portraicture d’un priant à genoulx, en habit de religieulx dudict ordre de Cisteaulx; et y mectre et assocyer les pierreries qui leur seront baillées; et faire tous autres enrichissemens: le tout suyvant 1796C le portraict de ce faict qui a esté paraphé par lesdicts notaires soubz-signez, ne varietur, et duquel en a esté baillé autant ausdictz Beguyn et Jolly.

«Et pour ce faire sera tenu et promect ledict s’eur Révérend Évesque fournir l’argent qu’il conviendra pour ce faire: duquel ilz ont présentement receu dudit sieur Réveérend cent neuf marcs, trois onces, trois gros, pour commancer ladite châsse.

Et à faire ladicte châsse telle et ainsy que dessus seront tenuz lesditz Beguyn et Jolly commancer dedans huict jours, prochainement venant, et icelle rendre faicte et parfaicte, bien et deument comme dict est, dedans le premier jour de mars aussy prochainement venant, ou cas qu’ilz ne chomment d’argent pour mectre en oeuvre à icelle. Ceste promesse faicte moyennant et au pris de ce que ladicte châsse sera prisée et estimée pour ladite façon au dict de gens en ce congnoissans, desquelz les dictes partyes conviendront respectivement d’une part et 1796D d’autre, incontinent ladicte besongne faicte: lequel pris ledit sieur Révérend promect et gage et s’oblige bailler et payer ausdictz Beguyn et Jolly, ou au porteur: assavoir deux cens escuz d’or soleil dedans d’huy en quinze jours prochainement venant, et le reste au feur et ainsy qu’ils besoingneront à faire ladicte châsse; car ainsy a esté expressément dict, convenu et accordé entre lesdites partyes, promectans et obligeans chacun en droict soy les ditcz Beguyn et Jolly, l’un pour l’autre et chacun d’eulx seul et pour le tout, sans division ne de discution, renonceans comme dessus. Faict et passé double l’an mil cinq cens soixante dix sept, le samedi vingt septiesme jour de juillet.»

J’ajoute ici l’extrait d’un titre conservé aussi dans les archives de l’Aube.

1578, 17 nov. — Acte passé par D. Lupin Le Myre, Abbé de Clairvaux, au profit d’un certain Me Hardouyn Manchen, demeurant à Paris. On y lit: « . . . . . . . . . Pour mieulx . . . . . . . desgager nostre 1797A conscience de la promesse que nous . . . avons . . . . faicte à Messire Tristand de Bizet, naguèrs évesques de Xainctes, et de présent Abbé de S. Nicollasau-Boys . . . . . . premièrement quant il nous a promys et donné la châsse qu’il faict à présent achever pour mettre les reliques de Monsieur S. Bernard; et secondement quant il nous a donné et à nostre maison une chapelle de drap d’or toute complecte . . . . . »

— Copie sur papier. — Collationnée en 1594.

Chef d’un martyr de la légion thébaine donné à l’abbaye de Clairvaux.

1260, 2 mai. — «Universis presentes litteras inspecturis Domina Agnas Comitissa de Castris salutem et testimonium perhibere veritati. Universitati vestre tenore presentium dignum duximus intimandum quod Nos in Treverensi civitate constitute dedimus venerabili Patri Domno Johanni Abbati Clarevall. (XXe abbé de Clairvaux), ob reverentiam et 1797B devotionem quam habemus ad ipsum et ad Ordinem, unum caput de legione Thebeorum, quod nobis dedit Abbas sancti Martini Treverensis. In cuius rei testimonium presentem litteram eidem dedimus patentem sigilli nostri munimine roboratam. Datum ann. Dom. Mo.CCo.LXo. in crastino invent. S. Crucis.»

— (Archives de l’Aube.) — Original sur parchem. — scellé sur simple queue. — le sceau manque.)

Altaria Basilice Clarevallensis.

Feuille volante, écriture du XVIe siècle. (Archives de l’Aube.)

Altare S. Anne, matris B. M. V.

Altare SS. Benedicti et Roberti, CC., et Remigii episcopi.

Altare SS. MM. Georgii, Mauricii, cum sociis suis; et Arsenii, C.

Altare B. Archangeli Michaelis, et omnium BB. Spirituum.

Altare BB. Johannis et Mathei, Marci et Luce, Evangelistarum.

1797C Altare SS. Apostolorum Philippi, Jacobi, Mathie et Barnabe.

Altare SS. Apostolorum Andree et Thome, Simonis et Jude.

Altare SS. Apostolorum Petri et Pauli, Jacobi, Zebedei et Bartholomei.

Altare N. S. J. C. et ejus Genitricis.

1798A Altare S. Johannis Baptiste et precursoris Domini.

Altare SS. Stephani, Fabiani et Sebastiani, et Ignatii M. M.

Altare SS. MM. Laurentii, Vincentii et Clementis pape.

Altare SS. MM. Desiderii episcopi, Mammetis, Dionisii, Mauricii.

Altare Omnium SS.

Altare SS. Martini et Juliani CC.

Altare capelle de Larrey, dedicatum in honorem B. M. V. et apostolorum Petri et Pauli.

Altare SS. VV. Margarete, Felicitatis, necnon Mari Magdalene et Marie Egiptiace.

Altare SS. IVor Ecclesie Doctorum.

Altare SS. CC. Eligii episcopi Noviomensis, Ludovici regis Francie, et Yvonis.

Altare S. Dionisii cum sociis suis.

Altare S. Thome episcopi et martyris, et Martialis episcopi.

1798B Altare SS. Edmundi, Guillermi, Macuti et Johannis Chrisostomi episcoporum.

Altare SS. CC. Anthonii, Pauli, Fiacrii et omnium BB. Heremitarum.

Altare sacelli de Aizanvilla, consecratum in honorem B. M. et BB. Bernardi et Malachie.

Altare BB. Nicolai Mirre, Petri Tharantasie episcoporum, et Catherine V. et M.

Altare S. Crucis.

Altare S. Trinitatis et B. D. Genitricis.

Altare SS. Innocentium M. M.

Altare SS. VV. Agathe, Lucie, Prisce et Anastasie.

Altare SS. VV. Agnetis M., Petronille et Scholastice.

Altare majus Ecclesie.

Altare B. Bernardi.

Altare B. Malachie.

Altare SS. MM. Eutropii, Zozime et Bonoze.

Altare S. J. B. in capella Flandrie.

Altare S. Panthaleonis M.

1798C Altare S. Audomari episcopi.

On conserve dans les Archives de l’Aube l’inventaire des ornements de la chapelle des MM. S. Didier et S. Mammès, fait le 29 nov. 1651, par fr. Claude Jacquinet, religieux de Clairvaux. — Idem de la chapelle S. André, 18 avril 1656 et 15 avril 1669. — Idem de la chapelle des SS. Innocents, 1656. — Idem de la chapelle S. Claude, 1656.

1797 Divion. scribebam XI Kal. Apr. M. DCCC. LV.

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